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Pakistan: l’attaque d’une école de police fait 60 morts

Trois kamikazes lourdement armés ont fait irruption pendant la nuit dans une académie de police de Quetta, au sud-ouest du Pakistan, semant la terreur pendant plusieurs heures et tuant 60 personnes avant d’être abattus.

Ce nouveau bilan, qui remplace un précédant faisant état de 58 morts, a été fourni à l’AFP mardi matin par le porte-parole du gouvernement de la province du Baloutchistan, Anwarullah Kakar. Il s’agit de l’une des attaques les plus meurtrières cette année au Pakistan.

Il a également confirmé que 118 personnes avaient été blessées. L’attentat, qui n’a pas été revendiqué dans l’immédiat, a été attribué à un groupe islamiste.

Les forces de sécurité continuaient de patrouiller sur les lieux du drame mardi matin tandis que des proches de victimes commençaient à arriver sur place, en larmes, avant d’être renvoyées vers les hôpitaux, a constaté un correspondant de l’AFP. Les funérailles des défunts devraient avoir lieu plus tard dans la journée.

Selon l’armée, les assaillants ont pénétré avant minuit dans le Collège de police situé à une vingtaine de kilomètres à l’est de Quetta, capitale de la province du Baloutchistan. Les vastes locaux abritaient quelque 700 recrues de la police, dont beaucoup ont fui, terrifiées, pendant l’assaut.

Une fois l’alerte donnée, les forces de sécurité se sont mobilisées en l’espace de 20 minutes, a déclaré le général Sher Afgan, commandant du Frontier Corps, un corps paramilitaire chargé de la contre-offensive. Sur place, « nous avons découvert que des recrues avaient été prises en otage ».

« Il a été mis fin à l’attaque environ trois heures après notre arrivée », a-t-il ajouté.

Le général a attribué l’attaque à une faction du groupe islamiste Lashkar-e-Jhangvi, allié des talibans pakistanais. Selon lui, les assaillants « communiquaient avec des cadres en Afghanistan ».

« Faille » dans la sécurité

L’attaque a été menée par trois kamikazes armés, a déclaré à la presse le ministre de l’Intérieur de la province du Baloutchistan, Mir Sarfaraz Ahmed Bugti.

« L’homme en poste sur la tour de garde s’est battu très courageusement. Après l’avoir tué, les terroristes ont réussi à entrer », a relaté M. Bugti, rejetant la notion de « faille dans la sécurité ».

« Lorsque vous êtes en état de guerre et qu’un kamikaze arrive, c’est une autre situation. Mais quoiqu’il en soit nous mènerons une enquête et les coupables seront punis », a-t-il ajouté.

« J’ai vu trois hommes en tenue de camouflage, le visage caché et armés de kalachnikovs », a raconté un témoin se présentant comme policier en formation, interviewé par une chaîne télévisée. « Ils ont commencé à tirer et sont entrés dans le dortoir mais j’ai réussi à m’échapper en passant par dessus un mur ».

Le Baloutchistan, la plus vaste et la plus pauvre des provinces du Pakistan en dépit d’importantes ressources naturelles, est l’une des plus instables du pays. Elle est régulièrement secouée par des violences islamistes, en proie à des conflits inter-communautaires ainsi qu’à une insurrection séparatiste.

En août, un attentat revendiqué à la fois par une faction talibane, Jammat-ul-Ahrar (JuA), et par le groupe Etat islamique (EI) avait fait 73 morts dans un hôpital de Quetta alors qu’une foule s’y recueillait sur la dépouille du bâtonnier de la province, assassiné quelques heures plus tôt.

Le Baloutchistan est également considéré comme stratégique car il est appelé à abriter d’ambitieuses infrastructures routières et énergétiques devant relier la Chine à la mer d’Arabie.

Ce couloir économique sino-pakistanais (CPEC), qui représente 46 milliards de dollars d’investissements chinois, a déjà été la cible de nombreuses attaques, notamment de séparatistes baloutches, mais la Chine s’est dite confiante quant à la capacité de l’armée pakistanaise à y contrôler la situation.

Les violences islamistes ont fait des milliers de morts depuis l’émergence de groupes armés extrémistes dans la foulée de la décision d’Islamabad de soutenir les Etats-Unis lors de leur invasion de l’Afghanistan des talibans en 2001 après les attentats du 11-Septembre.

Pakistan: les attentats les plus meurtriers depuis 2007

2007

– 18 oct: Deux kamikazes tuent 139 personnes dans un défilé de sympathisants célébrant à Karachi le retour de l’ex-Première ministre Benazir Bhutto après huit ans d’exil.

Le 27 décembre, Mme Bhutto et une vingtaine de personnes meurent dans un attentat-suicide visant sa voiture blindée dans la banlieue d’Islamabad.

2008

– 21 août: Au moins 64 morts dans un double attentat-suicide devant la principale usine d’armement à Wah, au nord-ouest d’Islamabad.

– 20 sept: Explosion d’un camion rempli d’explosifs devant l’entrée du Marriott, hôtel de luxe d’Islamabad: 60 morts.

2009

– 28 oct: Au moins 125 morts dans un attentat à la voiture piégée dans un marché de Peshawar (nord-ouest).

– 7-8 déc: Au moins 66 morts dans quatre attentats sur un marché de Lahore, 2e ville du pays.

2010

– 1er jan: Un attentat-suicide en plein match de volley-ball fait au moins 101 morts dans un village du nord-ouest.

– 28 mai: 82 morts à Lahore dans les attaques simultanées par des kamikazes de deux mosquées d’une secte très minoritaire de l’islam, les ahmadis.

– 9 juil: 105 morts dans un attentat-suicide devant un bureau de l’administration dans le district tribal de Mohmand (nord-ouest).

– 3 sept: 59 morts et plus de 200 blessés dans deux attentats-suicide visant des chiites et des ahmadis à Quetta (sud-ouest).

– 5 nov: 68 morts lorsqu’un kamikaze fait exploser sa bombe dans une mosquée à Akhurwall, près de Peshawar.

2011

– 3 avr: Un double attentat-suicide dans un mausolée soufi tue 50 personnes à Dera Ghazi Khan (centre).

– 13 mai: 98 morts dans un double attentat-suicide perpétré devant un centre d’entraînement de la police à Charsadda (nord-ouest). L’attaque est revendiquée par le Mouvement des talibans du Pakistan (TTP) en représailles à la mort d’Oussama Ben Laden, éliminé le 2 mai par un commando américain.

2013

– 10 jan: Un double attentat-suicide fait 92 morts dans un quartier chiite de Quetta.

– 16 fév: Quetta est de nouveau visée par un attentat lorsqu’une bombe explose sur un marché de banlieue à Hazara Town: 89 morts.

– 3 mars: Attentat à la voiture piégée à l’entrée d’un quartier chiite de Karachi: au moins 45 morts.

– 22 sept: Deux kamikazes déclenchent leurs explosifs à la sortie de la messe dans la cour d’une église de Peshawar: au moins 82 morts.

2014

– 2 nov: Un attentat suicide des talibans au poste-frontière de Wagah, près de Lahore, fait au moins 55 morts.

– 16 déc: Plus de 150 personnes, surtout des écoliers, sont tuées dans une attaque perpétrée par un commando taliban dans une école de Peshawar.

2015

– 30 jan: Un attentat perpétré en pleine prière traditionnelle du vendredi dans une mosquée chiite fait plus de 60 morts dans le Sud.

– 13 mai: Une première attaque revendiquée par le groupe Etat islamique (EI) au Pakistan fait 45 morts, des membres de la minorité chiite tués lors d’une embuscade à Karachi.

2016

– 27 mars: 75 personnes, dont nombre d’enfants, sont tuées dans un attentat près d’un parc de Lahore (est), alors que des chrétiens célébraient la fête de Pâques.

– 8 août: 73 morts et des dizaines de blessés dans un attentat devant les urgences d’un hôpital de Quetta. Environ 200 personnes étaient rassemblées après l’assassinat du bâtonnier de la province.

– 17 septembre: un kamikaze taliban se fait exploser devant une mosquée dans le district de Mohmand, faisant 36 morts.

– 24-25 octobre: au moins 58 personnes ont été tuées dans l’attaque par trois kamikazes d’un collège de police en périphérie de Quetta.

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