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Comment la méthode Peter Verbeke a conquis Anderlecht

Guillaume Gautier
Guillaume Gautier Journaliste

Un peu moins de deux ans après son arrivée dans la capitale, Peter Verbeke est le nouveau CEO des Mauves. Coulisses d’une ascension.

Quand il devient directeur sportif de La Gantoise, en plein coeur de l’automne 2018, il se dit de Peter Verbeke qu’il sera, plus tard, le successeur du puissant Michel Louwagie dans le fauteuil de CEO des Buffalos. Trois années ont passé, et Peter Verbeke est désormais un CEO. Pourtant, à la Ghelamco Arena, Michel Louwagie est toujours là. C’est à une cinquantaine de kilomètres de Gand, à Neerpede, que Verbeke a finalement poursuivi son ascension. En même pas deux ans, il est devenu l’une des figures centrales du nouvel Anderlecht. L’un des rares à s’offrir un peu de ce soleil accaparé par l’imposante figure médiatique qu’est Vincent Kompany.

Quand il enfile le costume ambivalent de conseiller externe du RSCA dans les premiers jours de l’année 2020, Wouter Vandenhaute constate rapidement les déficits organisationnels d’un club en chantier. « La gestion de Roger Vanden Stock, Philippe Collin et Herman Van Holsbeeck n’était pas du tout mauvaise à l’époque, mais ils ne se sont pas renouvelés », confiera d’ailleurs Vandenhaute au Soir. Quand des profils à l’approche plus moderne sont amenés à collaborer avec le club mauve lors de l’ère précédente, tous rapportent en effet cette impression d’un club figé dans le passé. Ni Luc Devroe, ni Michael Verschueren ne parviennent à emmener Anderlecht dans une nouvelle ère.

Pour ceux qui le connaissent bien, son arrivée à Anderlecht semble plus relever du plan que de la simple coïncidence. En tout cas, Peter Verbeke était prêt.

Si Marc Coucke tente de convaincre Lucien D’Onofrio de monter à bord de la galère mauve, Wouter Vandenhaute glisse alors le nom de Peter Verbeke, charmé par la vision précise et structurée d’un jeune directeur sportif qui tient son agence Let’s Play en haute estime. Très vite, Verbeke devient Head of Sports, chargé de mener à bien le renouveau du RSCA. Pas vraiment une surprise pour ceux qui le connaissent bien, pour qui son arrivée à Anderlecht relève plus du plan que de la coïncidence. Il se dit que l’ambitieux Peter pensait déjà à un futur mauve depuis quelques temps, bien avant de mettre le cap sur la capitale.

Le nouvel homme fort du département sportif mauve mène alors plusieurs missions de front. Il veut renforcer l’équipe, sur la pelouse et en-dehors. Pour cela, il faut à la fois mobiliser ses connaissances, activer ses réseaux et développer son plan.

Ses années passées à Bruges et à Gand lui ont permis de connaître les salaires en vigueur parmi les plus grands clubs du Royaume. Du coup, Verbeke ouvre de grands yeux quand il découvre en détails la politique salariale des Mauves, dont les rémunérations annuelles ont décollé pour atteindre 58 millions d’euros, soit 112% du chiffre d’affaires bruxellois. Du salaire royal d’Adrien Trebel, offert sur un coup de folie de Marc Coucke, aux propositions surréalistes faites à certains jeunes de Neerpede pour les conserver à tout prix, le cap est impossible à maintenir. Fini aussi, le temps des folies et des transferts à des montants mirobolants. La somme de cinq millions d’euros devient ainsi un plafond théorique à ne pas franchir pour attirer un nouveau joueur dans la capitale.

À l’initiative de Verbeke, tout le fonctionnement du scouting et du recrutement ont été repensés et rationalisés à Neerpede.

En vue de renforcer l’équipe, Verbeke active alors ses contacts, étoffés depuis ses débuts au sein de la cellule de scouting de Bruges. Quand Vincent Kompany et Frank Vercauteren veulent renforcer leur staff, il soumet par exemple le nom d’Edward Still, aujourd’hui devenu coach de Charleroi et qu’il a connu à Bruges. C’est aussi depuis la Venise du Nord qu’il fait venir Dries Belaen pour l’intégrer à la cellule de scouting du RSCA, récemment complétée par un Tim Matthys côtoyé lors de sa période gantoise.

Belaen incarne la modernisation de ce département laissé pour compte de longue date à Neerpede. Alors que l’essentiel du travail se faisait sur le terrain sous la direction précédente – avec les notes de frais conséquentes qui en découlent – le recrutement se fait désormais avec une part plus importante accordée au scouting vidéo et aux datas. Des aspects en lesquels Verbeke croit énormément, même s’il n’en maîtrise pas personnellement tous les rouages, sachant pertinemment l’importance de s’entourer de scouts de pointe en la matière. Encore une fois, c’est le choix de la compétence autour de lui qui fait la différence. Au moment de recruter un joueur, il lui arrive ainsi souvent d’envoyer à un réseau d’agents de confiance les données majeures du deal à venir (somme disponible et profil recherché), avant de faire examiner soigneusement les joueurs proposés par sa cellule de scouting. Les méthodes font leur preuve, avec des transferts essentiellement couronnés de succès: au sein du onze aligné ces dernières semaines par Vincent Kompany, huit joueurs sont arrivés au club depuis la nomination de Verbeke à la direction sportive.

À 25 ans à peine, la machine à projets du Sporting était déjà la tête pensante des Hindu Nights, des soirées devenues le rendez-vous branché des nuits gantoises.

« La méthode de travail que Peter a introduite depuis un an et demi dans le département sportif du club sera poursuivie au sein de l’ensemble du RSC Anderlecht », précise le communiqué des Mauves. Depuis toujours, la vision de Peter Verbeke dépasse l’unique cadre du sportif, s’intéressant aussi bien à la gestion globale du club qu’à sa stratégie sur les réseaux sociaux. L’homme fort du Sporting est une machine à projets, comme ceux qu’il planifiait déjà à 25 ans, quand il était la tête pensante de ces Hindu Nights considérées au milieu des années 2000 comme les rendez-vous les plus branchés des nuits gantoises. Une vision globale désormais récompensée par un costume à la hauteur de ses éternelles ambitions, proche de celui enfilé à Bruges par un Vincent Mannaert avec lequel il réfutera toujours toute ressemblance. Le tout dans un club regonflé à bloc par une augmentation de capital gargantuesque, rendue possible par le gel du fair-play financier suite à la crise sanitaire. Pas question pour autant de se remettre à faire des folies pécuniaires du côté de Saint-Guidon. Ce n’est pas dans le script, et Peter Verbeke n’a pas l’habitude de dévier de ses plans.

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