Une mauvaise connexion Wi-Fi à la maison? Le coupable n’est pas forcément votre fournisseur Internet. © Getty Images/iStockphoto

Votre Wi-Fi est pourri? Pourquoi ce n’est pas (seulement) la faute de votre fournisseur

Thomas Bernard
Thomas Bernard Journaliste et éditeur multimédia au Vif

Une connexion Internet instable et lente, ce n’est pas forcément la faute du fournisseur. Notamment lorsque le Wi-Fi est utilisé, avec toutes les contrariétés techniques qui peuvent venir perturber ce signal qui voyage par ondes. Etat des lieux de ce qui fait perdre le fil au sans fil.

Les câbles ont disparu, pourtant le réseau Internet trébuche encore, se prenant les pieds dans l’aménagement de nombreux foyers. Faire le constat d’un faible signal Wi-Fi et d’une mauvaise connectivité Internet sera fréquent pour les uns, plus rare mais tout aussi agaçant pour les autres. Avec souvent un même coupable tout désigné: son fournisseur Internet.

«Celui-ci peut-il y faire quelque chose ? Indéniablement. Mais dire que ce fournisseur est l’unique fautif, ce serait exagéré. Cette fausse croyance a pourtant la vie dure chez de nombreuses personnes. Sans doute est-ce dû à l’insistance avec laquelle les fournisseurs vantent leur vitesse Internet…», pointe notamment Testachats.

En effet, les quatre grands opérateurs, Proximus, Orange, Telenet et Digi, promettent fréquemment la lune, à grands coups de superlatifs: l’Internet «ultra-stable», le «plus rapide de votre région», accessible «tout le temps»… Le déploiement actuel de la fibre, qui offre des vitesses de connexion bien plus importantes, a encore renforcé ce combat commercial autour de l’Internet «ultra-rapide».

Les pannes, plutôt l’exception

Une forme de surenchère qui ne fait probablement qu’accentuer le phénomène d’incompréhension du client final, qui constate au quotidien que son Internet déraille malgré une vitesse et une stabilité vantées tant et plus. Chaque fournisseur travaille effectivement à offrir la meilleure connectivité possible. Mais, souvent, ce n’est qu’une fois le câble parvenu au sein de l’habitation que les vrais défis commencent, notamment lorsque la connexion sans fil fait office de sentence finale.

Si la qualité du Wi-Fi engendre des plaintes, les raisons peuvent en réalité être multiples. Outre un véritable problème temporaire d’acheminement d’Internet jusqu’au foyer (au second semestre 2024, Telenet affichait le plus mauvais taux de panne du panel analysé par l’IBPT, régulateur du secteur, avec 6,6% des lignes ayant subi un problème, contre 3,7% chez Proximus), les causes d’une mauvaise connectivité vont plutôt dépendre du matériel domestique ou de facteurs externes.

Le modem parfois vieillissant

Les débits théoriques, soit la vitesse de transmission des informations, annoncés par les opérateurs sont ceux pour l’Internet transporté avant que le modem-routeur ne prenne le relais à l’intérieur de l’habitation. Ce boîtier (soit tout-en-un, soit double avec des fonctions séparées modem et routeur) est ensuite chargé de convertir le flux reçu afin de fournir une connectivité Internet domestique. La vitesse finale dépendra donc directement du flux reçu puis de ce que le modem est capable de fournir comme débit à chaque appareil qui le sollicite. Le débit théorique maximal mis en avant n’est donc pas toujours atteignable dans la réalité d’une utilisation quotidienne.

La majorité des opérateurs fournissent le modem, mais le renouvellement de celui-ci n’est pas aussi fréquent que les nouveautés techniques qui déferlent constamment. Ainsi, il est possible d’avoir encore un «vieil» appareil, bien loin des standards actuels et des dernières technologies. Seuls les nouveaux clients bénéficient en général des nouveaux modems proposés par les opérateurs, embarquant les dernières normes Wi-Fi, à moins d’avoir fait la demande pour changer de modem afin d’en obtenir un plus récent et rapide (service facturé selon les cas).

C’est notamment pour pallier ce problème, tout en facilitant le changement d’opérateur, que l’IBPT a imposé le libre choix du modem, il y a un an. Concrètement, un client peut ainsi se passer de l’appareil fourni par son opérateur pour utiliser celui de son choix. Une possibilité qui doit encore faire son chemin. Orange précise qu’environ 200 clients utilisent leur propre matériel. Proximus n’a pas de données exhaustives, mais signale que pour ses clients à la fibre, moins d’une vingtaine par mois font le choix d’un modem personnel.

Au début de l’année, seuls quelques dizaines de modems libres étaient recensés par l’IBPT, qui ne dispose pas encore de données actualisées pour l’ensemble des opérateurs. Selon son analyse, le régulateur reconnaît que les obstacles à la démocratisation des modems libres restent potentiellement nombreux. «Il n’y a pas (encore) d’avantage financier pour l’utilisateur final, car aucun abonnement spécifique et moins cher n’est proposé sans modem de l’opérateur. Le support technique fourni par les opérateurs est limité et ceux-ci ne font pas non plus activement la promotion de cette possibilité. Les avantages d’avoir son propre modem ne sont pas toujours clairs pour l’utilisateur final. Et enfin, de nombreux clients ne sont pas au fait de l’existence de cette possibilité et ne sont probablement pas demandeurs», énumère l’institut, sur base d’une réponse fournie à une question parlementaire similaire le mois dernier.

Les limites intrinsèques du Wi-Fi

Changer de modem peut venir booster la qualité d’une connexion. Mais la suite dépendra de la configuration de l’utilisateur. S’il est possible d’utiliser un câble entre le modem et un appareil comme un ordinateur, afin d’assurer la fiabilité et la vitesse de la connexion, ce n’est pas le cas pour un smartphone, qui utilisera donc le Wi-Fi. Cette technologie sans fil, permettant de transporter le réseau Internet par onde radio, doit ici affronter ses propres limitations. Celles-ci ont été repoussées à chaque évolution technologique, améliorant les débits et les capacités.

Aujourd’hui, le Wi-Fi se décline autour de trois fréquences: 2,4 GHz, 5 GHz et 6 GHz. Pour faire simple, la première, plus ancienne, offre la meilleure portée mais la vitesse la plus lente, tandis que le 6 GHz permet d’atteindre des débits très rapides, mais demande de rester au plus proche du modem pour en profiter. Chaque norme Wi-Fi a également permis de revoir à la hausse le nombre d’appareils supportés en même temps.

Une grande habitation, avec un modem placé par exemple au garage, loin des utilisateurs, dégradera forcément la stabilité de l’ensemble. Dans les kots étudiants, où la connexion se partage parfois entre de multiples personnes et appareils, le réseau peut tout simplement saturer. C’est aussi un risque au sein d’un foyer classique, où le nombre d’appareils utilisant le Wi-Fi ne cesse de se multiplier. Smartphones, tablettes et ordinateurs pour accéder à Internet évidemment, mais aussi désormais les nombreux objets connectés: serrure, aspirateur-robot, caméra, thermostat, téléviseur connecté… Autant de produits qui viennent s’agglutiner et saturer petit à petit le Wi-Fi. Les dernières normes permettent de pallier une partie des problèmes, pourvu que l’on dispose d’appareils compatibles (smartphone utilisant les dernières normes Wi-Fi par exemple).

Obstacles, canaux et solutions

Enfin, la portée du Wi-Fi dépend, certes, de la norme et de la fréquence employées, mais aussi directement de son environnement. Chaque mur ou obstacle perturbera d’autant le signal transmis, l’affaiblissant progressivement. Tout comme les interférences créées par d’autres appareils électroniques, voire le Wi-Fi du voisin.

Choisir un emplacement central pour le modem, loin de tout élément pouvant perturber le signal, afin de diffuser le réseau sans fil correctement dans une habitation, reste la première mesure à prendre, rappelle l’IBPT. Il faut s’assurer aussi de l’absence d’obstacles directs (ne pas enfermer le boîtier dans un meuble) afin de permettre aux ondes de voyager librement. Si le modem dispose d’antennes, mieux vaut les orienter dans différentes directions également, et tester une éventuelle amélioration en les bougeant autrement.

A savoir également, le Wi-Fi voyage via plusieurs canaux. La bande 2,4 GHz par exemple se compose de treize canaux différents. Privilégier un canal qui présente moins de dérangement au sein de cette bande de fréquence peut permettre d’améliorer la stabilité d’une connexion sans fil. Chaque fournisseur détaille sur son site comment changer le canal de fréquence sur son modem.

Les opérateurs Internet ont d’ailleurs bien compris que le Wi-Fi restait la pierre d’achoppement d’un service de qualité. C’est via ce canal que le client jugera s’il dispose d’une «bonne connexion». Conscients des problématiques que rencontrent de nombreux utilisateurs, les sites Web des fournisseurs regorgent de pages d’aide et de conseils (Telenet, Proximus, Orange, Voo, Scarlet).

Plusieurs mettent aussi en vente directement des appareils permettant d’améliorer la couverture sans fil lorsque celle-ci s’avère insuffisante. La solution la plus courante est le répéteur Wi-Fi, appareil qui étend simplement la connexion en venant se placer entre la zone de couverture du modem et une zone non couverte. D’autres existent, comme le CPL (des boîtiers qui transportent Internet via de simples prises de courant) ou encore le mesh, qui crée un véritable maillage Wi-Fi au sein de l’habitation.

Des solutions de secours bienvenues, même si dans des foyers toujours plus connectés, où chaque objet réclame sa part de bande passante, le Wi-Fi n’a sans doute pas fini de donner du fil à retordre…

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