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L’Europe enterre définitivement le traité Acta

Le Parlement européen a définitivement rejeté mercredi le traité anti-contrefaçon Acta par 478 voix contre 39 (et 165 abstentions). Les députés n’ont pas voulu attendre que la Cour européenne de Justice rende un avis préalable sur le texte controversé, comme le demandait le commissaire au commerce, Karel De Gucht.

Socialistes et écologistes, qui avaient pris fait et cause contre le texte, se sont réjouis de l’issue du vote. « La mort de ce traité liberticide et hautement toxique, c’est la victoire de la démocratie sur les lobbies, de la vérité sur les manipulations. Le dernier clou du cercueil ACTA est planté : Alea ACTA est! « , a commenté Marc Tarabella, chef de délégation PS au Parlement européen, dans un communiqué.

Chez les Verts, le Français Yannick Jadot souligne aussi que le vote est « la sanction d’un processus de négociation qui a privilégié la confidentialité et l’opacité à la transparence, la participation citoyenne et l’implication du parlement européen ».

D’autres familles politiques, à l’origine prudemment favorables au texte, l’ont également rejeté mercredi face à la pression de la société civile et des internautes, mobilisés en masse contre Acta. Pour Frédérique Ries (MR), le vote est « une réponse claire aux préoccupations citoyennes exprimées via une pétition signée par plus de 2,8 millions de personnes, en termes principalement de privation de libertés d’expression et de création ».

La libérale n’est pas pour autant opposée à un traité anti-contrefaçon. Elle appelle à une négociation « la plus transparente et la plus large possible avec la Chine et l’Inde, les deux Etats qui sont les plus laxistes en matière de produits contrefaits ». La contrefaçon « coûte 100.000 emplois à l’Europe chaque année », a-t-elle souligné.

Même son de cloche chez Anne Delvaux (cdH). Même si elle a finalement voté contre le traité, la députée a dénoncé la « désinformation » dont celui-ci a fait l’objet. Selon elle, Acta n’aurait pas mis à mal les droits des internautes, ni la vente de médicaments génériques, comme l’affirment ses détracteurs.

Les partisans du texte ont tenté, au cours des dernières semaines, de postposer le vote dans l’attente que la Cour européenne de Justice rende un avis. Mais ils ont été dépassés par la vague de protestation, tous les députés faisant état de boîtes mail inondées de courriels de protestation. Une large majorité s’est donc résignée à l’enterrer.

Le commissaire Karel De Gucht a dit « reconnaître le choix fait par le Parlement européen ». Il s’est même félicité « du débat créé par Acta parmi les citoyens européens sur l’importance de faire cesser le commerce de biens contrefaits et de protéger nos droits intellectuels pour l’emploi et les jobs en Europe ». Malgré le vote négatif, la Commission continuera de chercher l’avis juridique de la Cour sur le traité et en tiendra compte dans ses efforts ultérieurs, a-t-il dit.

Négocié entre 2006 et 2010 par une quarantaine de pays (mais pas par certains importants fournisseurs de produits contrefaits, comme la Chine), le traité Acta a été signé par les États-Unis, l’Australie, le Canada, la Corée du Sud, le Japon, le Maroc, ainsi que par 22 États membres de l’Union européenne. La ratification pose des problèmes dans de nombreux pays.

L’article 27, l’un des points controversés, stipule notamment que « les autorités compétentes seront habilitées à ordonner à un fournisseur de services en ligne de divulguer rapidement au détenteur du droit des renseignements suffisants pour lui permettre d’identifier un abonné ». Cette disposition a été critiquée comme une menace pour la vie privée. « Cela autorisera les ayants droit à obtenir des données privées sur des utilisateurs sans décision préalable d’un juge », selon l’organisation de défense des droits sur internet La Quadrature du Net.

Les opposants au traité craignent également qu’il soit utilisé pour bloquer le commerce de médicaments génériques.

Avec Belga

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