En 1976, il fut le dernier Belge à remporter le Tour. C’était le point
Cette année-là, Lucien Van Impe avait forgé sa victoire dans l’une des étapes de montagne les plus redoutables de la Grande Boucle : le Pla d’Adet (Pyrénées). Il avait effectué un double démarrage et roulait 10 km/h plus rapidement que ses poursuivants, les clouant littéralement sur place. Ce jour-là, il s’emparait du maillot jaune pour ne plus le quitter jusqu’aux Champs-Elysées.
Peu de coureurs belges sont autant rattachés à l’histoire du Tour que Van Impe. Comme s’il n’y avait que cette course qui comptait pour lui. Or, il n’y a rien de plus faux, comme il le dit : » On entendait souvent que c’était facile pour moi. Courir quatre semaines par an et pour le reste en vacances. Mais regardez toutes les victoires engrangées dans les courses à étapes que je disputais avant le Tour : Dauphiné Libéré, Tour de Romandie, etc. et vous comprendrez que ces commentaires n’étaient pas fondés. J’y remportais d’ailleurs à chaque fois le maillot à pois « . Un classement de meilleur grimpeur que le natif de Mere, en Flandre- Orientale, dominera d’ailleurs à six reprises.
Pas mal pour un cycliste qui, lors de ses jeunes années, faisait tout pour éviter les entraînements préparés par son père qui voyait déjà en lui un grand coureur : » Je refusais de m’entraîner dur jusqu’au jour où, chez les amateurs, j’ai compris que celui qui travaillait d’arrache-pied en semaine gagnait généralement le week-end et que les autres étaient lâchés « .
Conscience professionnelle et fanatisme, voilà sans doute ce qui résume le mieux la carrière de Van Impe, un homme au caractère jovial et espiègle qui fêtera ses 60 ans en octobre. Il laissa tout tomber pour le vélo, jusqu’à en devenir maniaque : » Au Tour, je faisais apporter mon dessert dans ma chambre par un coéquipier, ainsi je bénéficiais de quelques minutes de repos supplémentaires. Je suis arrivé à mes fins en m’entraînant dur, comme par exemple gravir cinq ou dix fois, si nécessaire, le Mur de Grammont, jusqu’à ce que j’en tombe d’épuisement. Car on ne naît pas grimpeur, on le devient à la force des jarrets « .
Il a traité Guimard de c…
Van Impe n’a jamais fait partie d’une grande équipe : » Je n’ai jamais compris qu’aucune de ces formations du top ne s’intéresse à moi. Mais je n’ai jamais déclaré non plus être intéressé à passer dans une autre équipe. Je le regrette car si j’avais été mieux entouré, je pense que j’aurais fini plus d’une fois en jaune à Paris « .
Ses relations avec ses directeurs d’équipe furent souvent houleuses, comme ce fut le cas avec Cyrille Guimard, lorsqu’il remporta le Tour 1976 : » J’avais demandé à deux reprises à un coéquipier de se laisser dépasser par la voiture de Guimard et de me ramener mon bidon d’eau. Guimard refusant, je me laissai dépasser jusqu’à la hauteur de sa voiture et je lui criai : -Tu es un con. Je reste ici jusqu’à ce que tu me donnes mon bidon. Il a bien dû me le donner et j’ai terminé l’étape deuxième derrière Joop Zoetemelk « .
De retour à l’hôtel, Van Impe refusa de présenter ses excuses. Finalement, sa femme le convaincra de s’excuser : » Guimard avait exigé de mes coéquipiers qu’ils ne courent plus pour moi et j’ai remporté le Tour quasi en solo. J’ai toujours relativisé le rôle des directeurs sportifs, qui doivent déjà être contents de pouvoir s’asseoir dans la voiture ! »
Pourtant, Van Impe s’est reconverti et récemment a repris la direction de l’équipe Unibet. Il espérait remettre Frank Vandenbroucke définitivement sur de bons rails et était convaincu qu’il allait réussir mais cette illusion fut déçue.
Durant 15 ans, Van Impe aura animé le peloton, au propre comme au figuré. En 1981, au sein de la modeste équipe Boston, il termine le Tour juste derrière la légende Bernard Hinault. Deux ans plus tard, il devient champion de Belgique sur route à Renaix, à l’âge de 36 ans. Comme un pied de nez à tous ceux qui le considéraient uniquement comme un coureur de Tour de France…
JACQUES SYS