aéroport de Charm el Cheikh, le 6 novembre 2015 © Reuters

Comment peut-on placer un explosif à bord d’un avion ? Les réponses d’experts

Le Vif

Alors que la thèse de l’attentat est privilégiée après le crash d’un avion russe dans le Sinaï, les experts jugent fiables les équipements de contrôle des bagages dans la plupart des aéroports, sauf à bénéficier de complicités auprès des personnels au sol.

Comment sont contrôlés les bagages qui partent en soute ?

Sébastien Caron directeur général de ASCT International, entreprise de conseil et formation en sûreté aérienne: Le premier contrôle est celui de la compagnie aérienne qui va s’assurer que chaque passager qui a enregistré des bagages est bien monté dans l’avion. Ce « contrôle de rapprochement » est une obligation internationale.

En France et en Europe, le bagage enregistré passe ensuite dans une machine radioscopique automatique perfectionnée qui permet de détecter les molécules qui constituent 99% des explosifs. En moyenne 30% des bagages ont besoin d’une vérification effectuée par un agent de sécurité. Celui-ci envoie environ 5% des bagages pour lesquels il a encore des doutes vers une autre machine, un tomographe qui fonctionne comme un scanner médical. A ce stade 99% des bagages repartent vers les soutes, mais si à l’issue de ce circuit les services de sûreté estiment qu’il faut une vérification supplémentaire, le propriétaire de la valise est convoqué dans une salle de fouille où sa valise est ouverte.

Dans les autres pays du monde, le système de contrôle est souvent le même, mais nous n’avons pas de précisions sur les équipements de contrôle utilisés à l’aéroport de Charm el-Cheikh.

Ce système est-il fiable ?

Xavier Tytelman spécialiste indépendant de la sécurité aérienne et instructeur au Centre de traitement de la peur de l’avion: On a des niveaux de fiabilité qui sont tellement élevés dans la vérification des bagages, notamment grâce aux rayons X, que depuis les années 80, partout dans le monde on n’avait pas réussi à faire rentrer une bombe en soute « parce que ces technologies marchent très bien.

Mais on sait d’une manière générale qu’il y a des failles. Une grosse plaque de métal » peut par exemple permettre de dissimuler des matières explosives à la vue des opérateurs. Normalement, dès qu’il a un doute, l’opérateur va diriger le bagage vers une opération manuelle mais se pose ensuite la question des effectifs et du temps.

En dépit de ces contrôles, comment peut-on néanmoins introduire une bombe dans un avion ?

S.C: Dans les vecteurs d’introduction qu’on analyse aujourd’hui il y a les bagages à main qui peuvent être entrés volontairement ou non par un passager. Il y a les bagages de soute qui restent une vulnérabilité vu les gros volumes qui transitent par un aéroport et la densité des objets les composant, les approvisionnements de bord, avec la fourniture des plateaux repas, les ventes à bord jusqu’au matériel servant aux personnels qui font le ménage de l’avion et pourraient par le biais de complicités y intégrer des articles prohibés, ou encore des intrus qui vont passer dans des zones réservées.

On s’aperçoit que dans la majorité des cas (attentats ou tentatives, NDLR) on a affaire à la complicité des personnels d’aéroport. Un bagagiste pourrait très bien, une fois que les bagages ont été contrôlés, rajouter un bagage piégé dans la soute. Mais, la complicité n’est pas forcément volontaire, car on peut, par exemple, mettre la pression à quelqu’un de l’aéroport en prenant sa famille en otage pour le contraindre.

Statistiquement, il y a tous les six mois une tentative, qui pourraient avoir des conséquences très graves, dans les aéroports internationaux.

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