Malgré les promesses et les annonces spectaculaires, aucun traitement permettant une repousse totale des cheveux d’une personne atteinte de calvitie n’existe. Ceux actuellement disponibles aident surtout à ralentir la chute des cheveux.
«Remède miracle», «enfin une solution efficace», «la solution ultime contre la chute des cheveux»… Il suffit de faire quelques recherches en ligne sur un éventuel traitement contre la calvitie pour tomber sur de multiples articles aux titres accrocheurs. Mais autant le dire tout de suite: pour ceux qui sont concernés par l’alopécie androgénétique, le terme médical de la calvitie, il n’existe pas à l’heure actuelle un médicament miraculeux permettant de retrouver leur chevelure d’antan. Des traitements existent et ont prouvé une certaine efficacité d’un point de vue médical, mais ils sont loin d’être parfaits.
Un traitement prometteur
Ces dernières semaines, un nouvel espoir a été soulevé avec un traitement qui stimulerait la repousse des cheveux de 539%. L’entreprise pharmaceutique américaine Cosmo Pharmaceuticals se targue de ces résultats obtenus après deux essais cliniques, avec un traitement à la base utilisé contre l’acné avec de la clascotérone. Ce bloqueur hormonal local agirait aussi directement sur les hormones responsables de la chute des follicules pileux, ce qui améliorerait la densité capillaire, le tout sans produire d’effets secondaires selon les essais effectués sur 1.500 jeunes hommes atteints de calvitie.
«Cela faisait longtemps qu’il n’y avait pas eu un traitement aussi prometteur contre la calvitie, concède le Dr Carl Ogereau, médecin urgentiste ayant pratiqué des greffes de cheveux. Mais il faut voir ce que cela donnera sur la phase 4 des essais cliniques». Celle-ci sera effectuée sur un échantillon plus large d’hommes et de femmes, plus âgés, sur une durée plus longue, afin de surveiller l’apparition d’éventuels effets secondaires notamment. Il faudra attendre plusieurs mois avant la publication de nouvelles informations et voir comment les autorités jugeront la balance bénéfices/risques avant une éventuelle mise sur le marché de ce traitement. «Les premiers résultats sont intéressants, mais il s’agit d’une crème pour l’instant. Est-ce que ça sera agréable à mettre sur le cuir chevelu? Je ne sais pas si cela révolutionnera la prise en charge de l’alopécie androgénétique, mais peut-être que cela ajoutera quelque chose à notre arsenal thérapeutique», explique le Dr Maureen Tasia, dermatologue au CHU Saint-Pierre.
Deux traitements déjà disponibles
Cet arsenal thérapeutique se limite pour l’instant à deux traitements ayant une autorisation d’être mis sur le marché en Europe: le minoxidil et le finastéride. Le premier, utilisé à la base contre l’hypertension, est disponible sous forme de lotion ou de gélules. «Les résultats sont imparfaits, mais il n’y a pas mieux pour l’instant, explique d’emblée le Dr Ogereau. Le minoxidil réduirait la chute des cheveux dans la moitié des cas. Dans 10% des cas, il y aurait une repousse, mais de quelques cheveux duveteux. Il n’y a pas d’effets secondaires, mais il faut l’appliquer matin et soir, ce qui peut provoquer quelques irritations sur le cuir chevelu, en plus de laisser les cheveux gras: ce n’est pas tout à fait agréable comme sensation.» Disponible sans ordonnance, il peut être pris par les hommes et les femmes, ce qui n’est pas le cas du finastéride, réservé aux hommes et seulement avec ordonnance d’un médecin.
«Cela peut être une bonne alternative. Mais des études ont démontré qu’il augmentait le risque d’anxiété ou d’idées suicidaires et qu’il pourrait provoquer dans certains cas des troubles sexuels s’il est pris par voie orale. En Belgique, il est disponible sous forme de spray sous le nom de Fynzur, avec des risques moins importants», souligne le Dr Tasia, qui recommande plutôt le minoxidil à ses patients en général. La dermatologue évoque également la spironolactone, un traitement hormonal anti-androgène, comme possible traitement pour les femmes dans certains cas.
«Les patients sont parfois déçus»
Il convient de signaler que les deux premiers traitements cités sont chroniques: ils perdront leurs éventuels effets bénéfiques en cas d’arrêt. Ils agissent contre la chute des cheveux principalement, en la ralentissant, avec des résultats très variables d’une personne à l’autre. Dans certains cas, notamment pour le minoxidil, des repousses de petits cheveux ont été observées, augmentant la densité capillaire. «Les patients sont parfois déçus de voir qu’il n’y a pas dix fois plus de cheveux qu’avant le traitement. Mais pour certains, les cheveux sont complètement partis ou tellement miniaturisés que les traitements actuels ne permettent pas d’en recréer ou de les stimuler suffisamment», précise le Dr Tasia, mettant en garde contre d’autres traitements au marketing parfois attractif, mais à l’efficacité plus modérée voire non démontrée, dont la promotion peut être faite sur les réseaux sociaux.
«Il existe bien des lotions, des shampoings ou des compléments alimentaires pour traiter la calvitie, mais pour lesquels il n’y aucune preuve scientifique d’une réelle efficacité», ajoute Nicolas Delhaye, pharmacien et directeur du département Care and Quality chez MultiPharma, confirmant que la perte de cheveux «reste une situation problématique pour de nombreux patients». La greffe de cheveux peut alors apparaître comme la solution la plus efficace pour une personne qui souhaite faire «disparaître» sa calvitie. «Cela fonctionne très bien, admet le Dr Ogereau. Mais le coût n’est pas négligeable, il y a une certaine exclusion sociale le temps de la cicatrisation et cela peut ne pas fonctionner chez certaines personnes qui ont une calvitie trop importante.»
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Un marché lucratif
Un homme sur deux serait concerné par la calvitie après 50 ans. Il existe donc un réel marché à conquérir, qui s’avérerait très lucratif pour le premier laboratoire pharmaceutique capable de proposer LE traitement miracle. «Il y a plusieurs explications génétiques pour l’alopécie androgénétique, assez complexes. Plusieurs régions génomiques sont impliquées, avec de nombreux gènes… De nombreux traitements sont en phase de recherche, mais c’est encore très expérimental et ils ne vont pas changer la donne tout de suite», explique le Dr Tasia.
«Cela voudra le coup d’avoir des parts dans la compagnie qui parviendra un jour à proposer une solution assez efficace…»
Carl Ogereau, médecin urgentiste ayant pratiqué des greffes de cheveux
«C’est un sujet qui existe depuis la nuit des temps, concède le Dr Ogereau. Peut-être que ce problème n’est pas considéré comme assez sérieux, ce qui n’est pas totalement faux, pour détourner un paquet de chercheurs qui se pencheraient dessus. Ou alors les laboratoires n’arrivent pas à trouver une solution, tout simplement. Mais cela voudra le coup d’avoir des parts dans la compagnie qui parviendra un jour à proposer une solution assez efficace…»