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Magnette-Di Rupo : nous nous sommes tant aimés

Nicolas De Decker
Nicolas De Decker Journaliste au Vif

Paul Magnette serait-il en train de s’émanciper de son père en politique ? Le Carolo, créature et dauphin programmé, d’Elio Di Rupo, multiplie en tout cas les initiatives individuelles. Elles déplaisent de plus en plus à un président de parti qui ne dit rien mais qui n’en pense pas moins.

C’était parti allègrement, dans la lumière un peu burlesque d’une comédie italienne des sixties. Ça se poursuit, aujourd’hui, dans la pénombre un peu lourde d’un drame psychologique scandinave que personne ne voudrait tourner, ni voir, et surtout dans lequel personne ne voudrait jouer. C’est pourquoi aucun des acteurs ne témoignera ici à visage découvert. Résumons-en néanmoins l’intrigue.

A l’été 2007, Elio, un Signore portant beau, assez énervé par une défaite électorale et par les moeurs rustiques de certains camarades du sud, dénichait Paul, un « sexy boy » – ainsi l’appelait-il jadis canaillement – un jeune premier assez fanfaron, pour y mettre de l’ordre. Après d’amusants rebondissements scandés de scrutins réussis, il y était parvenu, Paolo. Tellement bien que le Signore en avait fait un ministre, puis un président de parti faisant fonction. Tellement bien que plus personne ne doutait que le successeur du Signore, c’était le fanfaron. Il y a un an et demi, le Signore a – encore – décidé de la condition du jeune premier. Il serait ministre-président wallon. « C’est dur pour Rudy Demotte, mais je ne pouvais pas laisser Magnette sans rien », expliquait-il, à l’été 2014, à ceux qui s’inquiétaient des raisons de ce choix. Sans rien, c’était à dire avec le mayorat d’une ville de 200 000 habitants et un siège de parlementaire wallon. Paul Magnette n’aurait pas aimé, pour sûr.

Le problème, c’est qu’on n’est pas certain qu’il aime non plus ce que le Signore lui a donné, à savoir l’Elysette. Et qu’il s’occupe plutôt de ce que le Signore ne lui a pas cédé, à savoir la présidence du parti. Et que ce dernier s’en rend compte. Et qu’il n’aime pas non plus ça. C’est ainsi que, dans l’esprit du testateur, un héritier présomptif se transforme, petit à petit, en Brutus putatif.

« Je ne comprends pas la stratégie de Paul Magnette », commente un bon connaisseur des habitudes socialistes. « Son message n’est pas celui d’un ministre-président wallon : il écrit des essais et participe à des conférences sur l’avenir de la gauche, et ne se positionne que du bout des lèvres sur les perspectives de la Wallonie et les discussions entre régionalistes et communautaristes », poursuit-il. C’est là précisément ce qui gâte la relation du Signore et du jeune fanfaron : cette impression très romantique, baignant de jalousie la fierté créatrice du créateur se craignant dépassé par sa créature. Le Signore croit voir le fanfaron tenter le sorpasso.

L’enquête dans Le Vif/L’Express de cette semaine. Avec :

  • L’épisode de « La gauche ne meurt jamais »
  • Les cartes blanches qui rognent sur le pré carré présidentiel
  • La jalousie, camarade
  • Allô Laurette ?

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