Le roi Baudouin a supervisé la formation de son neveu Philippe, prince héritier le plus longuement préparé de l'histoire de la monarchie. © ODETTE DEREZE/ISOPIX

Dans les coulisses de la formation royale des princes héritiers

Olivier Rogeau
Olivier Rogeau Journaliste au Vif

La princesse Elisabeth fête ses 18 ans ce 25 octobre. Quelles différences entre la duchesse de Brabant et les précédents princes héritiers sur les plans de l’éducation, de la formation à leur futur métier, des relations avec le souverain, de leur caractère ? Plongée dans l’histoire de la monarchie belge.

Ce 25 octobre, la princesse Elisabeth aura 18 ans. Majeure, la duchesse de Brabant pourra, si les circonstances l’exigent – décès, abdication -, succéder à son père sans l’encadrement d’une régence. Fille aînée du roi Philippe et de la reine Mathilde, elle sera la première reine régnante de l’histoire du pays, conséquence de l’abolition de la loi salique en 1991. Dans Le Vif/L’Express du 17 octobre, nous avons raconté comment Elisabeth de Belgique est préparée à son futur métier de souveraine. Voici le second volet de ce dossier, une plongée dans l’histoire de la monarchie pour comparer l’éducation et la formation de la jeune fille avec celles des précédents princes héritiers, les futurs rois Léopold II, Albert Ier, Léopold III, Baudouin, Albert II et Philippe. On ne s’attardera pas sur les princes héritiers et héritiers présomptifs disparus prématurément ou qui ont renoncé à régner, figures un peu oubliées aujourd’hui : Louis-Philippe, fils de Léopold Ier, mort à 10 mois en 1834 ; Léopold, fils de Léopold II, décédé à 9 ans et demi en 1869 ; Philippe, comte de Flandre (1837-1905), qui souffrait de surdité et avait exprimé le souhait de ne pas succéder à son frère Léopold II le cas échéant ; et son fils le prince Baudouin (1869 – 1891), emporté à l’âge de 21 ans par une pneumonie fulgurante.

En déportation, Léopold III, Lilian et un précepteur ont donné cours à Baudouin.

ÉDUCATION : LE RÔLE DES PARENTS

 » De toutes les familles de la monarchie belge qui se sont succédé en presque deux siècles d’histoire du royaume, l’actuelle est sûrement la plus équilibrée, celle où les enfants sont éduqués de manière la plus harmonieuse, estime le chroniqueur royal Patrick Weber. Elisabeth, ses frères et sa petite soeur n’ont certes pas une jeunesse tout à fait semblable à celle des autres enfants, statut de prince ou princesse oblige, mais leur éducation s’en rapproche.  » Il en est de même aujourd’hui dans les autres monarchies d’Europe, observe- t-il :  » Felipe et Letizia en Espagne, Willem-Alexander et Maxima aux Pays-Bas, William et Kate au Royaume-Uni sont de meilleurs éducateurs que leurs parents et aïeux. La reine Elizabeth d’Angleterre s’est ainsi complètement plantée dans l’éducation du prince Charles et de ses autres enfants.  »

L’historien Francis Balace (ULiège), spécialiste de la monarchie, confirme :  » Jamais avant Philippe et Mathilde un couple royal ne s’était autant investi personnellement dans l’éducation de ses enfants.  » Philippe, lui, n’a pas bénéficié d’un tel soutien affectif et de tels encouragements tout au long de son cheminement scolaire. A l’époque, ses parents, les princes de Liège Albert et Paola, vivent séparés et leurs enfants sont souvent abandonnés à leur triste sort.

L’enfance des rois Baudouin et Albert II, est, elle, marquée par la mort, la peur et les drames.  » A 5 ans, Baudouin perd sa mère, la mythique reine Astrid, disparue tragiquement en août 1935, rappelle Vincent Dujardin. Un an et demi plus tôt, il a perdu son grand-père, le très populaire Albert Ier. A 10 ans, il connaît l’exil, puis le retour au pays sous le contrôle de l’envahisseur. A 14 ans, il accompagne son père en déportation en Allemagne. Léopold III, sa seconde épouse Lilian et le précepteur Paul Paelinck donnent des cours au prince dans la forteresse de Hirschstein, où ils sont détenus. De 15 à 19 ans, Baudouin vit avec sa famille à Pregny, en Suisse. La guerre, la captivité et l’exil ont profondément perturbé l’éducation des princes et réduit leur formation.  »

Au début du xxe siècle, Elisabeth, épouse du futur Albert Ier,  » ne révèle pas une fibre maternelle très prononcée, signale Patrick Weber. Elle se décharge sans le moindre remords de l’éducation de ses enfants sur le personnel. Il est vrai que c’est la règle générale à l’époque dans les familles royales.  » Après la Grande Guerre, les princes Léopold, Charles et Marie-José reçoivent, en marge de leurs études, des leçons de leurs parents. Elisabeth veille à l’éducation musicale de ses enfants, comme le fait aujourd’hui Mathilde.  » Pour la première fois dans l’histoire de la dynastie, la famille royale apparaît, avec Albert, Elisabeth et leurs enfants, comme une vraie famille, relève Francis Balace. Autre nouveauté alors : la diffusion d’images de la famille royale, grâce aux cartes postales et magazines illustrés.  »

L'instruction de Baudouin et de son frère Albert (ici, entourant leur père Léopold III) a été perturbée par la guerre, la captivité et l'exil.
L’instruction de Baudouin et de son frère Albert (ici, entourant leur père Léopold III) a été perturbée par la guerre, la captivité et l’exil.© BELGAIMAGE

DES PRÉCEPTEURS AUX COURS À L’ÉCOLE

 » Autrefois, à Laeken comme dans les autres familles royales européennes, les princes étaient élevés et éduqués par des gouverneurs et précepteurs choisis par le Palais « , indique Patrick Weber. Au temps de Léopold Ier, un programme draconien est établi pour les études de ses trois enfants, le futur Léopold II, son frère Philippe et leur petite soeur Charlotte, la future éphémère impératrice du Mexique. Leur gouverneur a prévu un horaire de travail de 6 h 30 à 17 heures, avec trois heures d’interruption pour les repas et récréations. Leur mère, Louise d’Orléans, y a ajouté une heure en soirée, de 19 à 20 heures. Tous les mois, les trois enfants passent un examen chez la reine, qui vérifie leurs progrès. S’ils réussissent, Louise leur donne un livre de sa bibliothèque. Charlotte et Philippe, qui ont respectivement cinq et deux ans de moins que leur frère Léopold, sont presque toujours récompensés pour leurs bons résultats.

En revanche,  » Léo « , comme l’appellent ses parents, est paresseux, indiscipliné et peu intéressé par les études. Il passe son temps à dessiner,  » principalement des locomotives, avec beaucoup de fumée « , constate son père en juillet 1841.  » La seule branche qui passionne le prince héritier est la géographie « , complète Francis Balace. La politique l’attire aussi depuis son enfance, mais elle ne figure pas au programme de ses maîtres. Après la mort de leur mère, Louise, en 1850, les trois enfants royaux sont souvent livrés à eux-mêmes. Plusieurs gouverneurs se succèdent auprès d’eux, tandis que leur père est très absorbé par la vie politique et diplomatique et s’absente beaucoup pour chasser dans les Ardennes ou pour retrouver Arcadie Claret, sa maîtresse depuis le milieu des années 1840.

Le duc de Brabant, futur Léopold II, devait passer par la filière de l'audience officielle pour pouvoir parler à son royal père.
Le duc de Brabant, futur Léopold II, devait passer par la filière de l’audience officielle pour pouvoir parler à son royal père.© BELGAIMAGE

Le prince Léopold, futur Léopold III, son frère Charles, futur régent, et leur soeur, Marie-José, future reine d’Italie, sont les premiers enfants royaux de la dynastie à découvrir un vrai cadre scolaire : en Angleterre, pour cause de guerre. Léopold entre en septembre 1915 dans le très strict établissement d’Eton, Charles est inscrit à la Public School de Winchester, et Marie-José rejoint un couvent à Brentwood, puis un pensionnat à Florence, en Italie.  » Quelques décennies plus tard, ce précédent est à l’origine de l’idée de Léopold III de créer une fausse classe au palais de Laeken pour son fils aîné Baudouin, précise Patrick Weber. Elle devait donner au petit prince l’illusion d’être à l’école. Baudouin y étudie en compagnie d’enfants issus de la noblesse. C’est une période de transition dans la formation des princes belges. Une génération plus tard, le basculement est complet : Philippe, Astrid et Laurent sont inscrits, dès les primaires, dans une véritable école.  »

Avec, pour conséquence, une nouvelle inquiétude pour le Palais, ajoute Patrick Weber :  » Si l’enfant royal s’avère peu doué pour les études ou pour les contacts humains, il y a des risques que cette faiblesse soit tôt ou tard dévoilée, et suscite des commentaires négatifs sur les capacités intellectuelles ou la sociabilité du prince.  » Le 11 juin dernier, à l’occasion d’une visite dans un atelier pour jeunes en décrochage scolaire, à Etterbeek, Philippe est revenu sur son cas personnel :  » J’avais beaucoup de difficultés à l’école. Je me sentais maltraité… Il existe différents types d’intelligence et l’école semble n’être conçue que pour un seul type. Certains enfants ne sont prêts pour une telle approche que des années plus tard. Je pense que c’était mon cas.  » Baudouin et Albert n’ont pas non plus fait d’études brillantes. Après la Seconde Guerre mondiale, pendant les années d’exil de leur père en Suisse, Baudouin est inscrit à l’institut Le Rosey, à Rolle, puis au collège Calvin de Genève, fréquenté par la haute société. Humilié par ses bulletins médiocres, il se sent dépassé et complexé.

Par petites touches, le roi Philippe familiarise sa fille aînée Elisabeth avec ses futures fonctions de reine régnante.
Par petites touches, le roi Philippe familiarise sa fille aînée Elisabeth avec ses futures fonctions de reine régnante.© BENOIT DOPPAGNE/BELGAIMAGE

LA FORMATION DU SUCCESSEUR

 » Philippe a été le prince héritier le mieux préparé de l’histoire de la dynastie, assure Vincent Dujardin. Et pour cause : il a déjà 53 ans lors de son avènement. Il a eu une solide formation militaire chez les para-commandos et comme pilote, après un passage à l’Ecole royale militaire. Il est le premier universitaire de la famille et il a présidé 85 missions économiques, dans 40 pays différents. Albert II aussi est devenu roi sur le tard, à 59 ans, mais lui n’était pas destiné à régner : Baudouin avait pris son neveu Philippe sous son aile pour le préparer à lui succéder. Le règne d’Albert II est donc inattendu. Les prédécesseurs de Philippe et Albert II, eux, ont eu une formation moins longue, car ils ont été couronnés plus jeunes : Léopold II à 30 ans, Albert Ier à 34, Léopold III à 32 et Baudouin à 20, après avoir été nommé prince royal à 19.  »

La plupart des princes héritiers ont été décrits comme coincés, voire immatures.

Le futur Léopold III a été, reprend Vincent Dujardin,  » beaucoup mieux préparé à régner que son père Albert Ier ou que son grand- oncle Léopold II. Mais il a tout de même reproché à son père, mort inopinément en 1934, de ne pas l’avoir suffisamment initié aux affaires politiques.  » A la fin du règne de Léopold II, le neveu du vieux roi, le prince Albert, héritier présomptif, s’inquiète des conséquences de son manque de préparation à exercer sa future charge de chef de l’Etat.  » Réactionnaire et dépourvu de tout sens politique, son père, le comte de Flandre Philippe, ne pouvait lui être d’aucune aide, remarque Patrick Weber. Quant à son oncle, le roi Léopold II, il y a longtemps qu’Albert ne comptait plus sur lui pour le guider.  »

Depuis plusieurs années déjà, Philippe familiarise par petites touches sa fille aînée avec ses futures fonctions de reine régnante. Elisabeth est associée à des tâches de représentation, dans la mesure de ses disponibilités puisqu’elle poursuit ses études secondaires au pays de Galles.  » Le roi est évidemment la personne la mieux placée pour initier son successeur à son futur métier et aux affaires de l’Etat, reconnaît Patrick Weber. Léopold Ier aurait voulu jouer ce rôle, mais il se méfie de son fils aîné.  » Homme froid, volontiers cynique, le premier roi des Belges a une attitude très distante à l’égard du duc de Brabant, le futur Léopold II. Etant donné ses difficultés à communiquer avec lui,  » il prit bientôt l’habitude de passer par l’intermédiaire du vicomte de Conway, le secrétaire de la Liste civile, rapporte l’historienne britannique Barbara Emerson dans sa biographie Léopold II, le royaume et l’empire (éd. Duculot, 1980). Parfois, mais c’était rare, il priait Conway d’inviter l’héritier du trône à partager sa table. Mais la présence de Jules van Praet, le secrétaire du roi, donnait à la conversation un rôle plus politique que personnel. Plus tard, le roi insista pour que ses entrevues avec ses fils passent par la filière des audiences officielles.  »

Le prince Charles et le futur Léopold III derrière leurs parents. Les enfants d'Albert Ier et Elisabeth sont les premiers princes de la dynastie à avoir connu un vrai cadre scolaire, en Angleterre, du fait de la guerre.
Le prince Charles et le futur Léopold III derrière leurs parents. Les enfants d’Albert Ier et Elisabeth sont les premiers princes de la dynastie à avoir connu un vrai cadre scolaire, en Angleterre, du fait de la guerre.© GETTY IMAGES

LE BILINGUISME DU FUTUR SOUVERAIN

Trop francophone, la famille royale ? Philippe et Mathilde ont trouvé la parade à cette critique devenue récurrente au nord du pays : comme tant de parents bruxellois, ils ont scolarisé leurs enfants dans l’enseignement néerlandophone. Emmanuel, dyslexique, a été inscrit dans une école spécialisée flamande à Kessel-Lo, près de Louvain. Elisabeth, Gabriel et Eléonore ont étudié dans le très sélect collège Sint-Jan Berchmans. Inscrite dans ce collège bruxellois de septembre 2004 à juin 2018, la duchesse de Brabant y a acquis une excellente maîtrise du néerlandais. En revanche, elle a dû prendre des cours particuliers au château de Laeken pour améliorer ses connaissances en orthographe et en grammaire françaises.

Quel contraste avec le premier prince héritier du royaume ! Le prince Léopold, futur Léopold II, n’a jamais appris à parler le flamand.  » Il s’est demandé si c’était nécessaire et le Palais a estimé que ce ne l’était pas, raconte l’historien Vincent Dujardin. On lui a donné comme précepteur l’écrivain Henri Conscience, dont les oeuvres ont favorisé le développement du mouvement flamand, mais cette nomination était dans un premier temps purement honorifique. Devenu roi, Léopold répondra toujours en français à ses interlocuteurs belges.  »

LE CARACTÈRE DU PRINCE HÉRITIER

 » Les Cobourg se révèlent sur le tard « , disait-on déjà à l’époque de la jeunesse de Léopold II. Historiens et spécialistes du gotha n’ont pas manqué, il y a une dizaine d’années, de citer l’adage pour expliquer la timidité et les maladresses persistantes du prince Philippe, ces observateurs laissant entendre qu’il bonifierait avec l’âge.  » Dès l’adolescence du prince, alors que son oncle le roi Baudouin commence à superviser sa formation, se propage une légende noire sur l’héritier désigné du souverain, se souvient Francis Balace. On le dit niais, pas très malin, incapable de s’exprimer en public. Albert II a raconté qu’il avait, lui aussi, été victime d’une rumeur, dès l’âge de 5 ans : on prétendait qu’il était muet ! Pour prouver que ce n’était pas le cas, son père, le roi Léopold III, lui a fait prononcer le discours d’ouverture de l’Exposition internationale de l’eau à Liège, en 1939.  »

En 2010, Philippe est encore considéré dans le monde politique et les médias comme un prince  » besogneux  » et  » peu dégourdi « . Son allure guindée, son élocution hésitante et ses propos insipides suscitent l’ironie ou la consternation. Et tous de répéter que le fragile royaume a la chance d’avoir Albert II sur le trône, son fils n’étant  » pas encore tout à fait prêt  » à prendre la relève.  » On peut surtout parler, à propos de Philippe, d’un immense souci de bien faire, nuance l’historien Vincent Dujardin. Les spéculations sur le type de roi qu’il serait se sont largement dissipées quand il a prêté serment, en juillet 2013. Si elles ont été insistantes jusque-là, c’est parce qu’il a dû attendre plus longtemps que d’autres avant de monter sur le trône.  »

Héritier présomptif timide, gauche et profondément pessimiste, le futur Albert Ier trouve en son épouse Elisabeth l'enthousiasme qui lui fait défaut.
Héritier présomptif timide, gauche et profondément pessimiste, le futur Albert Ier trouve en son épouse Elisabeth l’enthousiasme qui lui fait défaut.© DR

 » La plupart des princes héritiers de la monarchie ont été décrits comme coincés, gauches, voire immatures, prévient Patrick Weber. Cette réserve est un trait de leur caractère, mais tient aussi à leur peur du regard des autres. A chacune de leur apparition, de leur prise de parole, on s’interroge sur leur capacité à régner.  » Le cas le plus tragique est celui du jeune Baudouin, rentré au pays en 1950 et appelé à devenir le cinquième et le plus jeune souverain de l’histoire du royaume.  » A 20 ans, à peine sorti d’une adolescence tourmentée par la guerre, l’exil et la Question royale, il doit succéder à un père qu’il aime et respecte, alors qu’il se sait timide et sans expérience, rappelle Vincent Dujardin. Baudouin souffre de voir Léopold III contesté en Belgique et vit son accession au trône comme une usurpation.  »

Autre figure de la monarchie à la jeunesse malheureuse : le duc de Brabant, futur Léopold II. Avant de devenir l’infatigable et habile  » roi bâtisseur  » et fondateur du Congo, c’était un enfant sombre et renfrogné. Son père, Léopold Ier, trouvait peu avenant ce gosse maigre au teint blafard et au regard fuyant.  » Il était défiguré par son immense nez et claudiquait légèrement, handicap qui s’aggravera avec l’âge, signale Francis Balace. Le roi a d’emblée préféré son second fils, Philippe, surnommé « Bijou », enfant affectueux et expansif, et plus encore sa petite dernière, la charmante Charlotte, future éphémère impératrice du Mexique.  »

Très tôt, le futur Léopold II a une haute opinion de lui-même comme héritier du trône : tout gamin, il exige qu’on l’appelle  » Prince « , ou  » Duc de Brabant « , ce titre remis en honneur en 1840 par Léopold Ier au profit de son fils aîné pour renouer avec les traditions médiévales de nos régions (son frère cadet Philippe, lui, est titré  » comte de Flandre « ). La mort de sa mère, la douce et fragile Louise, en 1850 à Ostende, affecte profondément  » Léo « , alors âgé de 15 ans.  » Plus taciturne que jamais, il se replia sur lui-même « , note Barbara Emerson, la biographe de Léopold II. Le duc souffre de solitude et d’un manque d’affection que ne comblera pas son mariage désastreux avec l’archiduchesse d’Autriche Marie-Henriette, en 1853.

Plus tard, il ne se remettra jamais de la perte de son unique fils, Léopold, mort en bas âge en 1869. Et voilà que son neveu, le prince Baudouin, héritier présomptif de la couronne, jeune militaire portant beau, succombe lui aussi. La Belgique serait-elle maudite ? Du coup, le nouveau prince héritier est le second fils du comte de Flandre, Albert.  » Nul ne pouvait prévoir que cet enfant maladroit et considéré comme un benêt allait devenir un jour le troisième roi des Belges, observe Patrick Weber. Ce trop grand garçon paraît toujours mal à l’aise. Ses mouvements sont tellement gauches qu’ils gênent l’assistance la mieux disposée à son égard.  »

A 22 ans, quand il fait la connaissance de sa future femme, Elisabeth de Wittelsbach, duchesse en Bavière, l’héritier présomptif de la couronne de Belgique a un peu perdu de sa gaucherie, mais son caractère est marqué par un profond pessimisme. Il trouvera en son épouse l’enthousiasme qui lui fait défaut.  » Albert n’est pas un grand orateur, indique Patrick Weber. C’est un laborieux doublé d’un timide. Mais il peut compter sur l’appui d’Elisabeth pour l’assister dans sa tâche. Quand, à la mort de Léopold II, fin 1909, il monte sur le trône, le poids de la couronne est, pour la première fois dans l’histoire de la monarchie, partagé par un couple.  »

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