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L’Europe tente à nouveau d’atterrir sur Mars

Le Vif

L’ambitieuse mission ExoMars cherche à déceler des indices de vie sur la planète Mars. Suspense: On va tenter ce mercredi de poser en douceur un atterrisseur sur Mars, un exercice périlleux.

La mission tire son nom de l’exobiologie, science qui étudie les possibilités d’existence de la vie dans l’Univers en dehors de la Terre. ExoMars s’est dotée de deux Sherlock Holmes chargés de pister la vie sur la planète rouge qui a connu dans un lointain passé des températures plus chaudes et de l’eau liquide.

Le premier détective est la sonde TGO (Trace Gas Orbiter) qui vient d’arriver vers Mars dans le cadre d’ExoMars 2016. Elle commencera à travailler début 2018.

TGO est chargé de traquer des signes de vie actuelle en reniflant des gaz à l’état de trace, notamment le méthane, dans l’atmosphère martienne.

Le second détective est un rover qui sera envoyé plus tard dans le cadre d’ExoMars 2020. Il sera dédié à la quête de la vie passée.

L’engin, qui se déplacera dans une zone d’argiles extrêmement anciennes, devra percer le sol jusqu’à deux mètres de profondeur et prélever des échantillons qui seront analysés sur place.

L’espoir est de trouver des traces de molécules organiques qui auraient pu se trouver sur Mars il y a environ 3,9 milliards d’années.

Percer le mystère du méthane

Des missions précédentes, dont Mars Express, ont permis de déceler une faible présence de méthane (CH4) dans l’atmosphère martienne. Mais d’où vient-il?

Sur Terre, 90% de ce gaz est d’origine biologique et provient principalement de la décomposition de matières organiques. Sa détection peut donc constituer un indice possible de la présence actuelle d’une vie micro-organique sur Mars. Le méthane a en effet une durée de vie limitée.

La sonde TGO va essayer de confirmer cette présence de méthane et d’analyser s’il est d’origine biologique ou bien s’il est le résultat d’un processus géologique (activité volcanique).

A quoi sert Schiaparelli?

Le module d’entrée, de descente et d’atterrissage EDM, de son petit nom Schiaparelli, est une démonstration de technologie. En clair, l’Europe veut prouver qu’elle sait faire atterrir un engin sur Mars et le faire fonctionner ensuite.

L’Europe a déjà posé avec succès le module Huygens à la surface de Titan, lune glacée de Saturne, en 2005.

Elle a aussi réalisé une première historique en novembre 2014 en réussissant à faire atterrir le petit robot Philae sur la comète Tchourioumov-Guérassimenko.

Equipé uniquement de batteries, Schiaparelli ne vivra que quelques jours (dix au maximum). La durée de sa survie dépendra du froid qui règne sur Mars. Plus les températures seront basses, plus il consommera de l’énergie pour pouvoir travailler.

L’atterrisseur est équipé d’une station météo, appelée Dreams. Pendant les deux ou trois jours de son fonctionnement, elle mesurera la pression, la température, la vitesse et la direction du vent. Mais aussi les champs électriques à la surface de Mars, une première.

Vicissitudes

Dans l’exploration spatiale, il faut savoir être opiniâtre. La mission ExoMars a connu bien des vicissitudes au cours des dernières années et elle n’est peut-être pas au bout de ses peines budgétairement.

Construite sous la maîtrise d’oeuvre du groupe Thales Alenia Space, elle a d’abord été imaginée par les Européens qui se sont ensuite rapprochés des Etats-Unis pour la développer.

Mais les Américains ont fait défection en 2011 pour des raisons budgétaires. L’Europe a alors noué un partenariat avec la Russie. Celle-ci fournit les lanceurs Proton, des instruments ainsi que la plateforme qui se posera sur Mars avec le rover (volet 2020).

Le coût des deux missions pour l’Agence spatiale européenne (ESA) est actuellement de 1,5 milliard d’euros, indique l’agence. Mais une rallonge budgétaire s’avère nécessaire d’autant plus qu’il y a quelques mois, le deuxième volet de la mission a dû être reporté de deux ans (2020 au lieu de 2018).

Le dossier sera sur la table à la prochaine conférence ministérielle de l’ESA début décembre à Lucerne (Suisse). Il sera demandé aux pays membres un supplément de 300 millions d’euros, précise l’Agence.

Un exercice périlleux

L’Europe spatiale tente mercredi de poser en douceur un atterrisseur sur Mars, un exercice périlleux destiné à prouver sa capacité à déposer sain et sauf un engin sur la planète rouge, treize ans après les mésaventures du petit Beagle 2. Simultanément, la sonde scientifique européano-russe TGO, qui s’est séparée dimanche de l’atterrisseur, doit se mettre en orbite autour de Mars. Une manoeuvre délicate elle aussi, qui nécessite une grande précision.

Depuis les années 1960, plus de la moitié des missions martiennes se sont soldées par un échec. Et jusqu’à présent, seuls les Américains ont réussi à poser sur Mars des engins qui sont parvenus à fonctionner.

Les deux opérations seront contrôlées depuis le Centre européen d’opérations spatiales (ESOC) à Darmstadt (Allemagne).

La sonde et l’atterrisseur Schiaparelli, qui ont effectué un périple de sept mois avant d’atteindre la planète, forment le premier volet d’ExoMars, mission scientifique européano-russe qui vise à rechercher des indices d’une vie actuelle et passée sur Mars. Elle se déroulera en deux temps (2016 et 2020).

TGO (Trace gas orbiter) sera chargée de « renifler » l’atmosphère martienne pour détecter des gaz à l’état de traces comme le méthane qui pourrait indiquer la présence d’une forme de vie microbienne actuelle sur la planète.

A quelques heures de l’atterrissage, « cela ne peut pas mieux se présenter. Tout est normal », déclare mercredi à l’AFP Richard Bessudo, qui a préparé la mission ExoMars pour Thales Alenia Space. Le groupe franco-italien assure la maîtrise d’oeuvre de la mission.

Schiaparelli fonce actuellement vers Mars, qui se trouve à 175 millions de kilomètres de la Terre. D’une masse de 577 kilos au départ, cette capsule de 2 m 40 de diamètre sera réveillée environ 1h30 avant son atterrissage prévu à 14H48 GMT (16H48 heure de Paris).

« La sonde TGO va très bien », souligne M. Bessudo. « Nous la surveillons en permanence ».

En revanche, la météo martienne n’est pas excellente. « Il y a des tempêtes de poussières. Mais il n’y a rien de dramatique (…). Cela ne m’inquiète pas plus que cela », a déclaré mardi soir à l’AFP le responsable de l’atterrisseur, Thierry Blancquaert.

C’est la deuxième fois que l’Europe se lance à la conquête de Mars. En 2003, la sonde européenne Mars Express avait largué un mini-atterrisseur Beagle 2, de conception britannique, qui a atterri mais n’a jamais donné signe de vie.

– ‘Six minutes de terreur’-

A 14h42 GMT (16h42 heure de Paris), à 120 km de la surface, Schiaparelli entrera dans l’atmosphère martienne à une vitesse de 21.000 km/heure.

S’écouleront ensuite six petites « minutes de terreur » comme les appellent les ingénieurs du spatial. Schiaparelli sera d’abord freiné par un bouclier thermique puis par un grand parachute. Sur la fin, neuf rétrofusées entreront en action.

Leurs moteurs seront coupés tout près du sol. Schiaparelli aura alors une vitesse nulle et il fera une petite chute libre de un ou deux mètres.

L’impact final sera amorti par une structure écrasable protégeant le ventre de l’atterrisseur.

Mais comment savoir si l’atterrissage s’est bien passé? Un radiotélescope indien sera le premier à tenter de capturer un signal du module environ dix minutes après l’impact (le temps nécessaire pour que le signal arrive à la Terre).

La sonde européenne Mars Express, toujours en vie, sera aussi à l’écoute d’un signal.

La sonde américaine MRO recueillera des données qui seront envoyées à la Terre plusieurs heures après l’atterrissage.

Schiaparelli doit se poser à l’intérieur d’une ellipse sur la plaine équatoriale de Meridiani Planum, sur laquelle a déjà atterri en 2004 le robot mobile américain Opportunity.

Le module est équipé d’une petite station météo qui mesurera la pression, la température, la vitesse du vent mais aussi les champs électriques à la surface de Mars.

La vie de Schiaparelli sera de courte durée: deux à huit jours environ car il est seulement équipé d’une batterie non rechargeable.

Mercredi, sera également une journée cruciale pour la sonde TGO, qui emporte quatre instruments dont deux conçus par les Russes. Elle doit freiner pour être capturée par l’attraction de Mars et s’insérer en orbite. Elle commencera sa mission scientifique début 2018.

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