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En Catalogne, le nouveau président indépendantiste prend ses fonctions

Le Vif

Le séparatiste catalan Carles Puigdemont devait prendre mardi soir ses fonctions de nouveau président de l’exécutif de Catalogne, avec une feuille de route claire: mettre en place les institutions nécessaires à l’indépendance de la région la plus riche d’Espagne.

Le roi Felipe VI, qui incarne l’unité du pays, a sans doute signé un des décrets les plus déchirants de son règne commencé en 2014: dans le texte paru mardi au journal officiel, il nomme « président de la Generalitat (gouvernement catalan) Carles Puigdemont i Casamajo, élu par le Parlement de Catalogne lors de sa session du 10 janvier ».

Ex-maire de Gérone (nord-est), ce journaliste de 53 ans ouvertement républicain avait salué, dimanche, son investiture au parlement d’un « vive la Catalogne libre » qui résume son programme.

Mardi à 19h00 locales (18h00 GMT), le président catalan sortant Artur Mas devait passer le relais à M. Puigdemont après cinq années au pouvoir au cours desquelles ses relations avec Madrid s’étaient de plus en plus tendues.

Depuis leur victoire aux élections du 27 septembre en Catalogne, les indépendantistes – pour la première fois majoritaires au Parlement régional – se déchiraient sur l’identité du président de leur gouvernement. Les plus à gauche, les dix députés de la Candidature d’unité populaire (CUP), refusaient obstinément d’investir le président sortant Artur Mas, à qui ils reprochent notamment ses mesures d’austérité.

Samedi, Artur Mas a finalement accepté de s’effacer pour préserver le grand projet de son camp, résumé dans une résolution parlementaire en neuf points adoptée le 9 novembre: mener la région vers l’indépendance en 2017 au plus tard, en suivant une feuille de route qui prévoit que le parlement n’est pas soumis aux institutions espagnoles.

Les embauches ont commencé

M. Puigdemont doit notamment mettre en place un trésor public et une sécurité sociale qui seraient propres à la Catalogne. Le parlement régional a prévu de commencer ses travaux à ce sujet à la mi-février.

Selon un porte-parole du département d’Economie régional, les embauches sont déjà en route pour le trésor public, à partir de l’embryon d’administration chargé de collecter les impôts régionaux.

A Madrid, le gouvernement du conservateur Mariano Rajoy, qui a déjà fait annuler par le tribunal constitutionnel la résolution parlementaire du 9 novembre, a prévenu qu’il ne laisserait passer aucun acte illégal.

Le quotidien en ligne El Confidencial affirme que des mesures ont commencé à être prises pour protéger les données de quelque 1,6 million de retraités catalans qui pourraient intéresser l’exécutif catalan pour ses projets de sécurité sociale.

Le nouveau président régional aura pour bras droit Oriol Junqueras, dirigeant historique du parti ERC (Gauche républicaine, indépendantiste).

M. Junqueras sera chargé de l’économie et à ce titre des mesures d' »urgence sociale », promises à la CUP mais qui pourraient bien déplaire à certains milieux d’affaires. Elles visent notamment à garantir l’accès à l’eau, à l’électricité et au gaz pour les personnes en difficulté le droit au logement, et une hausse du salaire minimum.

L’écologiste de gauche Raul Romeva, ancien député européen, sera lui chargé des « relations étrangères » de la région.

La Catalogne aux 7,5 millions d’habitants – représentant 20% du PIB de l’Espagne – connaît depuis les années 2010 une fièvre séparatiste de plus en plus aiguë, en partie alimentée par la crise économique.

Les indépendantistes réclament un référendum d’autodétermination semblable à celui de l’Ecosse en 2014. Mais, selon les sondages, un Catalan sur deux souhaite encore rester espagnol.

La suite dépendra aussi des événements à Madrid, où le chef du gouvernement sortant, le conservateur Mariano Rajoy, peine à former un gouvernement de coalition, après avoir obtenu seulement 28,7% des suffrages et 123 sièges sur 350, à l’issue des élections législatives.

Le parti socialiste (22%), qui refuse de s’allier aux conservateurs, pourrait tenter de son côté une grande coalition de gauche, soutenue par les nationalistes et les indépendantistes auxquels il promet de privilégier le dialogue.

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