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Abbas Bayat : « On me critique parce que je suis iranien et musulman »

Le président du Sporting de Charleroi revient pour Sport/Foot Mag sur tous les dossiers chauds. Interview vérité.

La presse française a sorti récemment deux articles dans lesquels on vous classe parmi les dictateurs du foot européen. Comment réagissez-vous ?
Abbas Bayat : Cela ne me donne pas envie de les lire. Cela en dit long sur le caractère des Français : ils se permettent de se mêler de tout. En France, ils ont l’habitude de parler beaucoup de dictateurs et pas assez des collaborateurs. Si un Français pense que je suis un dictateur dans mes propres sociétés, il ne comprend pas le monde des 2.000 dernières années. Vous êtes le patron chez vous. Si quelqu’un entre chez vous, vous ne devez pas lui demander si le fauteuil est confortable, ce qu’il veut manger ou s’il veut occuper votre maison. La société du Sporting de Charleroi est une SA avec des actionnaires privés. Je suis élu à mes postes selon un processus juridique que je dois respecter. Comment peut-on dire que je suis un dictateur ? Je ne vais pas soumettre toute décision au vote des joueurs ou des supporters quand même !

Pourquoi parle-t-on de vous en ces termes ?
Parce que je n’ai pas peur de prendre des décisions. C’est ce qui manque en Belgique.

Ne devriez-vous pas mieux communiquer autour de vos décisions ?
Je suis un très bon communicateur avec les gens avec lesquels je travaille. J’ai parlé à l’époque avec des supporters. Mais à ceux qui ne sont pas rationnels, que voulez-vous que je leur dise ? Tout le monde n’est pas ouvert à la discussion. Dans toute l’Europe, il y a, par exemple, 20 ou 30 % de racistes avec lesquels on ne sait pas discuter.

Vous pensez qu’on vous critique parce que vous n’êtes pas Carolo ?
On me critique pour trois raisons. 1. Je ne suis pas belge et je pense que cela sert de justification pour dépasser les limites. 2. Je suis musulman. 3. irano-américain. Tout le monde pense que les Iraniens et les Américains sont fous, et que le monde musulman est un monde de terreur. Cela suffit pour ne pas m’aimer. Vous ajoutez à cela le fait que je ne suis pas Carolo et que je prends des décisions comme limoger Jacky Mathijssen, le chouchou des supporters. Pour certains, c’est dur à accepter. Mais à la base de tout cela, il y a un sentiment de xénophobie.

« La seule spécificité de Charleroi c’est la corruption politique »

Finalement avez-vous jamais compris quelque chose à la Ville de Charleroi ?
Je comprends comment elle marche.

Mais vous ne vous sentez pas là-bas comme chez vous ?
Bien sûr que non puisque je ne suis pas belge. Pourquoi devrais-je me sentir à Charleroi comme chez moi puisque je ne me sens pas chez moi à Bruxelles, ni à Londres. A moitié aux Etats-Unis. Je suis un peu comme tous les Italiens de Charleroi. Ils ont encore tous leur passeport italien ! Cela signifie quoi quand vous n’êtes même pas prêt à prendre un passeport belge ? Simplement que vos racines sont ailleurs…

Pour vous, Charleroi, cela représente quoi ?
C’est l’endroit où se trouve le club. Je vais simplement là pour voir les matches. Je sors de l’autoroute au-dessus du stade, puis je rentre chez moi. Je n’habite pas là, je ne socialise avec personne à Charleroi. A vrai dire, je ne connais pas Charleroi.

Pour faire tourner votre club, il ne faut pas tenir compte de l’identité régionale ?
Il n’y pas d’identité régionale. Il y a des Italiens, des Portugais, des Marocains, des Turcs. C’est une ville sans identification forte comme à Bruges ou Gand. ( Il réfléchit). En fait, il y a une spécificité à Charleroi : la corruption politique. La première chose que j’ai lue sur Charleroi disait qu’il s’agissait de la capitale européenne du car-jacking. Que dois-je penser de cela ? Cependant, pour comprendre une ville, il faut y habiter pendant des années.

Retrouvez l’intégralité de l’interview exclusive d’Abbas Bayat dans votre Sport/Foot Magazine de cette semaine.

Stéphane Vande Velde, Sport/Foot Magazine

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