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« Les condamnés à perpétuité doivent garder une perspective d’être libérés un jour »

Le Vif

La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a condamné mardi les Pays-Bas pour avoir privé de toute perspective de libération un meurtrier condamné à perpétuité, en ne lui ayant pas donné accès à des soins psychiatriques.

L’homme, condamné en 1979 pour le meurtre d’une enfant de six ans, a passé 35 ans derrière les barreaux aux Antilles néerlandaises.

Il a bénéficié en 2014 d’une grâce médicale, après le diagnostic d’un cancer dont il était décédé six mois plus tard. Mais pour la CEDH – dont la décision est ici définitive – cette libération pour raisons de santé ne change rien à la validité du problème soulevé par le requérant.

Au moment où celui-ci a saisi la Cour, « aucun de ses recours en grâce n’était en pratique apte à mener à son élargissement », car il existait un « lien étroit » entre « la persistance d’un risque de récidive, d’une part, et l’absence de traitement, d’autre part », a souligné la Cour.

En conséquence, sa peine perpétuelle était « de facto » incompressible, ce qui est assimilable à un « traitement inhumain ou dégradant », ont ajouté les magistrats européens.

Dans sa jurisprudence, la CEDH exige que les peines de prison à perpétuité soient « compressibles », c’est-à-dire « soumises à un réexamen permettant aux autorités nationales de rechercher si (…) le détenu a tellement évolué et progressé » que son maintien en détention n’est plus justifié. Elle suggère en outre que ce réexamen ait lieu au plus tard après 25 ans de prison.

Cette jurisprudence n’implique pas forcément que le détenu soit effectivement libéré au bout d’un certain nombre d’années, mais seulement que le droit et la pratique lui en offrent la perspective.

Ce raisonnement avait conduit la CEDH à condamner en 2013 le Royaume-Uni pour ses peines de perpétuité réelle, sans perspective de libération autres que pour des raisons humanitaires (par exemple pour grand âge ou pour cause de maladie). De la même façon, la Turquie avait été épinglée en 2014 pour une peine similaire infligée au leader kurde Abdullah Öcalan.

A l’inverse, la législation française sur la perpétuité incompressible, instaurée en 1994, a été jugée en 2014 conforme à la Convention européenne des droits de l’homme, la CEDH ayant à l’époque estimé que le droit français offrait « une possibilité de réexamen » de la perpétuité.

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