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Egypte: ce qu’il faut retenir après la destitution de Morsi

Le Vif

Après la destitution de Mohamed Morsi par l’armée, la situation en Egypte pose de nombreuses questions. Quel avenir pour les Frères musulmans? Quelles sont les intentions de l’armée? LeVif.be fait le point.

Deux ans après avoir mis à la porte son dictateur Hosni Moubarak, le peuple egyptien a réussi, avec l’aide de l’armée, à destituer le premier président élu d’Egypte, Mohamed Morsi. Le président par intérim, Adly Mansour, a prêté serment ce jeudi tandis que l’armée procédait aux arrestations de plusieurs membres des Frères musulmans. Mohamed Morsi est emprisonné de façon « préventive ». LeVif.be fait le point.

Que vont devenir les Frères musulmans?

La suite logique des évènements est l’écriture d’une nouvelle Constitution et l’organisation de présidentielles anticipées. Or, le côté encore très bouillonnant de la situation laisse ouvertes de nombreuses questions.

Le futur rôle des Frères musulmans est trouble: même exclue du pouvoir, la confrérie est très implantée et a reçu dans les urnes le soutien de plusieurs millions d’Egyptiens. Dans une perspective démocratique, il semble donc difficile de leur ôter l’opportunité de soutenir un candidat. La présidence en intérim les a d’ailleurs déjà appelés à aider à la reconstruction du pays. Une partie de la recherche de stabilité du pays tient donc à leur réaction: dans l’hypothèse d’un gouvernement d’union nationale, ils pourraient refuser de jouer le jeu et bloquer le dispositif.

Selon Vincent Hugeux, grand reporter à L’Express, les Frères musulmans, depuis 80 ans, vivent dans une culture du secret qui pourrait aussi les pousser à replonger dans une forme de clandestinité en attendant des jours meilleurs.

Adly Mansour, marionnette de l’armée?

Adly Mansour est quasiment un inconnu. Mi-mai, ce juge égyptien a été nommé par Mohamed Morsi à la tête de la Haute cour constitutionnelle, des fonctions qu’il a pris lundi, quelques jours avant de devenir président par intérim. Contrairement à d’autres, comme le représentant de l’opposition Mohamed ElBaradei, Adly Mansour n’a jamais figuré parmi les successeurs potentiels de Mohamed Morsi.

Pourquoi l’avoir choisi?

Lors de son serment, il s’est présenté comme « le garant des intérêts du peuple » et a rendu hommage à l’armée, « conscience de la nation » qui l’a placé à la tête du pays le plus peuplé du monde arabe. Certains éditorialistes, notamment au Guardian, voient en lui une poupée de chiffon brandie pour (mal) cacher le coup d’état de l’armée. Il « servira de visage à ceux qui écriront les textes constitutionnels » estime le quotidien britannique.

Pourtant, selon plusieurs analystes, à la lumière des mois chaotiques qu’elle a passé au pouvoir avant l’élection de Morsi, il est peu probable que l’armée souhaite réellement diriger l’Egypte. Christian Makarian, directeur adjoint de la rédaction à L’Express spécialiste de politique internationale, estime que l’armée ne commettra pas ces erreurs deux fois. Elle devrait tenter d’intégrer les Frères musulmans dans un gouvernement d’union nationale et faire appel à des experts -le nom de Mohamed ElBaradei est souvent cité- et à des gestionnaires pour tenter de redresser le pays.

Les raisons de la chute de Morsi

Depuis plusieurs mois, la colère grondait dans les rues du Caire. Plusieurs raisons ont conduit à un soulèvement massif, notamment au Caire. En un an, Mohamed Morsi a été incapable de mettre en oeuvre une politique intérieure pour améliorer la situation économique et sociale qui n’ont fait que se dégrader. Vainqueur des élections, Morsi a cru en cette légitimité pour faire passer en force une nouvelle Constitution: son autoritarisme et son arrogance ont donc été facteurs de graves tensions.

A quoi s’ajoutent, selon Vincent Hugeux, des éléments extérieurs: les pouvoirs judiciaires ont établi une stratégie de l’échec en s’opposant à Mohamed Morsi et l’armée est restée passive face à la montée de l’insécurité. Autant de problèmes irrésolus devenus des enjeux pour le futur gouvernement.

L’armée appelle à l’unité et la « réconciliation » après le coup d’État

L’armée égyptienne a appelé à l’unité et à la « réconciliation » après le coup d’État militaire contre le président islamiste Mohamed Morsi, dans un communiqué publié dans la nuit de jeudi à vendredi. Les forces armées appellent notamment à rejeter « la vengeance » pour « réaliser la réconciliation nationale » dans un texte publié sur la page Facebook officielle de son porte-parole. Elle indique en outre que « les mesures exceptionnelles et arbitraires contre tout mouvement politique » doivent être évitées, alors que les forces de sécurité ont mené un vaste coup de filet contre les plus hauts dirigeants des Frères musulmans dont est issu M. Morsi. Alors que les islamistes ont appelé à manifester vendredi en soutien au président déchu, faisant craindre un nouveau bras de fer après de récents heurts meurtriers entre pro et anti-Morsi, l’armée souligne que « les rassemblements pacifiques et la liberté d’expression sont des droits garantis pour tous ».

Des militants islamistes tirent sur des postes de police et militaires au Sinaï

Un soldat égyptien a été tué dans une attaque coordonnée de militants islamistes qui ont tiré vendredi matin à la roquette et à la mitrailleuse sur un poste de police et des postes militaires au Sinaï, a-t-on indiqué de source médicale. Deux soldats ont été blessés dans l’attaque d’un point de contrôle de l’armée à al-Gura, dans le nord de la péninsule. Un poste de police a été attaqué à la roquette, ont ajouté des sources de sécurité.

Par Marie Le Douaran

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