Après un attentat terroriste, nos enfants et adolescents se posent aussi une foule de questions. En parler avec eux, ça aide… mais comment le faire à leur niveau ?
Dans notre société saturée d’outils multimédia, la nouvelle d’un attentat terroriste se répand dans les demeures comme une traînée de poudre. Nos enfants aussi y sont donc inévitablement exposés, parfois sous la forme d’images passablement explicites… et en tant que parent, quoi de plus normal que de chercher à les rassurer et à conjurer leurs angoisses ? Chez certains, les drames de l’actualité susciteront des questions aussi concrètes que parfois choquantes : » Qu’est-ce que ça fait de perdre ses jambes ou de mourir ? « , » Est-ce que ça pourrait arriver chez nous ? « , » Pourquoi est-ce que je n’arrête pas d’y penser ? « .
Communication créative
» Une chose est sûre : en parler, ça aide, souligne d’emblée Erik de Soir, spécialiste en psychologie des traumatismes. S’ils bénéficient d’un soutien adéquat et qu’on ne les laisse pas affronter seuls leurs craintes et leurs angoisses, les plus jeunes sont capables d’une formidable résilience. Efforcez-vous d’évaluer quelles informations votre enfant est capable de digérer en tenant compte de son niveau de développement intellectuel et émotionnel. Le principe général consiste à lui donner l’information dont il a besoin pour pouvoir continuer autant que possible à grandir en toute insouciance. Essayez de jauger ses angoisses concrètes, car elles sont différentes pour chacun, et tentez ensuite de les apaiser. »
Les enfants ne parlent pas tous spontanément de ce qui les préoccupe, même si les plus petits trahissent souvent ce qui leur trotte en tête par leurs jeux, leurs dessins ou leurs bricolages. » Ils reproduisent souvent ce qu’ils voient passer avec leurs jouets, explique Lies Scaut, psychothérapeute. Observez-les attentivement ou participez à leurs jeux ou à leurs activités créatives. Il est parfois moins difficile et moins angoissant pour eux de parler des émotions d’un jouet ou d’un personnage que d’expliquer comment ils se sentent eux-mêmes… et pour vous, il sera plus facile de recadrer leurs généralisations, amalgames et idées fausses dans ce contexte plus détendu. Il arrive par exemple que les jeunes enfants caucasiens s’imaginent que toutes les personnes à la peau sombre sont des terroristes, tandis que les petits musulmans se sentent parfois coupables des attentats commis par leurs coreligionnaires adultes. »
On peut pleurer, mais rire aussi !
S’il vaut mieux éviter autant que possible d’exposer les tout-petits aux drames de l’actualité, un JT pour enfants peut offrir un bon prétexte pour aborder ces événements dès l’âge de l’école primaire. » Pour se sentir en sécurité, les enfants ont avant tout besoin de clarté et de structure, fût-ce évidemment à leur mesure, explique la psychothérapeute. Après un attentat terroriste, efforcez-vous de changer le moins possible votre routine quotidienne. Il est important que les plus jeunes continuent à voir ces événements comme quelque chose d’exceptionnel et donc sans impact durable sur leur propre vie. Alternez aussi les discussions sérieuses avec des activités plus ludiques, histoire d’évacuer la tension… et de leur rappeler qu’ils ont encore le droit de rire. »
La manière dont vous gérez vos propres émotions aussi peut faire toute la différence. » N’ayez pas peur d’exprimer votre colère ou votre tristesse après un attentat, mais veillez aussi à rassurer votre enfant. Expliquez-lui que ceux qui l’entourent mettent tout en oeuvre pour garantir sa sécurité et insistez sur le fait que les personnes bien intentionnées sont infiniment plus nombreuses que celles qui commettent ces actes horribles. »
Soucieux de rester » cools « , les adolescents auront parfois besoin d’un petit coup de pouce pour poser les questions qui les préoccupent ou pour exprimer leurs craintes. Pourtant, leur vision du monde fait encore d’eux des individus très vulnérables. » Les adolescents sont tous convaincus que la vie leur réserve un avenir exceptionnel. Les attentats terroristes ternissent cette vision du monde et les laissent démunis, ce qui les pousse à rechercher le soutien de leurs pairs, enchaîne Erik de Soir. En tant que parent ou enseignant, vous pourrez alors les aider en abordant la question du terrorisme d’une manière adulte et rationnelle, ce qui les aidera à se construire un nouveau cadre de référence avec les bons modèles, les bonnes idoles. »
Les deux spécialistes constatent par ailleurs que cette problématique liée à des faits d’actualité malheureusement trop fréquents soit quelque peu délaissée… » Les études sur la prise en charge des angoisses suscitées par la peur du terrorisme chez l’enfant sont encore trop peu nombreuses « , regrettent-ils.
An Swerts