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François Busnel : « Lire, c’est s’offrir les meilleures armes pour affronter le réel »

François Busnel, 49 ans, journaliste, critique et présentateur de La Grande Librairie sur France 5.

Qu’est-ce qu’un beau geste ?

Donner, sans espérer quoi que ce soit en retour.

Qu’avez-vous récemment fait pour vous-même ?

J’ai commandé une caisse de mon vin préféré, le châteauneuf-du-pape Vieux Télégraphe, que je viderai en bonne compagnie. Et je me suis offert des fougères – une de mes autres passions.

Et pour votre entourage, privé ou professionnel ?

Privé : c’est privé, justement ! Mais disons que je transforme ma maison, le plus souvent possible, en phalanstère où se régénèrent celles et ceux que j’aime. Professionnellement, je viens d’embaucher deux personnes.

Et pour la société ?

Vous voulez dire à part le tri sélectif et le compost, qui sont des gestes indispensables ? Je suis très engagé auprès d’associations qui luttent contre l’illettrisme, ce fléau qui devrait être déclaré cause nationale.

Quel beau geste avez-vous posé pour des gens qui ne vous aiment pas ou que vous n’aimez pas ?

Il n’y a pas de gens que je n’aime pas, figurez-vous. La vie est trop courte pour la perdre en haines, railleries et autres sarcasmes. Quant aux gens qui ne m’aiment pas, cela ne m’affecte plus depuis quelque temps : je me contente de ne pas leur donner prise. Cela dit, j’ai beaucoup aidé à faire connaître les livres de quelques-uns qui ne m’aiment pas et le font bruyamment savoir : si j’apprécie leur talent, je me moque de ce qu’ils pensent de moi. C’est ce qu’on appelle, je crois, la beauté du geste, non ?

Qu’avez-vous lu, vu ou entendu récemment qui vous réconcilie avec la nature humaine ?

Deux romans superbes qui vont au bout de ce que peut être le mal et la folie tout en laissant entrevoir de quelle façon la beauté nous sauve… pour peu qu’on la cherche : My Absolute Darling, de Gabriel Tallent, et Né d’aucune femme, de Franck Bouysse. Et le chant du vent dans mes fougères, au jardin. Et le scintillement des étoiles, les nuits sans lune. Et tout un tas de minuscules détails arrachés au quotidien.

Quel est l’acte dont vous êtes le plus fier ?

Je ne suis  » fier  » de rien. J’ai su partir, souvent. Inventer ma vie. Partir est le plus beau mot de la langue française. Avez-vous remarqué qu’en anglais, partir se dit  » leave  » qui se prononce comme  » live « , vivre : partir, c’est vivre !

Quel acte a-t-on posé à votre égard et qui a changé votre vie ?

Quelques personnes m’ont fait confiance. Elles m’ont ainsi permis de faire ce que j’aime : passer ma vie à lire des livres, raconter des histoires et interroger des gens que j’admire sur un plateau de télé ou au bout du monde.

Qui vous inspire ?

La femme que j’aime, quand je la regarde vivre. Cyrano, toujours… La tirade des  » Non merci  » est ma colonne vertébrale, celle du  » panache « , ma boussole :  » Que dites-vous ? C’est inutile ? Je le sais. Mais on ne se bat pas dans l’espoir du succès ! C’est bien plus beau lorsque c’est inutile !  »

Selon vous, le monde irait mieux si…

Si les gens lisaient plus. Et mieux. Les électeurs deviendraient des lecteurs. L’ignorance reculerait. La beauté s’instillerait un peu partout. L’audace et l’imagination prendraient vraiment le pouvoir. Lire, c’est s’offrir les meilleures armes pour affronter le réel. C’est délaisser les passions tristes (arrogance, cynisme, mépris, lassitude, etc.) au profit de la recherche du beau, qui passe par l’enthousiasme et la curiosité et mène à la joie.

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