Guillaume Gautier

La chronique de Guillaume Gautier | Un PSG sans ego? Ce serait oublier celui de Luis Enrique

Guillaume Gautier Journaliste

Luis Enrique a offert au PSG sa première Ligue des Champions. En chassant les ego d’un vestiaire de stars pour y imposer le sien, indispensable préalable pour triompher.

Le football, c’est un plan qui ne se déroule jamais comme prévu. Ancien coach à succès du Standard et de l’Antwerp, László Bölöni aimait le résumer ainsi: «Mon épouse était actrice, et on a souvent parlé de la différence entre nos métiers. Mon argument, c’était que quand elle montait sur scène, tout le monde voulait que le spectacle soit réussi. Moi, lorsque je monte sur le terrain, j’ai au moins onze personnes, et parfois tout un public, qui veulent casser mon spectacle

Sur la pelouse de Munich, au sommet de l’adversité sportive que représente une finale de Ligue des Champions, les hommes de Luis Enrique ressemblaient à des acteurs. Les joueurs de l’Inter, à des figurants. Tout était au service du spectacle de la domination d’un PSG irrésistible.

L’histoire se déroule sans accrocs. Elle se raconte dans les yeux d’Ousmane Dembélé, homme le plus efficace de l’équipe parisienne cette saison mais qui quitte la finale sans but marqué. Avec les éloges de son coach, en revanche. Luis Enrique affirme après le coup de sifflet final qu’il lui «donnerait le Ballon d’or, seulement pour la façon dont il a défendu. Ça, c’est diriger une équipe avec humilité.»

Le storytelling est servi chaud, cuillère en bouche. La victoire de ce PSG devient le triomphe des humbles. Des soldats achetés pour au moins 50 millions chacun, mais au service du collectif le mieux huilé d’Europe. Tout ça dans un club qui jongle depuis plus d’une décennie avec les talents égocentriques, de Zlatan Ibrahimović à Kylian Mbappé, pour finalement gagner sans eux. Après avoir voulu faire comme le Real Madrid, allant jusqu’à empiler les talents de Messi, Mbappé et Neymar, le PSG a gagné en imitant Manchester City, en dessinant un projet aux ego effacés. Ou presque, parce qu’il en reste un qui déborde au point de laisser celui des joueurs au second plan: celui de l’entraîneur. Parce que, comme quand il a remporté le triplé Championnat, Coupe et Ligue des Champions en 2015, soit six ans après son illustre prédécesseur, Luis Enrique s’est remis à imiter Pep Guardiola.

Pour récompenser la domination d’un Manchester City qui gagne tout, c’est le maître à penser Rodri qui est sacré joueur de l’année. Un homme qui n’apparaît presque jamais dans les statistiques, mais est l’incarnation d’un collectif. Le prolongement sur le terrain des idées de son coach sur le banc. Comme si lui remettre le trophée était une façon de faire un clin d’œil appuyé à celui qui lui a donné les clés d’un jeu de possession si bien huilé. Parce qu’aujourd’hui, quand on pense à Manchester City, on pense à Pep Guardiola.

Comme son compatriote, Luis Enrique est un génie du jeu. Les permutations incessantes entre ses joueurs offensifs ont fini par évanouir les joueurs de l’Inter. L’homme aime se mettre au premier plan, et c’est sans doute ce dont avait besoin le Paris Saint-Germain pour ordonner un vestiaire historiquement régi par ses stars. Il faut des certitudes et de l’ego pour arriver dans l’un des clubs les plus riches de la planète, et dire que personne ne doit y être plus important que soi.

L’Espagnol est arrivé, a cohabité avec Mbappé, puis l’a regardé partir sans regret. Son plan s’est déroulé comme prévu.

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