© Belga

Kim De Gelder se voit comme un « dieu de la vie et de la mort », selon l’acte d’accusation

Le Vif

Kim De Gelder, responsable du massacre de la crèche Fabeltjesland à Termonde, se voit comme « un dieu qui peut décider de la vie et de la mort ». Il a les caractéristiques d’un tueur en série en mission (« mission serial killer ») et d’un tueur visionnaire (« visionary killer »), selon l’acte d’accusation que le parquet général a dévoilé après les premières informations livrées dans Het Nieuwsblad et De Standaard de ce vendredi.

Kim De Gelder avait tué le 23 janvier 2009 deux bébés et une femme de 54 ans à la crèche Fabeltjesland dans le quartier de Sint-Gillis-bij-Dendermonde. Il a également avoué avoir, le 16 janvier, mis fin aux jours d’Elza Van Raemdonck, une septuagénaire de Vrasene. Kim De Gelder devra répondre dès le 22 février devant un jury populaire de quatre assassinats et 25 tentatives d’assassinats. Selon son avocat, Jaak Haentjens, son client était irresponsable et devait être interné, mais la chambre des mises en accusation de Gand a décidé en juin du renvoi en assises de Kim De Gelder.

Le procès devrait donc tourner autour de cette même problématique de l’irresponsabilité ou non de Kim De Gelder. Le collège des experts psychiatres a établi que le jeune homme avait bien un contrôle total de ses actes. « Le collège décrit dans le rapport que l’accusé avait tout préparé de façon minutieuse pendant cinq mois au moins. Cette façon d’organiser les choses sur plusieurs plans durant une longue période ne peut s’expliquer, selon le collège, que s’il est question d’un système profondément délirant ou d’aliénation mentale psychotique », peut-on lire dans l’acte d’accusation.

Même le jour des faits dans la crèche, il a eu des considérations cognitives, souligne le ministère public dans le document. « Lorsqu’il est entré dans ‘Fabeltjesland’, il voulait aussi à un moment donné encore faire marche arrière, mais la porte s’est refermée automatiquement derrière lui et il a réalisé qu’une accompagnatrice l’avait vu avec un couteau. Le collège conclut donc que l’accusé était en pleine capacité et qu’il était en état de faire la différence entre ce qui était permis et ce qui ne l’était pas, entre le bien et le mal. Il ne s’agit pas d’assassinats de quelqu’un qui aurait agi de façon impulsive et désordonnée. Il était très bien préparé, a oeuvré avec sang-froid (après les faits également) et avait la liberté de choisir d’arrêter. »

Kim De Gelder a les caractéristiques tant d’un tueur en série (au moins 3 victimes à des moments différents) que d’un criminel de masse (au moins trois victimes à un moment et à un endroit). « Le collège a établi qu’il présentait plus les caractéristiques d’un tueur visionnaire « visionary killer » (certainement pour ce qui est du choix de victimes quelconques) mais qu’il opérait de façon très systématique comme un tueur en série en mission (« mission serial killer ») (chargé d’une mission déterminée). (…) En outre, il était clair, pour le collège des psychiatres, que le jeune homme entrevoyait chez lui une sorte d’omnipotence. A de nombreux moments de l’enquête, il se sentait supérieur et omnipotent (vis-à-vis de la police, des psychiatres, du personnel pénitentiaire…) et s’identifiait comme « un dieu qui peut décider de la vie et de la mort », selon l’acte d’accusation.

De Gelder compte sur une « libération future »

Par ailleurs, Kim De Gelder compte sur une « libération future » car il estime que son état médical s’est amélioré. C’est ce qu’il a déclaré lors de son audition finale, reprise dans l’acte d’accusation.

Kim De Gelder a confirmé, dans cette audition, ses aveux passés plus tôt. « Dans son audition finale, il a ajouté que de la jalousie et des obsessions avaient aussi joué un rôle. La cause de tout ceci était, selon lui, son état dépressif. Il a également exprimé son regret. Il a indiqué qu’il pouvait difficilement parler des faits mais que cela allait mieux maintenant parce qu’il s’est rendu compte qu’on pouvait apprendre des faits pour l’avenir. Il comptait donc sur une libération future car il estimait que son état médical s’était amélioré et qu’il pouvait ainsi être encadré par des médecins. »

Kim De Gelder a déclaré qu’il voulait faire autant de victimes que possible. « Ce qui avait été planifié à l’avance, c’était de tuer toutes les personnes présentes dans la crèche tout en gardant son calme. Ce n’est cependant pas ce qu’il s’est passé. Je me suis moi-même rendu compte que j’avais éprouvé quelques moments de panique durant les faits, en alternance avec des moments durant lesquels j’avais à nouveau cette panique sous contrôle. C’étaient ces instants que les témoins et/ou victimes ont décrits comme des moments où j’agissais avec calme et sérénité. C’est aussi dans ces moments calmes que je pouvais revenir au plan initial », a-t-il expliqué lors de son audition.

Jaak Haentjens, l’avocat de Kim De Gelder, plaidera à nouveau en assises l’irresponsabilité de son client et demandera son internement. Le collège des experts psychiatres a toutefois conclu qu’il n’était pas question de schizophrénie et que De Gelder n’était pas non plus psychotique. « Il était en mesure d’évaluer et de contrôler ses actes. Il ne satisfait pas aux conditions qui lui permettrait d’entrer en ligne de compte pour une mesure d’internement. En raison de son double profil de tueur en série et de criminel de masse, il est particulièrement dangereux pour la société », lit-on dans l’acte d’accusation. De plus, les psychiatres désignés par la défense elle-même concluent que le jeune homme « constitue un danger sérieux et permanent pour la société. »

« De nombreux arguments en faveur de l’irresponsabilité ne sont pas abordés »

« De nombreux arguments plaidant en faveur de l’irresponsabilité » ne sont pas abordés dans l’acte d’accusation de Kim De Gelder. C’est ce qu’a encore indiqué son avocat Jaak Haentjens.

Me Haentjens plaidera à nouveau en assises l’irresponsabilité de son client et demandera son internement. Le collège des experts psychiatres a toutefois conclu qu’il n’était pas question de schizophrénie et que De Gelder n’était pas non plus psychotique, ressort-il de l’acte d’accusation. « L’acte d’accusation est un document rédigé uniquement par le ministère public dans lequel de nombreux arguments qui plaident en faveur de l’irresponsabilité de Kim De Gelder sont négligés et n’entrent pas en ligne de compte », commente l’avocat dans un communiqué.

L’avocat critique l’information « fragmentaire et incomplète » parue dans les médias. « L’acte d’accusation se base dans sa conclusion exclusivement si pas essentiellement sur le rapport des experts psychiatres qui (…) étaient finalement divisés en interne sur l’irresponsabilité ou non de Kim De Gelder. Le rapport des experts est en outre contesté par plusieurs experts travaillant de façon indépendante les uns des autres. Et ces experts sont et restent d’avis que Kim De Gelder a agi à partir d’une perception de la réalité tout à fait déséquilibrée qui prend naissance bien avant les faits commis entre le 16 et le 23 janvier 2009. »

Le procès de Kim De Gelder débute le 22 février devant la cour d’assises de Gand. Le jury sera composé le 19 février.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire