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Il y a 50 ans naissait la frontière linguistique

Le Vif

Il y aura cinquante ans dimanche qu’entrait en vigueur la loi fixant la frontière linguistique votée quelques mois plus tôt et en vertu de laquelle 110.000 Belges vivant dans 49 communes ont changé de région. Dans les Fourons, des festivités organisées par le gouvernement flamand sont prévues mais elles seront boycottées par les mandataires francophones.

En 1962, le gouvernement Lefèvre-Spaak (social-chrétien et socialiste), qui dispose d’une très large majorité au parlement, décide le « clichage de la frontière linguistique », préalable à une révision de la Constitution créant des ensembles linguistiques figés avec pour objectif d’assurer la paix communautaire.

Il s’agissait d’appliquer les transferts suggérés, de 1948 à 1958, par le « centre Harmel », du nom du ministre Pierre Harmel (PSC). Le projet du ministre de l’Intérieur, Arthur Gilson (PSC), prévoit notamment le transfert de Mouscron-Comines à la province du Hainaut et, en compensation, celui des Fourons au Limbourg.

Après une bataille parlementaire – et une marche flamande sur Bruxelles – la Chambre rejette le 31 octobre un amendement maintenant Fourons au sein de la province de Liège, par 122 voix contre 72. Vingt députés wallons seulement, moins d’un tiers, votent le projet…

La loi, publiée le 8 novembre 1962, entre en vigueur le 1er septembre 1963 et fixe définitivement la frontière linguistique. Le Hainaut obtient ainsi 70.070 habitants de Flandre occidentale (des communes de Mouscron, Comines, Houthem, Bas-Warneton, Warneton, Ploegsteert, Luingne, Herseaux, Dottignies) et 2.374 de Flandre orientale (Orroir, Amougies, Russeignies). Il cède 1.914 personnes à la Flandre orientale (Everbeek) et 2.886 au Brabant flamand (Biévenne,St-Pierre-Cappelle).

La province de Liège accueille 6.830 Limbourgeois (Corswarem, Otrange, Lanaye, Eben-Emael, Wonck, Bassenge, Roclenge-sur-Geer) mais cède 4.299 Fouronnais (Mouland, Fouron-le-Comte, Fouron-St-Martin, Fouron-St-Pierre, Teuven, Remersdael). Liège donne en outre 14.164 habitants au Brabant flamand (Landen, Attenhoven, Eliksem, Laar, Neerhespen, Neerlanden, Neerwinden, Overhespen, Overwinden, Rumpsdorp, Wamont, Walsbets, Houtain-l’Évêque, Wange et Wezeren).

Le Brabant wallon obtient 7.165 Brabançons flamands (Bierghes, Saintes, L’Écluse, Zétrud-Lumay, Opheylissem et Neerheylissem). Si dans la plupart des cas les transferts se sont relativement bien déroulés, il n’en a pas été de même à Fourons, dont les habitants parlent généralement le « platdütsch », un dialecte « multiforme » qualifié par les philologues de « rhéno-mosan » et qui est devenu abcès de fixation communautaire durant des années.

C’est notamment à l’instigation du Fouronnais José Happart, à la fin des années ’70 lorsque celui-ci est devenu le chantre de la cause des Fourons et en particulier du retour de la commune, composée de six hameaux, fusionnés en 1977, dans le giron liégeois. Affublé du surnom de « hérisson », il est devenu de la sorte la bête noire du monde politique flamand.

En 1983, José Happart devient bourgmestre de la localité avec 63% des voix, contre 37% à celle de son rival Huub Broers, alors CVP (puis CD&V). Mais le refus de M. Happart de parler le néerlandais, provoque un imbroglio juridique sans précédent plus connu sous le nom de « carrousel fouronnais ».

Il est à l’origine de plusieurs crises gouvernementales, jusqu’à ce que M. Happart soit élu au parlement wallon en 1999 et quitte les Fourons pour Liège à la satisfaction de son rival, Huub Broers.

La liste de ce dernier – passé entre-temps à la N-VA pour le compte de laquelle il est devenu sénateur coopté en 2010 -, Voerbelang, a maintenu lors du dernier scrutin communal sa majorité absolue à Fourons. Elle a même creusé davantage l’écart avec le parti Retour@Libertés de José Smeets, obtenant un siège supplémentaire (dix en tout).

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