ÉTHIQUE NERVEUSE…

J’ai beau tripoter le problème dans divers sens, je n’arrive pas à me dire qu’une morale soit supérieure à l’autre, dans cette problématique du forfait général de Beringen Heusden-Zolder ( BHZ) en cours de compétition. Que le choix de celui qui doit s’y coller comme décideur (ici l’URBSFA) soit de conserver les résultats acquis puis d’entériner les forfaits, ou que ce choix soit de tout annuler, il en émanera de toute façon un couillonné qui se sentira, avec raison plausible, dindon éthique de la farce : et qui vitupérera contre le décideur pour tenter de garder son bifteck.
Soyons francs : pour chacun ici, c’est l’intérêt mathématique du club qui dicte la marche à suivre. C’est le classement qui crée l’éthique.
Prenons trois des principaux cas de figure.
Premier cas, je suis de Mons. J’ai battu deux fois BHZ sur le terrain, à l’époque où ce club était encore majeur et vacciné : alors qu’à la même époque, Overpelt-Lommel mon rival direct s’est fait accrocher deux fois. Faut rien annuler : les quatre points acquis par rapport à mon rival direct sont légitimes, me les enlever serait donc synonyme de déni de ces valeurs sportives que je défends par-dessus tout…
Deuxième cas de figure, je suis d’Overpelt-Lommel. Et je connais trois mots de latin : Dura lex, sed lex ! La loi est dure, mais elle dit de tout annuler, et c’est la loi ! Si j’avais été Montois, j’aurais évidemment caché mon latin et plutôt fait de mon nez en argumentant qu’en toute chose il y avait la lettre et l’esprit,… mais je ne suis pas Montois et la loi m’est cette fois favorable : donc, même si je comprends la déception de mon rival hennuyer amputé de quatre points d’avance et qui me voit rappliquer dare-dare, je me dois de faire respecter les règles établies, parce qu’elles sont la base de ces valeurs sportives que je défends par-dessus tout…
Troisième cas de figure, je suis de Virton. J’ai combattu deux fois BHZ sur le terrain avant le forfait général, et j’y ai laissé 5 points sur 6. Je lutte pour le maintien et mes concurrents directs, eux, n’ont rencontré BHZ qu’une seule fois avant ce forfait : et l’on envisagerait de leur refiler trois points en cadeau, comme ça, sans même qu’ils aient dû combattre une seconde fois ? Faut pas charrier, faut tout annuler : sans quoi nous serions à l’opposé de ces valeurs sportives que je défends par-dessus tout…
A l’inverse de chez nous où le classement module donc les éthiques, un Conseil National de l’Ethique dûment constitué vient de chercher à moduler les classements chez nos voisins français. Mais faudrait pas croire qu’il a résolu les problèmes ! Se voulant souverainement indépendant, présidé par Dominique Rocheteau jadis connu comme l’ Ange Vert, ce CNE entend sanctionner ce qui bafoue nos valeurs (encore elles…), ce qui relève du Diable et du Mal intrinsèque !
Et tout ce qu’il a trouvé, c’est ceci : après le PSG-OM de championnat du 5 mars dernier (score final, 1-1), le CNE a décidé que le PSG avait mal agi en n’octroyant pas aux visiteurs le quota de places fixé, et que l’OM s’était montré tout aussi méchant et antisportif en s’amenant avec son équipe Réserve pour protester. Aussi, au classement, le CNE a-t-il retiré son point acquis à chacun des protagonistes….
Ça a duré 15 jours, le temps que le CNE se fasse débouter en appel et que leur point soit rendu aux deux acteurs d’un match qui s’était déroulé dans les règles ! Sans compter le côté toujours sympathique (moral ?) d’avoir vu quelques gamins (ici marseillais) tenir en échec un gros poisson (ici parisien)…
Et ce déboutement fut heureux ! Car si, au nom de l’éthique, on se met à sanctionner des futilités pareilles par un retrait de points (sanction majeure, redoutée entre toutes dans ce monde impitoyable de compétition), que restera-t-il pour sanctionner les vrais manquements ? Rien. Etre chargé de l’éthique et vouloir faire le ménage, c’est lutter continûment contre la violence du jeu, le hooliganisme, le racisme, le dopage, la corruption, le foot hautement friqué que prône le G14… Comparée à ces fléaux, l’initiative prise à l’encontre du PSG et de l’OM ne démontrait qu’une chose : impuissant à contrer les grosses saloperies, le CNE des Français ne serait jamais que celui des péchés de foot véniels.
bernard jeunejean
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