Marzieh Hamidi
Marzieh Hamidi à l’entraînement de taekwondo en France en 2023, après avoir fui l’Afghanistan. © Getty images

Le combat de Marzieh Hamidi pour les femmes en Afghanistan

Gérald Papy
Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

La championne de taekwondo raconte son parcours de Kaboul à Paris où les talibans continuent de la poursuivre de leurs menaces. Un cri d’alarme pour la liberté.

Le drame de la condition des femmes en Afghanistan est passé à l’arrière-plan de l’actualité, monopolisée par les guerres. La championne de taekwondo Marzieh Hamidi le remet en lumière à travers son récit poignant, bien résumé par le titre Ils n’auront pas mon silence (1). Née en Iran de parents afghans persanophones ayant fui une première fois les talibans, Marzieh Hamidi est renvoyée en Afghanistan avec une partie de sa famille après une tentative ratée d’exode de la République islamique iranienne. En août 2021, quand les étudiants en religion reviennent au pouvoir à Kaboul, elle fuit à nouveau, mais seule, après avoir participé à une manifestation pour les droits des femmes. Dans les sociétés machistes d’Iran et encore plus d’Afghanistan, la pratique du sport «a ouvert [à l’autrice] une porte que la vie quotidienne s’entêtait à [lui] fermer».

Le retour des talibans à Kaboul signe, elle le sait, la fin de l’exercice de sa passion. Mais sa notoriété naissante a attiré les regards sur elle et Marzieh Hamidi parvient, grâce notamment à l’aide de deux journalistes de Elle France, à quitter l’Afghanistan. Accueillie à Vincennes à l’est de Paris, elle n’en a pas pour autant fini avec son passé. L’exil lui pèse, parce que sa famille (qui se réfugiera au Pakistan puis en Allemagne) subit les répercussions négatives de sa fuite et parce qu’en France, «on lui fait trop sentir qu’elle doit mériter ce qu’on lui donne». Surtout, les talibans ne l’ont pas oubliée. Outrée par leur décision en août 2024 d’interdire que les femmes s’expriment en public, elle lâche dans une interview tout son dégoût de l’apartheid de genre qui est ainsi instauré en Afghanistan. Cela lui vaut des menaces de mort et de viol, des intimidations. Son adresse est révélée; elle doit déménager, se cacher et mettre de côté sa pratique du sport; elle finit par bénéficier d’une protection policière.

«J’ai traversé trop de frontières pour en reconstruire une dans ma propre chair.»

«Les talibans me traquent parce que je parle, parce que je cogne, parce que je refuse de disparaître, écrit-elle. Je ne leur offrirai pas la satisfaction de renoncer à cette part de moi, celle qui trouve la beauté d’une femme époustouflante, celle qui s’émerveille encore des bras d’un homme sincère. J’ai traversé trop de frontières pour en reconstruire une dans ma propre chair.» Le cri de Marzieh Hamidi est celui de la liberté.

(1) Ils n’auront pas mon silence. Menacée de mort par les talibans jusqu’en France, je défendrai toujours ma liberté et celle des femmes, par Marzieh Hamidi, avec Baptiste Bérard-Proust, Robert Laffont, 162 p.
© DR
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