Vincent Genot

Elections : quand les perdants prennent encore la main

Vincent Genot Rédacteur en chef adjoint Newsroom

En Belgique, la tradition veut que les présidents des plus  » grands  » partis prennent la main au lendemain des élections pour la formation des futurs gouvernements. Et si, pour une fois, on donnait la parole aux partis qui progressent, histoire de respecter la tendance imprimée par les électeurs.

Et nous voilà donc repartis pour la valse des présidents dans les salons du roi. Mais cette fois-ci, le folklore politique ne passe plus. Pour tout dire, il ne fait même plus sourire. La réserve de mansuétude est épuisée. Et on ne peut même pas reprocher à De Wever et Di Rupo de faire leur boulot en essayant d’engranger un maximum de pouvoir pour leur parti respectif. C’est comme ça en Belgique : les gens votent et les partis politiques s’arrangent entre eux pour se partager le pouvoir. Pour le bien du citoyen, cela va sans dire, nous assure-t-on. A notre époque d’urgence climatique et de déliquescence sociale, cette attitude pour le moins obsolète est suicidaire pour la démocratie.

Plus pénible encore, les partis qui ont suscité le plus d’engouement chez les électeurs semblent s’accommoder de cette situation. Ainsi, au soir du vote, il était déjà acquis dans certains QG politiques qu’en Wallonie, le PS gouvernerait avec Ecolo et ce qu’il reste du CDH. Idem pour Bruxelles, où on ajouterait une petite couche de Défi. Personne ne bronche. Ecolo ne tape pas du poing sur la table pour exiger que l’urgence climatique reste au coeur des préoccupations des futurs gouvernements avant d’entamer la moindre négociation. Non, on reste toujours poli chez les écologistes. Brin d’herbe entre les dents et coeur avec les doigts, on est content des résultats… Au point de donner l’impression de n’être finalement qu’une succursale bio d’un PS incontournable malgré les affaires.

Pas plus malin, le PTB, autre grand gagnant au sud du pays, a l’air de trouver les places dans les travées de l’opposition confortables et suffisantes. La panacée pour les anciens maoïstes qui ne ruent même plus dans les brancards, histoire de donner le change. Trop contents, sans doute, de pouvoir expliquer que eux, ils ne gouverneraient pas comme cela, mais que voulez-vous ma brave dame, personne ne leur demande jamais de prendre leurs responsabilités. S’ils ne veulent pas voir l’autre extrême du balancier politique se pointer dans le paysage francophone, ils feraient pourtant bien de construire quelque chose de responsable avec les voix que les électeurs ont bien voulu leur confier. Faute de quoi, le rouge pourrait très rapidement se transformer en noir.

Si au prochain scrutin, les extrêmes montent encore, il ne faudra donc pas s’étonner. Mais surtout, que les hommes politiques ne reviennent pas nous jouer le couplet du « nous avons tous gagné, mais il est inquiétant de voir les votes se radicaliser« . En poursuivant un jeu politique complètement dépassé, qui se préoccupe plus de la répartition du pouvoir entre les partis que des préoccupations des citoyens, ils enterrent définitivement cette idée qui veut que la démocratie soit la meilleure solution pour que les personnes vivent en harmonie. « Nous sommes la deuxième force en Wallonie et dans le trio de tête à Bruxelles. Et la famille libérale bataille pour la première place. » Tu parles, Charles, c’en est assez des comptes d’apothicaire. Notre pays, ou ce qu’il en reste, mérite mieux que ça. Le tirage au sort, peut-être ?

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