Bulles à facette (3/6): le cidre du Condroz, le rêve de Roger

Sandrine GOEYVAERTS
Sandrine GOEYVAERTS Sommelière, caviste, blogueuse et auteure de Jamais en carafe (à paraître)

Combien de millions de bulles dans un verre de bière, de cidre ou de vin effervescent? Les scientifiques ont creusé la question mais quand on aime, on ne compte pas. Balade en Belgique pétillante.

A la cidrerie du Condroz, on cultive avec bonheur le plaisir de la complémentarité: construite d’abord autour de Roger, le fondateur, qui, depuis 2012, s’affaire avec une septantaine de coopérateurs, à produire des cidres de qualité, auxquels s’ajoutent Simon, et Adrien, venus donner un coup de main et apporter des expériences différentes.

Pour ce dernier, justement, c’est d’abord le vin qui fut au centre de sa vie. Ce sommelier de 26 ans a basculé du côté pomme après des discussions et quelques apéros avec Roger. « Lui a vraiment développé un savoir-faire cidricole, et puis regardez, nous sommes en plein Condroz. C’était la région des pommes et des poires, avant que tout cet ADN agricole se perde. »

En cause, des primes à l’arrachage notamment octroyées par la Région wallonne, et les arbres à fruits ont laissé place à d’autres types de paysages. Une poignée de convaincus résiste encore et toujours à l’envahissant béton. A la cidrerie du Condroz, on a choisi les hautes tiges, et en privilégiant d’anciennes variétés belges. Cwastresse, gueule de mouton, gris braibant, et surtout les reinettes dont, pour quiconque a eu la chance d’avoir un pépé un peu maraudeur, on ne peut oublier le goût acidulé, la peau légèrement âpre et la chair ultracroquante.

Comme d’autres, à la cidrerie du Condroz, on s’essaie au plus de naturalité possible. « Si je compare avec le vin, la production de cidre est un outil magnifique, environnemental, sociétal. Il est aussi moins fragile, par rapport à l’apport d’oxygène et la gestion des fermentations: si l’on en fait la démarche, la pomme offre le luxe du sans filet et du naturel à la portée de ceux qui osent. »

Parlons-en justement de ce qu’ils osent: travailler en levures indigènes, c’est-à-dire celles qui occupent le terrain. « Le monde des levures est un monde assez mystique, on trouve des levures sur les fruits mais aussi les poutres et les barriques, c’est riche et incroyable. » Privilégier les cidres extrabrut voire brut mais ne pas produire de cidres doux: « C’est un choix, on a décidé d’aller à contre-courant d’un certain commerce qui a un peu cannibalisé le sucre, on préfère ne pas se cacher derrière, et faire un cidre authentique et, surtout, vivant. »

Autre grande bataille, repopulariser l’usage du cidre à table: leur extrabrut sera parfait sur un vol-au-vent, offrant un parfait accord d’opposition.

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