Marc Wilmots, de plus en plus critiqué, doit savoir qu’une victoire, aussi belle soit-elle, ne le met pas à l’abri de la chute.
Lors des guerres médiques, ces guerres qui opposèrent au 5e siècle avant Jésus-Christ les Perses à une ligue grecque, avec à sa tête Sparte et Athènes, les vainqueurs de Marathon (Miltiade) en -490, Salamine (Thémistocle) en -480 et Platées (Pausanias) en -479 furent accueillis en héros avant d’être rejetés assez vite par les citoyens de leur cité, eux qui avaient pourtant sauvegardé la liberté de leur pays face à l’envahisseur perse. Pilotée par des factions rivales, l’opinion publique avait rapidement tué ses héros, qui avaient parfois été gagnés par l’assurance, voire l’arrogance de ceux à qui on ne peut plus rien refuser.
Thémistocle, homme très intelligent, était devenu tellement confiant en ses capacités après sa victoire héroïque à Salamine que cela paraissait pour une certaine suffisance. Ivre de ses succès, il n’avait pas su anticiper les manoeuvres du clan rival qui avait fini par le pousser à l’exil. Quant à Pausanias, la propagande a longtemps minimisé son sens tactique lors de la victoire finale de Platées.
Héros de toute une nation, il y a de cela un an, notre sélectionneur national, Marc Wilmots est de plus en plus remis en question. Même après une victoire (oserions-nous le terme homérique ?) en Israël (0-1) et alors que ses troupes occupent la tête du groupe à mi-parcours ! Lui aussi est guetté par des critiques venant souvent de gens qui le détestent à ce point qu’ils guettent le moindre détail qu’ils transforment en faute rédhibitoire, jetant l’opprobre sur le bilan quasiment parfait du sélectionneur.
Il faut arrêter de sortir ce classement FIFA à tout bout de champ car personne ne peut croire qu’il reflète réellement notre valeur.
Il est vrai que le jeu des Diables Rouges en 2e mi-temps fut loin d’être satisfaisant. Vrai aussi que les changements effectués (tant le remplacement d’Eden Hazard que celui surtout de Christian Benteke) prêtent à interrogation. Vrai aussi qu’il existe des entraîneurs plus aguerris et tacticiens que Wilmots (mais hors de prix pour la Fédération belge). Mais bon dieu, ne sommes-nous pas repartis de terre Sainte avec les trois points, trois jours après une prestation, celle-là très convaincante, contre Chypre ? Parfois, il faut savoir raison garder et analyser les faits : ceux-ci disent que les Diables ont rempli leur contrat. Et surtout il faut arrêter de sortir ce classement FIFA à tout bout de champs.
Notre position de 3e mondial ne reflète que les successions de victoires de ces deux dernières années, toutes acquises face à des formations inférieures ou de notre calibre (Serbie, Croatie, Ecosse, Macédoine, Algérie, Russie, Corée du Sud, Etats-Unis) et certainement pas notre valeur réelle. Arrêtons donc d’attendre de cette équipe qu’elle » développe le jeu digne de son statut « . D’autant plus qu’aucune nation au monde n’offre du foot champagne à chaque rencontre. Même les grands pays ont appris à se satisfaire de » petites victoires « . C’est ce qui fait d’ailleurs le propre des grandes équipes : apprendre à gagner sans bien jouer.
Reste cependant à Marc Wilmots de se servir de l’exemple de Thémistocle pour ne pas tomber dans les mêmes travers que le stratège grec. Un trop plein de confiance en soi mène parfois à la suffisance et confine à l’isolement. L’opinion publique auprès de laquelle il jouit encore d’une grande cote de popularité, ne lui pardonnerait pas.
Par Stéphane Vande Velde