Le Crossing Schaerbeek avait trouvé son nouveau coach, mais le mariage n’a duré qu’une semaine. La faute à un changement d’entraîneur en Ligue des Champions.
A cause de huit millions d’écoutes sur Spotify et cinq millions de visionnages sur YouTube, sans même parler des écoutes non souhaitées au détour d’une station radio, il est devenu impossible de parler d’effet papillon sans entendre Bénabar fredonner ce refrain qui s’accroche aux recoins de mémoire, même seize ans après sa sortie.
«Petites causes, grandes conséquences», c’est un peu la morale de l’histoire qui s’est abattue contre le Crossing Schaerbeek, club bruxellois tout juste monté en Nationale 1 ACFF, le troisième niveau du football belge. Pour remplacer Davy De Herdt, l’homme qui les avait emmenés de la D3 ACFF à la N1 en deux ans, les Bruxellois jettent leur dévolu sur Jérôme Patris, passé par plusieurs clubs namurois avant de devenir l’adjoint de Felice Mazzù sur le banc de Saint-Trond la saison dernière. Sept jours plus tard, Patris n’est déjà plus là. C’est l’effet papillon.
La mésaventure schaerbeekoise commence en Ligue des Champions. L’AS Monaco s’y fait balayer par le Club de Bruges pour son entrée en matière, et c’est le début de la fin pour son coach Adolf Hütter, compréhensiblement surnommé «Adi». Même un match nul contre Manchester City n’y change rien, tant le bilan sur la scène national est blafard. Le club du Rocher change de coach, et jette son dévolu sur Sébastien Pocognoli. Le champion de Belgique quitte l’Union, et beaucoup s’indignent. Il y a ceux qui disent qu’un coach ne doit pas quitter un club en pleine saison, d’autres qui préfèrent affirmer qu’un club qui vire son coach ne devrait pas pouvoir aller chercher celui d’un autre club, et ceux qui disent que finalement, les entraîneurs font bien de partir avant qu’on leur montre la porte de sortie.
Jusque-là, tout va bien pour Schaerbeek. Certes, l’Union a pris un Patris, mais c’est Louis, le frère qui multiplie les courses dans le couloir droit. Les Saint-Gillois s’imaginent bien avec Rik De Mil à leur tête, mais Mehdi Bayat n’est pas du même avis et appelle Philippe Bormans pour lui couper toute envie de débaucher son coach en pleine saison. L’Union étudie d’autres options, et choisit David Hubert, englué en fond de tableau avec OHL et qui saute évidemment sur l’opportunité, quelques mois après son arrivée à Louvain. Là, il n’y a plus grand-monde pour s’indigner des départs en pleine saison et des clubs débaucheurs, sans doute parce que le sort des Louvanistes est bien moins médiatisé et médiatisable que celui des Unionistes.
Felice Mazzù entre alors en scène, prenant les rênes de son sixième club différent en première division. Le coach carolo souhaite reformer à Den Dreef, l’antre d’OHL, le staff qui ne lui a pas permis de sauver Saint-Trond. Il contacte donc Jérôme Patris pour l’embarquer dans l’aventure brabançonne, et ce dernier n’hésite pas à retourner dans le carrousel de l’élite nationale, plus proche de son rêve de s’installer durablement chez les professionnels.
Y aura-t-il des indignés? Doit-il, finalement, y en avoir? La véritable question est ailleurs: elle se demande pourquoi les entraîneurs, souvent les plus impliqués dans un projet chronophage, sont si prompts à quitter le navire en pleine croisière. Peut-être parce qu’ils savent très bien qu’ils sont les premiers qu’on passe par-dessus bord.