LA TROUILLE DE STEFAN KOVACS

René Taelman a bien connu le légendaire coach roumain Stefan Kovacs (ex-Ajax Amsterdam) qui l’a accueilli pour un stage. Voici ce qu’il en dit dans son livre.

 » Kovacs était devenu un personnage à la fois mondain et populaire. Il était très proche de l’omnipotent couple présidentiel : les Ceaucescu. Il avait ses entrées partout et bénéficiait de nombreux privilèges. Il n’empêche qu’il se méfiait comme de la peste de la police secrète de Ceaucescu, la Securitate, omniprésente. Un jour, par exemple, où nous nous trouvions dans un grand restaurant public, il me demanda de parler à voix basse. Je lui en demandai la raison et il me répondit que nos voisins de la table d’à côté étaient des membres de la Securitate.

-Comment le savez-vous, insistai-je ?

-Je le vois tout simplement à leur comportement. Ils observent et ils écoutent. Ils se parlent à peine entre eux.

Une autre fois, il m’invita chez une de ses amies d’enfance, une ex-directrice d’opéra. Dès qu’il m’ouvrit la porte de l’immeuble, il mit un doigt sur ses lèvres me signifiant de ne pas parler. Il m’invita alors à le suivre jusque dans l’appartement et n’ouvrit la bouche que lorsqu’il eut mis en route un 78 tours sur un vieux tourne-disque et que le son du concerto choisi fut en mesure de couvrir celui émanant de notre conversation.

Il me fit comprendre aussitôt qu’il pouvait y avoir des micros placés dans l’enceinte du logement. (…)

Un peu plus tard, un agent de joueurs italo-argentin vivant en Belgique et qui m’avait accompagné, me proposa d’assister Kovacs, pressenti comme entraîneur de l’équipe nationale du Mexique. Malheureusement pour lui comme pour moi, Ceaucescu l’obligea à prendre en main la destinée d’un club grec. Il s’agissait du Panathinaikos, devenu professionnel et acquis en 1979 par la famille Vardinoyannis. Stefan Kovacs préférait entraîner le Mexique mais un ordre du dictateur, ou d’un de ses proches, comme son terrible fils cadet Nicu, ne se discutait pas, car les conséquences pouvaient être terribles.

Le gardien de but du Steaua Bucarest, en 1986, Helmut Duckadam, en est un bon exemple. Il remporta à lui seul la finale de Coupe d’Europe des clubs Champions, à Séville, contre le FC Barcelone. (…) Selon le journaliste français Dominique Paganelli, le Real Madrid, intéressé par le transfert de ce gardien (…) offrit une Mercedes dernier cri à Duckadam. Lorsque le véhicule arriva un peu plus tard et que ce dernier voulut en prendre possession, Nicu, grand amateur de belles voitures, voulut se l’accaparer en échange d’un autre véhicule nettement plus modeste. (…) Devant le refus du gardien de but, Nicu fit arrêter Duckadam et la Securitate se chargea du reste : briser ses doigts, ses mains et ses poignets.  »

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