Marc Van Ranst © Belga/Le Vif

Marc Van Ranst: « Allez expliquer aux gens qu’on peut boire un verre en terrasse, mais pas aller à l’école »

Celine Bouckaert
Celine Bouckaert Journaliste au Vif

Pour le virologue Marc Van Ranst (KU Leuven), les bourgmestres qui décident d’autoriser l’ouverture des terrasses le 1er mai, soit une semaine avant la réouverture officielle le 8 mai, donnent le mauvais exemple, même si  » en soi ce n’est ce n’est pas plus dangereux d’ouvrir les terrasses le 1er mai que le 8 mai « . Entretien.

Quel est votre regard sur les chiffres actuels. Estimez-vous que le nombre d’hospitalisations baisse assez rapidement ?

Marc Van Ranst : Nous avions prévu cette lente diminution. Nous savions que nous allions nous retrouver sur un plateau plus élevé et que les chiffres diminueraient lentement. Les mesures actuelles auraient été très bien si nous avions eu le variant « classique ». À présent, nous avons des variants plus transmissibles qui peuvent circuler longtemps. Les mesures actuelles permettent d’éviter une très grosse vague, mais n’évitent pas de se retrouver sur un plateau élevé, qui ne baisse que lentement. C’est ce que nous avons modélisé, le gouvernement le sait, mais en fin de compte c’est lui qui décide. Nous voyons qu’au Royaume-Uni et en Israël, où l’on vaccine deux fois plus, les chiffres sont vraiment bas. Ici, les indicateurs vont baisser aussi, lentement, mais sûrement, si tout le monde fait preuve de bons sens.

Les assouplissements prévus par le Comité de concertation, c’est-à-dire l’ouverture des terrasses et la suppression du couvre-feu le 8 mai, entraîneront-ils une hausse des contaminations ?

C’est très difficile à calculer. Cela dépend de nombreux facteurs. S’il pleut le 8 mai et les jours d’après, il ne faut pas s’attendre à un pic. Si vous posez la question aux virologues, ils vont vous répondre que le 8 mai, c’était peut-être un peu tôt pour commencer à déconfiner. Cependant, il faut aussi tenir compte de réalités économiques. C’est la décision du gouvernement et il faut l’accepter. La seule chose que nous pouvons faire, c’est inciter tout le monde à être prudent.

Le 10 mai, tous les élèves de l’enseignement obligatoire reprendront les cours à 100% en présentiel. Cette rentrée aura-t-elle une influence sur la situation épidémiologique ?

Nous avons misé très fort sur le retour à l’école. Je suis plutôt d’accord avec cette reprise des cours. C’était très important pour nous. C’est d’ailleurs très difficile à expliquer qu’un jeune de 17-18 ans puisse boire une bière en terrasse, mais qu’il ne puisse pas aller à l’école. À l’école, les jeunes sont dans un environnement contrôlé et ils peuvent terminer leur année scolaire de manière normale. L’année dernière, nous avons également laissé les élèves revenir à l’école à la fin de l’année scolaire, ce qui au niveau de l’apprentissage donne un sentiment tout à fait différent aux élèves.

Plusieurs restaurateurs ont menacé de rouvrir leurs terrasses le 1er mai. Si le collectif Horeca Wallonie a renoncé, le bourgmestre de Middelkerke Jean-Marie De Decker a décidé de contourner la loi et d’installer des tables et des chaises sur la digue. Faut-il s’inquiéter de ce genre d’initiative, signe du ras-le-bol des citoyens?

De Decker ne rend pas service à Middelkerke. En soi, ce n’est pas plus dangereux d’ouvrir les terrasses le 1er mai que le 8 mai. C’est davantage un problème administratif que virologique. Le bourgmestre donne un mauvais signal là où il devrait donner l’exemple. De plus, son initiative risque d’entraîner un problème potentiel. Si tous les gens qui aiment boire une bière décident de se rendre à Middelkerke le 1er mai, là vous avez un problème.

Et un événement tel que la Boum 2, dont la police tente en vain de retirer l’annonce sur Facebook, prévu le 1er mai au Bois de la Cambre, vous inquiète-t-il?

C’est à éviter. Si l’on met suffisamment de policiers sur le coup, il n’y aura pas de problème. On le sait à l’avance, et il faut maintenir l’ordre. Point.

Cette Belgique qui bouillonne

Le Comité de concertation a opté pour la prudence et l’impatience grandit face aux mesures sanitaires. Le Vif donne la parole aux différents acteurs concernés, alors que certains représentants de la culture, l’horeca et l’événementiel menaçaient de reprendre avant l’heure, le 1er mai, et que l’adhésion des citoyens aux règles diminue. La désobéissance civile sera-t-elle évitée? Comment cette situation sera-t-elle gérée? Nous vous proposons, tout au long de la semaine, plusieurs regards sur ce moment délicat.

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