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Pépite de la semaine: Boubacar Kamara, le minot a bien grandi

Tout au long de sa formation olympienne, Boubacar Kamara a rêvé de fouler la pelouse du Vélodrome. Aujourd’hui titulaire indiscutable du onze d’André Villas Boas, le défenseur peut rêver plus grand.

Grâce à une tête plongeante au petit rectangle pour prolonger une déviation de Valère Germain au fond des filets, Boubacar Kamara offre la victoire à Marseille face à Bordeaux, 1-0. L’explosion de joie est belle, malgré un stade vide. L’OM joue ce match à huis clos suite à un jet de pétard survenu quelques semaines plus tôt à Lille. C’est pourtant le plus beau souvenir de la jeune carrière de Kamara. À 19 ans, le minot vient d’inscrire son premier but pour son club de toujours.

Celui que l’on surnomme Bouba débarque à l’Olympique de Marseille à l’âge de cinq ans pour ne plus jamais quitter le club. Le défenseur connaît chaque centimètre des terrains de la Commanderie, tant il a arpenté les couloirs du centre de formation du club de son coeur. « Mon premier maillot était un maillot de l’OM époque Didier Drogba avec le sponsor 9 Telecom », avait d’ailleurs avoué Kamara dans une interview réalisée par la Ligue 1.

« J’ai vu qu’il avait les qualités pour y arriver mais à cet âge-là, tu dois être guidé. »

Sa trajectoire lui fera finalement porter le brassard de capitaine des U19 avec qui il atteint la finale de la Coupe Gambardella lors d’une saison 2016/2017 où il s’entraîne déjà régulièrement avec le noyau professionnel. Le garçon touche son rêve du bout des doigts, mais cette finale sera un échec. L’OM s’incline aux tirs au but face à Montpellier. Cette saison ne se dessinera cependant pas seulement sous les traits de la déception. Kamara portera face à Sochaux en Coupe de France le maillot olympien pour la première fois.

Titulaire d’un bac pro commerce, il tente de se faire une place, sans jamais rien demander, toujours en travaillant. Rudi Garcia, son entraîneur de l’époque, croyait énormément en lui et a tout fait pour garder l’humilité du gamin. Avec Maxime Lopez, Kamara devait aller se changer dans les vestiaires des jeunes avant les entraînements. Pas de place réservée dans le vestiaire des pros, comme un rappel du chemin encore à accomplir. Avec six matchs en Europa League, six matchs de Ligue 1 et deux montées au jeu en Coupe de France, il commence à faire son trou la saison suivante et en impressionne plus d’un dans le vestiaire.

« Je me souviens, je m’étais dit: ‘le jeune il est pas mal’ , et on m’avait répondu: ‘il n’a que 15 ans’. J’ai commencé à parler avec lui et sa façon de travailler, d’écouter et de toujours rester calme même quand il est sous pression, ça m’a fait penser à moi quand j’étais jeune. J’ai vu qu’il avait les qualités pour y arriver, mais à cet âge-là tu dois être guidé. Il a été à l’écoute et il a travaillé pour y arriver. Je suis content pour mon petit. », retraçait Rolando dans un documentaire sur la chaîne YouTube du club phocéen.

Bouba, chasseur de Canari
Bouba, chasseur de Canari© BELGA/AFP

Du calme, Boubacar Kamara en a à revendre sur un terrain, mais cette caractéristique n’est qu’une partie de la large palette du défenseur. Doté d’un bon sens de l’anticipation et sec sur l’homme, il fait partie de cette caste de défenseurs difficiles à passer. Avec une excellente relance et une grande précision, inhabituelle pour un défenseur, il n’hésite pas à renverser le jeu par des transversales bien senties. Pour parfaire son jeu, le minot s’inspire de Kalidou Koulibaly et Virgil van Dijk, les plus grandes références à son poste selon lui.

Défenseur central de formation, Rudi Garcia voit pourtant en lui le futur du milieu de terrain marseillais. Pas étonnant au vu des qualités et de la polyvalence du garçon. Lors de la saison 2018/2019, il deviendra tout de même un titulaire indiscutable en défense centrale, au côté d’un autre milieu de terrain, Luiz Gustavo, suite à de gros manquements à ce poste dans l’effectif phocéen.

Plongé dans le grand bain à seulement 18 ans, dans le club de son coeur où les supporters sont parmi les plus exigeants du monde, Kamara reste calme et ne ressent pas la pression comme il le déclare à l’AFP: « C’est un honneur, toute famille originaire de Marseille aimerait que son fils joue pour l’Olympique de Marseille au plus haut niveau. Maxime Lopez et moi, on est fiers de porter ce maillot, d’être ce symbole. On aime bien avoir ce genre de responsabilité, ça ne nous freine pas, au contraire ça nous pousse à donner le meilleur. »

« Il a toutes les qualités pour devenir un joueur du top mondial en défense centrale. »

Du haut de son mètre 84, pas si grand pour un défenseur central, Kamara voit partir Rudi Garcia et André Villas Boas débarquer. Très vite, le technicien portugais place également de grands espoirs sur les solides épaules de celui qui a joué pour toutes les catégories d’âge de l’Équipe de France. En tant que milieu de terrain? Non, Villas Boas voit plutôt en Kamara un défenseur central: « Bouba a toutes les qualités pour devenir un joueur du top mondial en défense centrale. Donc je pense qu’il faut continuer ce type d’évolution. Il peut devenir un grand joueur dans cette position. Il peut jouer en sentinelle, mais ce n’est pas une solution que je cherche. »

Pourtant, c’est finalement en tant que milieu de terrain que Kamara jouera la saison 2019-2020. La faute à l’arrivée en patron d’Alvaro Gonzalez, associée à un Duje Caleta-Car qui monte en puissance. Pas de quoi bousculer le numéro 4 marseillais, qui peut compter sur son grand volume de jeu, une technique au-dessus de la moyenne pour un défenseur et une bonne lecture du jeu aussi bien offensivement que défensivement. La preuve: il ne quittera le onze de base de Villas Boas que lorsqu’il est suspendu. Son seul gros point faible étant évidemment sa justesse dans les trente derniers mètres adverses. Au total, il n’a inscrit que trois buts et délivré trois passes décisives depuis qu’il porte le maillot phocéen.

Au duel face à Rennes
Au duel face à Rennes© BELGA/AFP

Comme un poisson dans l’eau à ce poste, Kamara reconnaissait pourtant une préférence pour le rôle de défenseur lors d’une interview pour l’AFP: « Mon vrai poste, c’est défenseur central, celui où je m’épanouis le plus, mais si le coach a besoin de moi je jouerai au milieu. J’ai toujours joué défenseur central, on m’a positionné une fois à ce poste-là et je ne l’ai jamais quitté. J’aime défendre, j’aime disputer des un-contre-un, anticiper les ballons, j’aime surtout les sorties de balles, c’est nous les premiers relanceurs. Et quand tu gagnes ton un-contre-un le stade explose, comme si tu avais marqué un but. »

En tant que défenseur ou en tant que milieu de terrain, le minot a en tout cas réussi le pari de passer des couloirs de la Commanderie et des tribunes du Vélodrome à une place de titulaire à l’OM. Avec déjà 79 matchs au compteur à seulement 20 ans, Kamara a tout d’une future légende du Vel’. Mais si son contrat court jusqu’en juin 2022, des clubs comme le PSG, le Milan AC, les deux Manchester ou Arsenal semblent lui porter un grand intérêt. En ajoutant à cela les problèmes financiers d’un OM qui semble devoir se séparer de ses meilleurs éléments pour remplir les caisses, on obtient un départ inévitable.

L’amour du maillot et l’hymne de la Ligue des Champions peuvent-ils suffire à garder Kamara au Vélodrome?

Si Marseille demande 90 millions pour se séparer de sa pépite, le juste prix en cas de départ devrait plutôt se trouver aux alentours des 40 millions. Mais un départ est-il vraiment à l’ordre du jour ? Pas forcément, si on en croit le minot: « De nos jours, c’est rare qu’un joueur fasse toute sa carrière dans le même club. Pour l’OM, je le ferais, mais dans le foot, on ne sait pas ce qui se passera demain. Ça ne poserait aucun problème de m’inscrire dans la durée, c’est mon club formateur, je me sens bien ici. »

D’autant que l’OM disputera la saison prochaine la Ligue des Champions. Il se chuchote que Kamara souhaiterait entendre l’hymne mythique maillot bleu et blanc sur les épaules, porté par un Orange Vélodrome survolté.

Par Jérôme Jordens (st.)

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