Anne-Sophie Bailly

« Opération têtes coupées »

Anne-Sophie Bailly Rédactrice en chef

Il y a quelques mois, Paul Magnette prenait les commandes du PS. Et annonçait la couleur dans Le Soir » – Avec Magnette, les affaires au PS, c’est fini ? C’est toujours facile de dire ça, mais je serai d’une intransigeance robespierriste. On va couper des têtes…Je ne vais pas réhabiliter les guillotines, mais…  » Quatre mois plus tard, l’opération têtes coupées est en route.

Les derniers à en avoir fait les frais : Emir Kir et Benoît Hons. Le premier pour avoir reçu une délégation de maires turcs proches de la mouvance des Loups gris, ces ultranationalistes néofascistes. Le second pour avoir tenu des propos déplacés à l’égard des gens du voyage.

Têtes coupées et mains propres. Depuis que Pierre-Yves Dermagne a hérité du portefeuille des pouvoirs locaux, il a dû travailler d’arrache-pied sur le dossier Nethys pour le sortir du bourbier. Là aussi, les têtes sont tombées. Le ménage a été fait et l’avenir industriel des participations de la nébuleuse a (enfin ! ) repris le devant de la scène. Voo est promis à Providence, le repreneur de L’Avenir sera décidé prochainement.

C’est donc le message du PS : montrer par l’exemple que les valeurs priment désormais les calculs électoraux. Que l’entre-soi, ça fait partie d’une époque révolue. Qu’en Wallonie, on avance sur une série de dossiers. D’ailleurs, on retente même le coup du Ceta avec le Mercosur. Et qu’au fédéral, Paul Magnette se présente comme le héraut d’une gauche qui défend l’intégrité francophone et l’unité du pays en faisant barrage au séparatisme de la N-VA.

En réalité, tout n’avance pas au pas de charge. Même si c’est ce qui se dit au Café du Commerce :  » On n’a pas de gouvernement fédéral, et alors ? Ça ne change rien.  » Faux, archi-faux. Mais ça, le premier parti francophone se garde de l’ébruiter. Les entités fédérées sont dépendantes du fédéral pour une série de compétences. Et tant qu’on n’aura pas de gouvernement, certains dossiers vont rester en rade. On citera en vrac la 5G, le grand plan d’investissements de Charles Michel ou les métiers en pénurie.

Quand au dossier Kir, ne nous leurrons pas. Bien sûr, il s’agit d’une opération robespierrienne pour montrer qu’au PS, on se tient loin, très loin de l’extrême droite, alors que d’autres sont moins regardants. Que ce soit les nationalistes qui s’allient avec le Vlaams Belang pour bloquer la nomination de Zakia Khattabi à la Cour constitutionnelle ou le président du PTB qui réalise une interview croisée avec celui du Vlaams Belang.

Donc ces libertés avec le cordon sanitaire ça ne passe plus au PS. Quitte à perdre des voix. Sauf que, in fine, les positions d’Emir Kir ont sans doute fait autant de mal au PS qu’elles ne lui ont rapporté de voix. Et que l’électorat communautaire devenait un problème auquel le Parti socialiste (comme d’autres, d’ailleurs) devait s’attaquer.

On a donc induit le sentiment que la réforme du PS est lancée. Il s’érige en modèle de vertu tant dans la gestion des dérives internes que dans des négociations complètement bloquées à l’échelon fédéral. Le message officiel de Paul Magnette est :  » Les valeurs priment les calculs électoraux.  » On se demande plutôt si ce n’est pas  » Comment faire d’une pierre deux coups  » et  » Veillons à défendre nos places fortes face à Ecolo et au PTB « .

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