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 » J’ai évité la privatisation aux fonctionnaires « 

Pierre Havaux
Pierre Havaux Journaliste au Vif

Réduits pour la première fois à moins de 70 000, les fonctionnaires fédéraux croulent sous le travail autant que leurs collègues du privé. Ils peuvent dire  » merci  » à Hendrik Bogaert (CD&V) : le secrétaire d’Etat à la Fonction publique prétend les sauver du spectre de la privatisation.

Le Vif/L’Express :  » Faire plus avec moins  » : le leitmotiv que vous imposez aux fonctionnaires fédéraux depuis deux ans atteint-il ses limites ?

Hendrik Bogaert : La réforme de la Fonction publique fédérale, la plus importante menée depuis dix ans, est derrière nous. Trente projets approuvés par le gouvernement ont été publiés au Moniteur. Mission accomplie. Pour la première fois, les administrations fédérales comptent moins de 70 000 agents, sécurité sociale comprise.

Fallait-il vraiment en arriver là ?

Ne pas agir de cette manière, c’était ouvrir la porte à la privatisation. Je claque la porte à la privatisation en modernisant le secteur public. Pour prendre un exemple concret : je suis opposé à la privatisation du transport de marchandises par rail, parce qu’elle pourrait signifier la vente de cette activité de la SNCB aux Allemands. Ceux-ci prendraient ainsi le contrôle sur le port d’Anvers, alors qu’ils l’ont déjà sur les ports de Brême, Hambourg, Rotterdam. Cette situation de monopole leur permettrait d’augmenter les tarifs, ce qui coûterait cher à notre économie. Pour sauvegarder la compétitivité du pays, il est essentiel de conserver cette branche de l’activité ferroviaire dans le giron public plutôt que de la vendre à l’étranger. Privatiser n’est pas toujours la bonne solution. La sécurité sociale occupe 12 000 fonctionnaires pour un budget de 80 milliards d’euros. Une sécu privatisée exigerait certainement beaucoup plus de personnel.

Maigre consolation pour les fonctionnaires qui ont trinqué…

La Fonction publique fédérale travaille aujourd’hui avec 4 425 équivalents temps plein en moins par rapport à juin 2011. Les efforts accomplis ont donc été considérables. Mais le gouvernement a modernisé de façon sociale : il a diminué le nombre de remplacements plutôt que de licencier. Quatre fonctionnaires sur cinq n’ont pas été remplacés. Mais réduire le personnel n’est pas un objectif en soi.

Les fonctionnaires n’ont plus à rougir des performances des travailleurs du privé ?

Leur charge de travail devient comparable à celle du secteur privé.

Réduire davantage les effectifs aurait-il encore un sens ?

Il y a certainement encore moyen de descendre sous la barre actuelle, notamment par les processus de digitalisation. Il faut s’inspirer du modèle suédois : dans ce pays plutôt progressiste, le secteur public s’aligne chaque année sur le gain de productivité du secteur privé.

Faut-il privatiser Belgacom ou bPost, comme le veulent les libéraux flamands ?

Ce serait la solution de facilité. Obtenir des recettes pour éviter d’économiser : cela s’est déjà fait par le passé. Vendre ces entreprises à l’étranger ne serait pas non plus une bonne affaire. Je ne vois aucune raison de vendre, pour peu qu’on organise un management moderne de ces entreprises.

Les sagas Bellens et Thijs à la tête de Belgacom et de bPost ne montrent-elles pas que faire cohabiter les logiques du public et du privé est intenable au sein de telles entreprises ?

Je ne vois pas où est le problème de fond. Ces entreprises publiques ont été plutôt bien gérées. Travailler pour l’intérêt commun suppose une certaine modération dans les rémunérations des dirigeants. Quand on est à la tête des entreprises publiques, on ne peut pas toujours exiger ce qu’on pourrait gagner dans le privé. D’autant que par rapport à l’étranger, on paie bien.

L’intégralité de l’entretien dans Le Vif/L’Express de cette semaine

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