Des frelons asiatiques, espèce invasive, peuvent encore être aperçus en cette saison automnale. Et ce n’est pas anormal, assure l’entomologiste Philippe Wegnez. En revanche, contrairement à une idée reçue, détruire leur nid aussi tard dans l’année n’a pas beaucoup de sens, selon lui.
«Nous sommes presque en novembre, comment se fait-il qu’il y ait encore des frelons asiatiques à cette époque de l’année?», s’interroge Cassandra, une habitante de la région liégeoise, après en avoir découvert un sur sa terrasse. De fait, dans certaines zones fortement fréquentées cette année par Vespa velutina, de son petit nom scientifique, il n’est pas rare d’encore en observer, alors que la saison estivale semble déjà lointaine.
En région liégeoise toujours, la commune de Saint-Nicolas diffusait récemment une communication à destination de sa population, invitée à adopter les bons réflexes si elle rencontre des frelons asiatiques. «Une vingtaine de nids ont déjà été neutralisés, et d’autres pourraient apparaître avec la chute des feuilles», précisait la commune, où de nombreux habitants ont signalé la présence de frelons asiatiques.
Faut-il s’inquiéter d’encore voir circuler ces insectes aussi tard dans l’année? En aucun cas, assure Philippe Wegnez, le président du Cercle des entomologistes liégeois. «Tant qu’il ne gèle pas, les frelons asiatiques restent actifs, tandis que les frelons européens cessent leurs activités aux alentours du 15 octobre, c’est-à-dire en ce moment.»
A vrai dire, pour autant que les températures restent positives, les frelons asiatiques peuvent rester en activité jusqu’à l’approche de l’hiver. «Même jusqu’en janvier, éventuellement», poursuit Philippe Wegnez. Cette longévité n’est pas propre à ces frelons, «c’est aussi le cas de certaines guêpes, comme la guêpe commune ou la guêpe germanique.»
«En cette saison, les frelons asiatiques, qui sont des pollinisateurs, vont beaucoup sur le lierre par exemple. Il n’y a plus beaucoup d’insectes et hormis les abeilles qui restent en masse, il ne leur reste pas grand-chose pour nourrir leur colonie, alors qu’ils ont besoin de viande. C’est pourquoi ils recherchent des éléments sucrés pour leur survie», détaille encore l’entomologiste.
La chute des feuilles, au surplus, peut rendre les nids plus visibles à l’automne. Ce n’est pas une raison valable pour opter directement pour leur destruction, estime Philippe Wegnez. En effet, «ça n’a pas beaucoup de sens. Les larves qui sont actuellement au nid ne sont pas suffisamment nourries pour engendrer des reines capables de passer l’hiver, car leurs réserves ne seront pas suffisantes.» En d’autres termes, les reines qui vont passer l’hiver et peut-être fonder une nouvelle colonie l’année prochaine ont, pour la plupart, déjà quitté leur nid.
«Celles qui restent au nid, en fin d’année, ne feront pas de vol nuptial et ne seront pas fécondées. Détruire un nid qui ne va de toute façon rien engendrer l’année prochaine, je ne le préconise pas. Quant aux reines, même si elles sont nombreuses, je tiens à signaler qu’il y a une compétition entre elles, qui fait que beaucoup mourront en cas de surnombre», explique-t-il encore.
Philippe Wegnez, en outre, est un entomologiste un peu sceptique face à une certaine peur ambiante du frelon asiatique. L’espèce est invasive, certes, «mais elle nuit surtout aux apiculteurs. C’est un problème essentiellement économique pour eux», considère-t-il, estimant que des destructions trop massives peuvent aussi causer du tort. «Avec les pièges non sélectifs par exemple, on flingue aussi de nombreuses guêpes, frelons européens, mouches et autres papillons», illustre-t-il, rappelant au passage que les piqûres de frelons asiatiques sont bénignes la plupart du temps.