La nouvelle grille tarifaire de la SNCB va entrer en vigueur le 15 octobre prochain. Les personnes prenant très occasionnellement le train risquent de payer plus cher leur billet. Explications.
La «plus grande réforme des 30 dernières années»: la SNCB a dévoilé lundi sa nouvelle offre tarifaire, qui entrera en vigueur le mercredi 15 octobre. Parmi les nouveautés: la suppression des tarifs forfaitaires (Multi, Senior Ticket et Youth Ticket), l’introduction d’une carte avantage Train+ offrant jusqu’à 40% de réduction, et une tarification distincte selon les heures creuses ou pleines. «Nous avons pour objectif, inscrit dans notre contrat de service public, d’atteindre +30% de voyageurs entre 2023 et 2032. Cette nouvelle grille tarifaire va en ce sens, tout comme l’augmentation de l’offre», explique Tom Guillaume, porte-parole de la SNCB.
Mais une annonce du genre s’accompagne, presque obligatoirement, de critiques. Du côté de Navetteurs.be, Duncan Smith, vice-président de l’ASBL, évoque une grille tarifaire «cohérente dans son ensemble», qui «ne change absolument rien pour les abonnés», ce qui correspond à 85 millions de navetteurs sur les 245 millions qui ont voyagé avec la SNCB en 2024. Il salue notamment «la baisse du tarif maximal selon la distance», calculé désormais sur 120 kilomètres et non plus 150, permettant une baisse de 20% sur les trajets longue distance. «Mais s’il y a du bon, il y a du moins bon», ajoute-t-il, évoquant l’un des arguments principaux pour justifier cette nouvelle grille tarifaire: «La SNCB estimait que la grille précédente, en vigueur depuis des décennies, était devenue trop compliquée pour les voyageurs. Ici, un nouveau degré de complexité a remplacé l’ancien, selon les premiers retours que nous avons.»
«Simplifier le choix du voyageur»
La SNCB se veut toutefois rassurante face aux inquiétudes exprimées. «Une série de dispositifs sera mise en place pour aider les voyageurs dans les gares, les accompagnateurs de train sont aussi formés pour répondre aux éventuelles questions», fait savoir Tom Guillaume, annonçant aussi la mise en place d’une ligne téléphonique uniquement dédiée aux questions sur cette grille tarifaire. «Le principe de la réforme, c’est de simplifier le choix du voyageur, précise-t-il. Sur le site Internet ou au guichet, l’option la plus avantageuse sera automatiquement proposée; auparavant, chacun devait comparer lui-même les formules disponibles.»
La SNCB avait d’abord évoqué «des voyages moins chers pour 70 à 80% des passagers». Qu’en sera-t-il vraiment? «Ce sera globalement plus avantageux pour près de 80% des passagers en cas de comportement inchangé, précise Tom Guillaume. Cela pourrait effectivement revenir plus cher à une personne qui ne prend le train qu’une ou deux fois par an, si elle ne modifie pas ses habitudes et qu’elle ne bénéficie d’aucune réduction, car jusqu’à présent il y avait des formules tarifaires qui rendaient le voyage plus avantageux.» La compagnie ferroviaire espère que les voyageurs occasionnels de ce genre verront les avantages, notamment financiers, de prendre le train plus souvent qu’à l’accoutumée, voire qu’ils souscriront à l’offre Train+, permettant de bénéficier d’offres, notamment lors des heures creuses* en semaine et le week-end.
«C’est ce comportement que nous cherchons à encourager: attirer les voyageurs vers ces heures pour lisser la fréquentation et les inciter à modifier leurs habitudes quand cela leur est possible», valide Tom Guillaume. «L’idée de dire: “Si vous acceptez de prendre le train en dehors des heures de pointe, ce sera moins cher”, suit une logique économique, analyse Bart Jourquin, professeur d’économie des transports à l’UCLouvain. Mais la composante prix n’est pas la seule qui guide le choix des gens à prendre un moyen de transport, il y a aussi la qualité du service, le confort, la ponctualité… Je doute du fait que les gens prendront plus souvent le train qu’à l’accoutumée juste en raison de cette composante prix.»
Des modifications de conditions générales à prévoir?
Duncan Smith de Navetteurs.be a quant à lui «l’impression que la SNCB ne prend en compte qu’une clientèle de loisirs, en omettant le fait que parmi les non-abonnés, des personnes prennent le train plus régulièrement qu’une à deux fois par an, pour le travail, ou dans le milieu associatif, par exemple. Et celles-ci semblent avoir été complètement oubliées». Il explique avoir déjà reçu plusieurs témoignages de voyageurs qui vont voir le prix de leur trajet exploser, à en croire le simulateur mis en ligne par la SNCB. «C’est vraiment à nous dégoûter de faire tout ce qu’on peut pour préserver l’environnement», a regretté une responsable associative dans un mail envoyé à l’ASBL. Duncan Smith souligne également «le coût» que représente l’abonnement Train+**, rarement évoqué dans les simulations de la SNCB, et la «modification de certaines conditions générales de transport» qui accompagne cette grille tarifaire.
«Un désavantage pour le confort du voyageur.»
Duncan Smith, vice-président de Navetteurs.be
«L’interdiction de l’interruption de trajet va par exemple être mise en place. Lors d’un trajet avec correspondance, il était possible de s’arrêter entre deux trains pour ne pas avoir à courir, prendre un café ou même déjeuner. Ici, ce ne sera plus possible, probablement pour éviter que les gens ne fraudent avec les heures creuses ou les heures pleines. C’est un désavantage pour le confort du voyageur, mais aussi pour les commerçants des gares, qui risquent de perdre une partie de leur clientèle», explique le vice-président de Navetteurs.be. Un point sur lequel la SNCB n’a pas communiqué officiellement. «Les tickets seront valables pour un trajet direct entre la gare de départ et la gare d’arrivée indiquée, sans interruption ni abandon de parcours. Les correspondances restent bien entendu autorisées tel que proposé par le planificateur de voyages», nous fait savoir le porte-parole de la compagnie à ce sujet. Il ne faut pas, dans tous les cas, que les voyageurs s’habituent trop aux prix qui entreront en vigueur au 15 octobre: une indexation des tarifs de la SNCB n’est pas à écarter au 1er février prochain…
*Du lundi au vendredi: embarquement jusqu’à 6h inclus, de 9h à 16h, et à partir de 18h
Le week-end: toute la journée le samedi et le dimanche
**La version mensuelle de Train+ coûtera quatre euros (pour les jeunes, seniors, intervention majorée) ou six euros (pour les adultes de 26 à 64 ans). La version annuelle coûtera 32 ou 48 euros. Jusqu’au 4 janvier, Train+ sera disponible à moitié prix.
