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Syrie: La résolution américaine passe un cap, mais les obstacles demeurent

Le Vif

Le projet de frappes américaines en Syrie a franchi un cap préliminaire mercredi, avec l’aval d’une commission du Sénat américain, mais le chef de la diplomatie John Kerry a dû ferrailler face à des représentants hostiles à toute intervention.

La commission des Affaires étrangères du Sénat américain a approuvé de justesse (10 voix contre 7) une résolution autorisant le président Barack Obama à lancer une intervention « limitée » contre le régime du président syrien Bachar al-Assad, d’une durée maximale de 60 jours avec la possibilité de la prolonger à 90 jours, sans troupes au sol.

La Maison Blanche s’est réjouie du vote, son porte-parole estimant dans un communiqué que l’intervention autorisée par la résolution « permettra(it) de défendre les intérêts de sécurité nationale des Etats-Unis, en affaiblissant les capacités d’Assad à utiliser des armes chimiques et en dissuadant l’usage futur de ces armes, alors que nous poursuivons une stratégie plus globale pour renforcer l’opposition de façon à accélérer une transition politique en Syrie ».

Malgré de longues tractations, un groupe déterminé de démocrates et républicains s’est opposé à la mesure, présageant le débat houleux qui devrait enflammer le Congrès la semaine prochaine.

« Bombarder la Syrie augmente la probabilité de nouvelles attaques au gaz »

« J’estime franchement que bombarder la Syrie augmente la probabilité de nouvelles attaques au gaz, cela pourrait augmenter les attaques contre Israël et la Turquie, les morts de civils, l’instabilité au Moyen-Orient et pousser la Russie et l’Iran à s’impliquer encore plus dans cette guerre civile », a déclaré le républicain Rand Paul, proche de la mouvance ultra-conservatrice du « Tea Party ».

L’option prônée par le président Obama rallie cependant des soutiens conservateurs. Un autre élu républicain, le député Thomas Cotton, également proche du « Tea Party », a quant à lui déclaré que, bien qu’il soit lassé de la guerre, les Etats-Unis « ont un intérêt vital à maintenir le tabou international envers les armes chimiques ».

La version adoptée mercredi précise, comme l’exigeait le républicain John McCain, que la politique officielle des Etats-Unis vise à « changer la dynamique sur le champ de bataille en Syrie ».

Au même moment, à la Chambre des représentants, le secrétaire d’Etat John Kerry a tenté de convaincre pendant quatre heures des élus dubitatifs quant à la nécessité de frapper le régime Assad. Il a assuré que les Etats-Unis bâtissaient une coalition internationale, notamment avec la France et la Ligue arabe.

« Des pays ont exprimé leur volonté d’agir », a détaillé le ministre, citant « l’Arabie saoudite, les Emirats (arabes unis), les Qataris, les Turcs et les Français ». D’après lui, les Etats-Unis ont communiqué ces deux dernières semaines avec plus d’une centaine de pays, dont 57 ont reconnu que le régime syrien avait utilisé des armes chimiques.

Et « un certain nombre d’entre eux ont demandé de faire partie d’une opération militaire », a affirmé M. Kerry, qui a en outre fait savoir que des « pays arabes avaient offert de supporter les coûts (financiers) d’une éventuelle action armée ».

« Notre silence serait un signal pour que Bachar al-Assad puisse utiliser des armes chimiques en toute impunité »

Le secrétaire d’Etat a également souligné les possibles effets, selon lui, d’une absence d’action américaine. « Notre silence, notre renoncement à agir, serait (serait) un signal que Bachar al-Assad puisse utiliser des armes chimiques en toute impunité », a-t-il déclaré devant les députés.

Si le Sénat espère adopter dans le courant de la semaine prochaine une résolution autorisant le recours à la force, le calendrier de la Chambre des représentants, contrôlée par les républicains, est flou. Les deux chambres devraient adopter des textes différents, qui devront ensuite être harmonisés.

Les dirigeants républicains de la Chambre se sont déclarés mardi favorables à des frappes contre la Syrie, mais une révolte interne gronde, en particulier au sein des ultra-conservateurs du Tea Party, très isolationnistes.

Selon un comptage du Washington Post mercredi, plus de 140 représentants (sur 433) ont déjà dit être contre une intervention ou penchent vers le « non », alors que seulement 17 ont pris position en faveur de la résolution.

Par ailleurs, le transfert du soutien militaire aux rebelles de la CIA au Pentagone serait envisagé afin de l’étendre et de mettre fin à son caractère clandestin. Ce soutien militaire, qui passe par la formation de rebelles modérés, précédemment sélectionnés, et la fourniture d’armes a été décidé en juin par le président Barack Obama après que Washington eut considéré que le régime de Bachar al-Assad avait utilisé des armes chimiques contre sa population.

Transférer la responsabilité du soutien militaire au Pentagone permettrait d’agir à « plus grande échelle » que la CIA ne peut le faire, a ajouté l’un responsable, confirmant une information du Wall Street Journal.

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