© BELGA

Kazakhgate: Il n’y a pas eu de rapport sollicitant l’autorisation du procureur général

L’avocat général qui a conclu la transaction pénale dans le dossier du milliardaire Patokh Chodiev n’a pas adressé de rapport au procureur général de Bruxelles sollicitant son accord, est-il ressorti d’une réponse fournie par le ministre de la Justice, Koen Geens, aux députés Georges Gilkinet (Ecolo), Eric Massin (PS), Olivier Maingain (DéFI) et Marco Van Hees (PTB). D’après le procureur général, une telle formalité n’était pas nécessaire dans ce cas.

Une circulaire du 18 mai 2011 du procureur général de Bruxelles recommandait au parquet du procureur du roi et à l’auditorat du travail de ne pas conclure de transaction pénale en vertu de la loi du 14 avril 2011 tant que la loi réparatrice annoncée n’était pas entrée en vigueur.

Le document précisait toutefois que, dans des circonstances exceptionnelles, s’ils estimaient qu’une telle transaction devait être proposée, ils devaient adresser au procureur général un document circonstancié justifiant les circonstances et sollicitant son accord préalable.

Une telle formalité n’a jamais été remplie dans le dossier Chodiev et, le 17 juin, une transaction était conclue. La justification en est que la directive concernait le parquet du procureur du Roi et l’auditorat. Or, dans ce cas, c’est le parquet général qui a conclu lui-même cette transaction.

« Le procureur général et le premier avocat général ont été correctement informés, par le magistrat titulaire du dossier, du déroulement de la procédure ‘transaction pénale élargie’ dans ce dossier », a expliqué M. Geens, citant la réponse que lui a communiquée l’actuel procureur général de Bruxelles.

Le procureur général ajoute que la transaction pénale aurait pu être conclue après l’entrée en vigueur de la loi réparatrice, qui remonte au 11 juillet 2011.

Le ministre a par ailleurs indiqué que d’une vérification manuelle, il ressortait qu’une seule autre transaction pénale avait été conclue dans l’attente de la loi réparatrice, en l’occurrence dans le ressort de la Cour d’appel d’Anvers. L’enregistrement des transactions conclues n’a commencé qu’à la mi-2012.

De nombreuses questions demeurent dans ce dossier, qui ont ravivé la demande d’une commission d’enquête. La conférence de présidents de la Chambre se penchera sur ce point la semaine prochaine.

« Il reste des zones d’ombre énormes », a commenté M. Gilkinet.

Cette transaction pénale dont a bénéficié le milliardaire belge d’origine kazakh est l’une des pièces d’un puzzle judiciaire plus vaste qui s’étend sur la France. Une enquête est en cours sur des soupçons de corruption et de commissions occultes touchées en marge d’importants contrats conclus sous la présidence de Nicolas Sarkozy entre la France et le Kazakhstan entre 2010 et 2011.

Ce dossier comporte un volet belge dans lequel est mentionné l’ancien président du Sénat, Armand De Decker. Selon des révélations de médias, l’avocat, parlementaire libéral et bourgmestre d’Uccle serait intervenu auprès du ministre de la Justice de l’époque Stefaan De Clerck et de son cabinet, pour que le traitement judiciaire de M. Chodiev, alors poursuivi en Belgique pour divers chefs d’inculpation dans l’affaire Tractebel, soit adouci.

« S’il n’y avait le travail de la presse et des enquêteurs français et belges, ce qui pourrait se révéler l’un des plus grands scandales d’Etat de l’histoire récente serait resté caché », a souligné M. Maingain.

L’information judiciaire en cours en Belgique est dans sa phase finale, a répété mercredi M. Geens, sans donner d’autres détails.

A ce stade, aucune instruction n’a donc été ouverte, du moins pour le moment. « On peut s’étonner qu’un juge d’instruction n’ait pas encore été saisi par le parquet », a fait remarquer M. Maingain.

M. De Decker sera entendu par la commission de conciliation et d’arbitrage de son parti lundi prochain.

Contenu partenaire