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Le plan de vaccination contre la Covid est là, sur fond d’inquiétude sur la transparence (analyse)

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

Les ministres de la Santé ont présenté leur stratégie de vaccination, dont on connaît les grandes lignes. Test-Achats dénonce « l’opacité des contrats » et les refus essuyés pour ses demandes de transparence. Parce que c’est l’Europe qui a négocié, justifie-t-on au niveau fédéral.

C’est le jour J. Les différents ministres de la Santé vont ont présenté ce jeudi l’accord enfin conclu sur la stratégie de vaccination de notre pays, lors de la conférence de presse. Le Premier ministre, Alexander De Croo (Open VLD) a annoncé mercredi que la campagne débuterait le 5 janvier.

« Un plan sur papier », dénonçait mercredi la cheffe de file CDH Catherine Fonck, dans un entretien au Vif/L’Express, en regrettant le retard pris en raison de notre complexité institutionnelle et le manque de transparence risquant d’entâcher l’adhésion de la population. L’association de consommateurs Test Achats ne dit pas autre chose ce jeudi matin en dénonçant « l’opacité des contrats d’achat des vaccins contre le coronavirus ».

Les détails du plan belge de vaccination sont connus, mais suscitent une série de questions.

Les personnes prioritaires seront les premières à être vaccinées: les plus de 65 ans, ceux de la tranche 45-65 qui souffrent de critères de comorbidité à risque et le personnel soignant. En tout, cela représente quatre millions de personnes, selon différentes sources (Conseil supérieur de la santé, Statbel, Sciensano, données Inami) dévoilées par la députée humaniste.

Le plan de vaccination prioritaire se fera en trois étapes. La première se ferait dans les hôpitaux et les structures de soins. Selon les estimations évoquées, « 340.000 pourront être vaccinées dès janvier, 210.000 à partir de février et 620.000 dès mars« , relevait cette note de travail. Les autorités locales et la première ligne se verront confiés ensuite une responsabilité importante, les centres mis en place pour les test pourraient jouer un rôle pour autant que les conditions sanitaires le permettent. Ensuite, seulement, d’autres acteurs pourront jouer un rôle et la vaccination se généraliser.

L’objectif serait d’arriver à un niveau de quelque trois millions de personnes entre avril et juin.

L’importance de l’adhésion populaire

On sait déjà que la Belgique a commandé plus de vingt millions de doses auprès de plusieurs acheteurs (AZ, Janssen, Pfizer/BioNTech, Curevac et Moderna). Les modalités précises de la stratégie dépendront aussi des feux verts accordés par l’Agence européenne du médicament, qui doit se prononcer au plus tard le 29 décembre. Au Royaume-Uni, un feu vert vient déjà d’être accordé, aussi cela pourrait-il aller plus vite au niveau européen. Les vaccins étant de différents types, avec des modes de conservation variés (congélation ou nécessité de les maintenir à -70-80°) ou des administrations variables (en une ou deux doses), cela nécessitera aussi des aménagements et du « personnel qualifié », précise la note.

Là encore, l’opposition s’inquiète de le l’opérationnalité du processus après les errements constatés en matières de masques ou de tests. Le retard pris « sur papier » et la complexité de la répartition des compétences parfois ubuesque entre les différents niveaux de pouvoir n’est pas de nature à rassurer.

L’enjeu de la communication, qui est du ressort des entités fédérées, inquiète également car l’adhésion de la population est un enjeu crucial.

Vous ne réussirez pas à convaincre les gens si vous n’avez pas cette transparence en matière de données scientifiques et de contrats, nous disait la députée Catherine Fonck. J’ai déjà abordé cela dix fois, au moins, avec le ministre Vandenbroucke et il ne m’a jamais répondu, en disant comprendre ma frustration. J’imagine pourtant que des informations ont dû être données au moment de la commande. Les informations selon lesquelles les vaccins sont efficaces à 70% ou 95%, c’est du pur marketing commercial, il n’y a pas de donnée scientifique publiée. »

L’association de consommateurs Test Achats, qui suit de près le dossier, ne dit pas autre chose dans un communiqué publié ce jeudi matin.

« Nous estimons que les documents relatifs aux accords de prix et à la responsabilité devraient être rendus publics » déclare Julie Frère, porte-parole de l’organisation pour qui « les citoyens ont le droit de recevoir ces informations parce que non seulement les pouvoirs publics négocient en leur nom, mais des milliards d’euros d’argent public ont été investis dans le développement et la production de ces vaccins ». Il faut par ailleurs à tout prix éviter que le mystére autour de ces contrats ne sape la confiance de la population, notamment dans l’efficacité et la sécurité des vaccins actuels et à venir.

Sur base du principe de publicité de l’administration, Test Achats a donc demandé à l’AFMPS et au Ministre Vandenbroucke d’obtenir une copie de ces contrats ainsi que l’avis rendu par le Comité d’avis sur base duquel la Belgique a pris la décision de souscrire à ces contrats. L’AFMPS a répondu par un refus alors que le Ministre n’a jamais répondu. L’organisation de consommateurs examine dès lors les moyens – y compris juridiques – à sa disposition, pour que transparence soit faite.

La confidentialité, a-t-on précisé à l’issue de la conférence de presse de présentation de la stratégie belge de vaccination, est due au fait que c’est la Commission européenne qui a négocié les contrats. Et qu’elle ne peut pas communiquer tant que d’autres négociations sont en cours.

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