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Pourquoi ne pourrait-on pas voter contre un politique ?

Pierre Havaux
Pierre Havaux Journaliste au Vif

Beaucoup de candidats, peu d’élus : c’est la règle du jeu électoral. Elle reste indulgente envers celles et ceux qui tentent leur chance à un scrutin en Belgique. Tout candidat s’expose au désaveu personnel, si la pêche aux voix ne rapporte pas. Mais au moins est-il certain d’échapper à la gifle d’un rejet expressément ciblé sur sa personne.

Le système électoral pourrait se montrer moins tendre. Il suffirait de passer par un « vote à points » avec un paquet de voix positives et de voix négatives, à concentrer ou à saupoudrer sur le bulletin de vote. L’électeur serait aussi en capacité de nuire activement à un parti ou à un candidat, en pesant négativement sur sa performance électorale.

Les Suisses ont un nom pour désigner cet acte punitif, admis dans certaines élections : latoiser, pour biffer à la main les noms de candidats et les remplacer par d’autres noms figurant sur d’autres listes. Techniquement envisageable. Démocratiquement salutaire ? « Oui, répond Micael Castanheira, maître de recherche FNRS à l’ULB, mais à condition que le nombre de voix positives soit un multiple du nombre de voix négatives. La théorie en économie politique montre qu’attribuer aux électeurs un excès de voix négatives mène à de mauvais résultats. » A un comportement électoral destructeur.

L’éventualité du vote-sanction pimenterait une campagne électorale : à côté des slogans « votez pour moi » fleuriraient des consignes « votez contre elle ou lui ». A côté des voix de préférence se comptabiliseraient les voix de défiance. Bonjour les tests personnels d’impopularité. A qui la palme du plus mal-aimé chez les francophones : à Didier Reynders (MR), à Elio Di Rupo (PS), à Joëlle Milquet (CDH) ? Et Bart De Wever (N-VA), serait-il la star la plus rejetée de Flandre ? Voilà qui ne resterait pas sans effet sur les rapports de forces internes aux partis.

Ce n’est pas tout. Des « coalitions de la détestation » pourraient émerger pour contrer une formation politique jugée dangereuse. « La progression du parti nazi de Hitler en Allemagne aurait peut-être été contrariée par ce biais », estime Micael Castanheira. Le Vlaams Belang, cible d’un rejet massif ouvertement exprimé dans les urnes, n’aurait peut- être jamais atteint des sommets électoraux en Flandre.

Reste à surmonter de gros obstacles logistiques : il faudrait armer l’électeur d’un crayon rouge pour exprimer les votes positifs, d’un crayon noir pour attribuer les notes négatives…

P. Hx.

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