
Poulet de chœur
Repéré lors d’une soirée de guindaille, Simon Piette est devenu baryton dans un Chœur de chants wallons. Ce qui ne l’empêche pas d’imposer son rythme de milieu def’ à la P2C liégeoise.
Simon Piette en est persuadé: chorale et foot partagent de nombreux points communs. Déjà, le moment de l’effort précède toujours celui des retrouvailles au bar autour d’un verre. Puis, tout membre du noyau se fait rappeler à l’ordre dès qu’il loupe plusieurs rendez-vous d’affilée. Ça tombe bien: le jeune trentenaire est quelqu’un d’assidu, toujours présent même quand il est blessé ou en méforme, et qui apprécie la rigueur et la discipline. Simon Piette est à la fois milieu défensif à l’Alliance des Hautes Fagnes et baryton au sein du chœur d’hommes La Royale Malmédienne. Deux occupations qui l’obligent régulièrement à jongler avec son agenda. « Si c’est un petit concert dans un village, je privilégierai à chaque fois le match », sourit l’intéressé, installé dans ses bureaux de directeur administratif de la zone 5 des pompiers de Belgique. « Au carnaval, en revanche, c’est clair que je vais chanter. Idem dans quelques semaines, quand on se rendra à Florence où l’on est invité par un chœur italien. » Gamin, pourtant, il n’y en avait que pour le foot. Après des débuts à Waimes, Simon transite par Amblève où il dispute à seize ans son premier match en équipe première le lendemain de son bal rhéto. Encore un compromis. « Je suis resté là presque dix saisons en P2, dont la moitié où l’on a terminé deuxième. On nous surnommait les Poulidor. »
Si c’est un petit concert dans un village, je privilégierai à chaque fois le match. » Simon Piette
Dans les Cantons de l’Est, Simon améliore chaque année sa connaissance du folklore et des chants locaux grâce aux buvettes… et au carnaval. Un soir de mars 2014, alors qu’il assiste à celui de Malmédy, des amis le poussent à rejoindre le groupe de covers qu’ils observent sur scène. L’alcool aidant, le jeune homme s’exécute, sous l’œil déjà fatigué des gars de la Malmédienne, qui s’attendent à voir débarquer un nouveau petit comique qui va se dégonfler face au micro. « J’ai chanté Pas de boogie woogie d’Eddy Mitchell, que je connais par cœur », reprend le petit comique. « Il n’y avait pas plus de 200 personnes à cet endroit-là, mais j’ai fini par les faire toutes taper dans les mains. Dans la foulée, le président du Chœur m’a proposé de les rejoindre. » Ça fait désormais huit ans que le Malmédien répète tous les mercredis avec ce groupe de 80 choristes exclusivement masculins dirigés par une cheffe. « On chante de la variété française – on prépare notamment un medley de Stromae – mais aussi des chansons wallonnes parce que le Chœur attache beaucoup d’importance à la défense de la culture locale. » Avec son frère, le gaillard interprète également chaque année les “rôles”, ces saynètes en wallon qui se moquent gentiment des politiques et des citoyens locaux. Un spectacle organisé pendant la trêve footballistique, évidemment.
Parce que son assiduité derrière le pupitre est aussi forte que sur les prés, lui qui fait l’ascenseur entre P1 et P2 avec Malmédy et aujourd’hui Hautes Fagnes, où il joue, à côté du Signal de Botrange, sur l’un des terrains les plus hauts de Belgique. « On s’entraîne avec dix centimètres de neige et c’est généralement chez nous que les matchs sont d’abord remis. » Pour le moment, la réputation de mélomane de ce joueur « un peu bourrin, mais avec un gros volume de jeu » reste assez discrète. À travers la P2C, on l’appelle plutôt Poulet, un surnom acquis à la suite d’un entraînement sans chasuble où il avait dû exhiber son torse d’un blanc de volaille. Qu’à cela ne tienne, le baryton n’hésite jamais à déployer sa voix lors des troisièmes mi-temps. « Mi-août, on a affronté le club de Rocherath, qui vient toujours avec son petit kop. À la fin du match, j’ai pris leur tambour et j’ai fait sauter les deux équipes en lançant un chant en allemand. » Kein boogie woogie?
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