Roos Vanotterdijk étudie la psychologie, et ça lui est bien utile pour briller dans les bassins de natation. © Getty Images

Roos Vanotterdijk, double médaillée belge des Mondiaux de natation: sa vraie force, ce sont ses cours de psycho

Roos Vanotterdijk est la première nageuse belge à remporter plus d’une médaille dans les mêmes championnats du monde. Elle n’a que 20 ans, et sa façon de voir le sport est déjà une source d’inspiration.

Roos Vanotterdijk n’aime pas parler trop longuement de ses mauvaises expériences. Par exemple, elle n’a que peu de mots pour évoquer sa relation avec son ancien entraîneur Fred Vergnoux, qui l’avait poussée beaucoup trop loin dans ses retranchements physiques et mentaux. La nageuse de 20 ans préfère parler de sa passion pour la natation. De la façon dont, dans l’eau, son esprit s’apaise complètement et qu’elle peut tout oublier. De la façon dont son rêve d’une carrière de nageuse de haut niveau a mûri lorsqu’elle a quitté le Limbourg pour Anvers, alors qu’elle était encore adolescente, afin d’intégrer l’école de sport de haut niveau.

Sa patience est remarquable. Les adolescents et les jeunes adultes dans la vingtaine veulent souvent tout, tout de suite. Avec son immense talent, on pourrait s’attendre à ce que Roos Vanotterdijk souhaite remporter des médailles dans les grandes compétitions le plus tôt possible. Elle a toutefois souligné qu’elle avait tout le temps devant elle. Surtout à 20 ans. Et surtout dans un sport où même les trentenaires peuvent encore connaître le succès aujourd’hui.

Remporter une médaille aux Championnats du monde à Singapour, ou dans trois ans aux Jeux olympiques de Los Angeles, ou même se qualifier pour une finale: cela ne la préoccupait pas. Avant de se rendre en Asie pour y disputer les Mondiaux, elle n’avait même pas consulté le classement des meilleurs temps de l’année. «Je me concentre sur mes temps, sur ce que je peux améliorer. Que je termine sixième, huitième, dixième ou même cinquantième, cela n’a pas d’importance. Tant que j’ai donné le meilleur de moi-même», expliquait-elle alors.

Entre-temps, la Limbourgeoise essaie de profiter autant que possible du processus la menant à un objectif, sans se laisser gagner par le stress. «Cela rend les choses plus agréables. Si vous ne vous concentrez que sur cette minute où vous devez performer et où tant de choses peuvent mal tourner, vous serez plus vite épuisée

C’est pourquoi Vanotterdijk n’était pas du tout stressée lorsqu’elle a participé à ses premiers Jeux Olympiques à Paris l’année dernière, à seulement 19 ans, et qu’elle a atteint deux fois les demi-finales. Elle avait l’esprit libre, car elle ne s’était imposée aucune attente. «Je n’avais rien à prouver, je devais simplement faire ce que j’avais déjà fait des milliers de fois à l’entraînement. Tout ce que j’accomplirais serait bien.»

«Mon rêve, celui de personne d’autre»

Roos Vanotterdijk a encore plus surpris hors du bassin, lorsqu’elle a déclaré qu’une médaille ne disait rien sur qui elle était en tant que personne: «C’est un moment fort, mais la vie et une carrière sont bien plus que cela. Je suis avant tout un être humain, puis une athlète de haut niveau.» Le tout en rapportant à la Belgique sa première médaille d’envergure mondiale dans le grand bassin depuis celle de Pieter Timmers aux Jeux olympiques de Rio, en 2016.

Elle a acquis cette vision des choses en travaillant avec une psychologue depuis l’âge de quinze ans. Cette curiosité pour la psyché humaine l’a également poussée à entreprendre des études de psychologie. C’est ainsi qu’elle entretient sa vivacité d’esprit en dehors de la piscine. C’est aussi pourquoi elle peut se perdre pendant des heures dans des romans en anglais, afin de se détacher complètement de la natation. Dans un monde sportif de haut niveau obsédé par les résultats, son approche est un exemple pour tous les athlètes, jeunes ou moins jeunes. Vanotterdijk ne nage pas pour le monde extérieur, mais pour elle-même: «C’est mon rêve, celui de personne d’autre.»

Pogacar, Scheffler et l’art de relativiser

Sa façon d’aborder la vie correspond étonnamment bien à la mentalité de deux champions mondiaux qui ont fait parler d’eux ces dernières semaines: Tadej Pogacar, vainqueur du Tour de France, et Scottie Scheffler, numéro un mondial de golf, qui a remporté le British Open.

Scheffler avait déjà surpris le monde entier en déclarant dans une interview que le golf n’arrivait qu’en troisième position dans ses priorités, après sa famille et sa foi: «Le golf ne définit pas qui je suis. S’il devait nuire à ma vie de famille, ce serait la dernière chose que je ferais. Je préfère être un bon père plutôt qu’un bon golfeur.»

Cela ne signifie pas, a souligné Scheffler, qu’il n’est pas passionné par son sport. «J’adore pouvoir jouer à ce jeu pour gagner ma vie. C’est l’une des plus grandes joies de ma vie. Mais cela comble-t-il les désirs et les aspirations les plus profonds de mon cœur? Absolument pas.»

Pendant le Tour de France, les déclarations de Scheffler ont été présentées à Tadej Pogacar. Le Slovène a acquiescé: «Il faut profiter du moment présent et des petites choses, pas seulement des victoires.»

Performer en restant soi-même

Cette mentalité lui permet de tenir bon sous la pression et l’attention étouffantes. Une pression qui, comme l’ont montré les derniers jours du Tour, peut même commencer à peser sur l’insouciant Pogacar. Il aspirait à trouver la paix à Monaco, à prendre un café au soleil. A un moment où il pourrait à nouveau être lui-même auprès de sa petite amie, et rétablir l’équilibre entre le grand vainqueur sur son vélo et l’homme Tadej.

L’approche de Pogacar, Scheffler et Vanotterdijk —chacun à son niveau— montre que le sport de haut niveau ne consiste pas à tout sacrifier pour obtenir des résultats. Il s’agit avant tout de passion et de dévouement, qui sont indispensables. Mais les performances, bonnes ou mauvaises, ne doivent pas déterminer votre identité et votre estime de soi en tant qu’être humain.

C’est précisément en ne recherchant pas désespérément le succès, en ne cherchant pas à obtenir la validation des autres et en restant soi-même qu’un athlète sera plus performant. Ce n’est pas un hasard si Vanotterdijk est une «bête de compétition», qui s’épanouit sur les plus grandes scènes, même sous les projecteurs les plus intenses d’un championnat du monde ou des Jeux olympiques.

Pour elle, cependant, la véritable victoire n’est pas un trophée. C’est savoir que, lorsque les projecteurs s’éteignent, vous êtes toujours fier de la personne que vous êtes. Et que cela est plus important que ce que vous avez accompli. Roos Vanotterdijk en est consciente dès l’âge de 20 ans. Plus que sa technique et ses capacités physiques, ou même une médaille aux Championnats du monde, c’est ce qui la rend si spéciale.

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