Les médecins généralistes demandent de ne pas envoyer systématiquement chez le médecin généraliste les chômeurs de longue durée qui vont perdre leurs allocations. La N-VA met même en place une sorte de centre d’appel pour les docteurs, que certains qualifient de ligne de délation.
Les premiers mois de l’année risquent d’être particulièrement chargés pour les médecins généralistes. Maaike Van Overloop, présidente de l’association de médecins généralistes Domus Medica, craint le pire. En effet, à partir du 1er janvier, la mesure phare du gouvernement fédéral entrera en vigueur: la limitation dans le temps des allocations de chômage. Au total, quelque 184.463 Belges les perdront.
Ce processus se déroule par vagues. En Wallonie, selon l’Onem, plus de 18.700 personnes perdront leurs allocations dès ce 1er janvier, et 103.091 personnes seront concernées d’ici la fin de la dernière vague, en juillet 2027. A Bruxelles, près de 42.000 personnes sont touchées. En Flandre, 28.000 personnes risquent de perdre leurs allocations au cours des six premiers mois de 2026, selon le service flamand de l’emploi VDAB.
De nombreuses mesures ont été prises en vue de préparer ce grand bouleversement. Des salons de l’emploi organisés par le VDAB aux centres de dispatching des CPAS locaux, en passant par les séances d’information organisées par les syndicats. L’accent est mis en premier lieu sur l’activation. Environ un tiers des chômeurs de longue durée pourraient alors à nouveau prétendre à un revenu d’intégration. Mais de nombreuses personnes au chômage depuis des années ont également été invitées à consulter d’abord leur médecin traitant.
Logique, selon le professeur en politique sociale Wim Van Lancker (KU Leuven). Une partie des personnes actuellement au chômage sera probablement éligible à l’assurance maladie. «Les économies réalisées grâce à la réforme sont donc surestimées, car nous aurons également davantage de malades de longue durée, et ce groupe est déjà énorme, avec plus de 500.000 personnes.»
Saison grippale intense
Maaike Van Overloop craint une «pression énorme» sur les médecins généralistes. «Nous avons mis en garde contre cela lors de l’annonce des mesures. Nous appelons toutes les instances à ne pas renvoyer systématiquement les gens chez leur médecin généraliste. Il vaut mieux examiner ce qui est vraiment nécessaire pour les personnes qui risquent aujourd’hui de se retrouver sans revenus. Les gens se sentent en bien meilleure santé et moins déprimés lorsqu’ils peuvent apporter leur contribution à la société. Cela doit être le principe de base de toute organisation.»
Les médecins généralistes se disent confrontés à une situation extrêmement difficile. Le gouvernement fédéral se tourne également vers eux dans la lutte contre les maladies de longue durée. D’ici 2030, le ministre de la Santé Frank Vandenbroucke (Vooruit) souhaite réduire de 100.000 le nombre de malades de longue durée par rapport aux prévisions. Plusieurs de ces mesures entreront en vigueur en 2026.
«Une saison grippale intense approche également, avec une volonté de vaccination moindre que pour le Covid, explique Maaike Van Overloop. Cela nécessite un exercice d’équilibre constant entre ceux qui sont vraiment malades et ont besoin d’une aide rapide, et ceux qui recherchent en fait un accompagnement plus intensif.»
Maaike Van Overloop lance un autre appel: «Nous demandons également à toutes les personnes qui consultent actuellement leur médecin généraliste de respecter les possibilités limitées. Le médecin généraliste vous connaît mieux que quiconque et sait souvent ce dont vous avez vraiment besoin, même si la réponse n’est pas celle que vous attendez.»
Des réactions ont également été enregistrées dans le monde politique. Dans un message publié sur les réseaux sociaux, Axel Ronse, chef du groupe N-VA à la Chambre, a lancé un service d’alerte, qualifié de «ligne de dénonciation» par ses détracteurs. Il invite les médecins à transmettre des signalements anonymes lorsque des chômeurs de longue durée se présentent à leur cabinet sur les conseils de leur syndicat afin d’obtenir un certificat d’incapacité de travail. «N’hésitez pas à les transmettre de manière anonyme (sans le nom du patient). Nous constituerons un dossier.»
Axel Ronse déclare avoir reçu des dizaines de réactions, même si l’authenticité de ces signalements ne peut être vérifiée pour l’instant. «J’ai même reçu un message d’un médecin-conseil qui a été menacé de mort parce qu’il avait refusé de déclarer une personne inapte au travail, explique-t-il. C’est terrible pour ces médecins qui perdent ainsi leur temps en consultations inutiles.»
Le syndicat flamand des médecins BVAS ne soutient toutefois pas l’appel lancé par le député N-VA. «Nous n’allons pas en faire un enjeu politique, tempère le directeur Jos Van Hoof. Nous veillons d’abord à examiner les obstacles majeurs auxquels sont confrontées les personnes en situation de chômage de longue durée ou d’invalidité. Nous voulons une société où les gens prennent soin les uns des autres et ne se stigmatisent pas mutuellement.»