© Bart Schoofs

Cupidon: pourquoi on tombe amoureux de collègues

Le Vif

Qu’ont en commun Bill Clinton et Brad Pitt? Ils ont rencontré l’amour sur leur lieu de travail. La raison pour laquelle cela se passe mieux pour certains que pour d’autres peut aisément s’expliquer.

Pour grimper socialement. Parce qu’on se sent seul. Comme remède contre le stress. Car l’occasion se présente. Ce ne sont-là que quelques-unes des raisons avancées par le psychologue et professeur Stefaan Lievens (UGent) pour expliquer ces romances au travail.

Il a étudié des dizaines de cas pour son livre « De la team à l’intime » (Van in team naar intiem (Academia Press). Le nombre d’histoires d’amour au travail a pris de l’ampleur ces dernières années. « Avant, on estimait que les belles femmes et l’argent devaient être gardés à la maison, mais aujourd’hui la plupart des femmes ont un travail. Par ailleurs, le travail d’équipe est fortement stimulé, ce qui fait que les gens travaillent plus ensemble et vont donc plus rapidement éprouver des sentiments les uns envers les autres. La digitalisation de la société joue aussi un rôle : il est plus facile de flirter via l’intranet ou par SMS. »

Il n’existe cependant pas de véritables statistiques sur le nombre de romances. Dans son livre, Lievens cite tout un tas d’étude plus ou moins crédibles. Notamment une étude américaine parue en 2000 qui estime que 42% des employés ont déjà eu une relation amoureuse avec un collègue, même s’ils ne sont que 7% à l’avouer. Une autre enquête du Guardian en 2008 annonce qu’un employé sur quatre aurait déjà mis un collègue dans son lit.

Nele De Cuyper, professeur de psychologie au travail de la KU Leuven, confirme qu’il n’existe que peu d’études fiables sur le sujet. « Et ce pour des raisons évidentes : les gens trouvent ce sujet trop privé pour en parler ouvertement. Ce genre d’étude demande donc beaucoup de travail, ce qui décourage. C’est dommage, car le sujet est assurément intéressant ».

Les entreprises elles-mêmes ne sont pas plus prolixes sur le sujet, si l’on en croit Lievens : « Dans beaucoup d’entreprises, il existe ce qu’on appelle un code de conduite entre collègues, qui est plutôt dissuasif. Mais virer quelqu’un parce qu’il a une relation avec un collègue est presque impossible. Ce n’est envisageable que lorsque cette relation perturbe le travail ou est contre-productive pour l’ambiance de travail. Mais allez prouver ça devant un juge du travail ! »

Amant diabolique

S’il est difficile à interdire, l’avis de deux experts sur l’amour au travail est limpide : « Réfléchissez bien avant de vous lancer ». « Il y a des pièges » dit De Cuyper. « Surtout au début, il y a beaucoup de ragots. Des ragots avec lesquels il faut apprendre à vivre. Le meilleur remède est encore d’être ouvert. Peut-être pas au premier baiser, mais bien dès que la relation devient sérieuse. Il faut aussi veiller à garder la tête froide, car au début d’une histoire d’amour on a tendance à s’emballer, ce qui peut nuire à la productivité. »

« Si deux membres d’une équipe entament une relation, ils peuvent devenir une équipe au sein d’une équipe. On parle alors d’amant diabolique. Cela peut entraîner une ambiance de compétition. Si c’est le cas, il vaut mieux que l’un des deux change de service. Mais c’est parfois plus vite dit que fait. Si la chose est relativement aisée dans une multinationale, c’est plus difficile dans une PME. »

Il reste encore un autre gros cliché. Le patron et la secrétaire. « C’est sans aucun doute une situation dangereuse. En tant que chef, on doit servir de modèle et avoir des principes des plus éthiques. En allant dîner avec sa secrétaire, le patron renvoie une image négative de lui-même, mais aussi de l’entreprise. »

Pourtant, ce genre de romance a ses avantages. « Souvent les amoureux travaillent plus : ils viennent avec plaisir et cherchent à montrer aux sceptiques que cela ne nuit en rien à leur travail. »

Bon à savoir: les endroits préférés pour des rencontres plus privées sont le local des archives, l’ascenseur, les escaliers de secours et les voitures de livraison. Les toilettes et le bureau du directeur sont moins populaires. Enfin, quand il ne s’agit pas de l’intéressé.

Stefanie Van Den Broeck

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