Luc Delfosse

Jusqu’à quand va-t-on supporter le Premier ministre d’Anvers ?

Luc Delfosse Auteur, journaliste

La fuite éperdue des damnés de la guerre a, au moins, un minuscule aspect positif : elle révèle au plus grand nombre, et plus sûrement que n’importe quel traité de politique, la vraie nature de ceux qui nous gouvernent.

Et lorsque cette crise humanitaire se conjugue avec de mauvais sondages – le pouvoir use impitoyablement , même les matamores- les derniers oripeaux tombent, révélant à ceux qui s’accrochaient encore à quelques illusions, la vérité. Nue et sidérante.

Ainsi en va-t-il de Bart De Wever et de ses lieutenants qui, apparemment en perte de vitesse et doublés par l’extrême droite -celle-là même qu’ils croyaient avoir asséchée aux dernières législatives- , multiplient les déclarations de Tartarin, exigent des barbelés aux frontières, agitent le spectre d’un « complot antigouvernemental » orchestré comme il se doit par « l’extrême gauche », réclame la révision de ces Traités internationaux qui font parfois la grandeur du genre humain. En l’occurrence: un homme égale un homme. A fortiori, un homme victime de la barbarie la plus abjecte.

Dès lors, la question n’est évidemment pas « Jusqu’où BDW ira-t-il » , que posait, ce matin, un « quotidien de référence » francophone. Comme si ses journalistes, depuis des années, n’avaient pas sué sang et eau pour décrypter, analyser et commenter les déclarations la stratégie et le programme de la NVA.

Elio Di Rupo qui se sent tout à coup revivre, pose une question tout aussi (faussement) niaise: quand vont donc cesser ces « provocations quotidiennes » ? Jamais, Mr le président et vous le savez fort bien. Car au-delà des mots qui doivent faire mouche, au-delà des poses d’artilleur, De Wever et sa garde déroulent tout simplement un programme idéologique huilé comme un coucou suisse.

Jusqu’à quand le Premier ministre de Bruxelles et le MR qui jouent la carte de l’humanisme, accepteront-ils de composer avec le Premier ministre d’Anvers

Alors, cessons de tourner autour du pot et de pousser des cris de vieilles duchesses offensées. La question n’est pas : jusqu’où iront-ils mais jusqu’à quand les supporterons-nous? Et son corollaire politique: jusqu’à quand le Premier ministre de Bruxelles et le MR qui jouent la carte de l’humanisme, accepteront-ils de composer avec le Premier ministre d’Anvers et la NVA qui incarnent jusqu’à la caricature le courant néo-poujadiste qui submerge la vieille Europe? Car Mr De Wever n’est pas « simplement » le chef de file des indépendantistes flamands. Il est d’abord le porte-voix de ces nouveaux riches, de ces m’as-tu-vu arrogants, de ces frileux pour qui la solidarité est une injure à leur statut d égoïste patenté, sauf à exhiber à la télé des chèques (défiscalisés) pour leurs oeuvres de charité ?

Nationaliste? Quelle bonne blague ! BDW et son clan sont avant tout égocentriques, racrapotés et secs comme tous ces parvenus qui friment, se mirent et se la pètent de façon indécente de Budapest à Rome, Paris ou La Haie en inculquant à leurs femmes, leurs enfants, leurs sujets, leurs servantes, leurs chauffeurs, leurs députés et leurs clients que la loi du plus fort est d’essence divine. Bref, chacun pour soi et pour son compte en banque. Et Dieu pour tous, surtout pour les gueux. Qu’ils soient Wallons, Grecs, Syriens. Ou Flamands. De cette Flandre que l’on aime, qui réfléchit plus loin que le bout de ses prises de bénéfices, écrit, peint, met en scène, polémique, cultive la solidarité, rit de ses tics, nous provoque adorablement et aime à se mélanger.

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