Une prise de sang pourrait à terme permettre de diagnostiquer la maladie d'Alzheimer.

Alzheimer: bientôt un test sanguin disponible pour diagnostiquer la maladie?

Identifier la maladie d’Alzheimer pourrait bientôt se faire par un simple test sanguin, une méthode moins invasive que les examens actuels. De nombreux essais sont actuellement en cours.

Et s’il était possible de diagnostiquer la maladie d’Alzheimer, la forme de démence la plus répandue dans le monde, grâce à un test sanguin? Les recherches en ce sens se multiplient. Au Royaume-Uni, 1.000 personnes suspectées d’être atteintes de démence vont se voir proposer un test sanguin de ce genre dans les semaines à venir, relaye la BBC. Aux Etats-Unis, la FDA, l’Agence des produits alimentaires et médicamenteux, a autorisé en mai dernier un test sanguin, nommé Lumipulse. Proposé par la société japonaise Fujirebio Diagnostic, il a notamment été développé et produit dans la banlieue de Gand par sa branche belge. «Ce nouveau test est une alternative bon marché et efficace à d’autres méthodes», avait alors appuyé Christiaan De Wilde, PDG de Fujirebio Europe, dans les colonnes de Het Laatste Nieuws.

Moins traumatisant qu’une ponction lombaire

Selon l’Organisation mondiale de la santé, 57 millions de personnes étaient atteintes de démence dans le monde en 2021: la maladie d’Alzheimer, cause la plus courante, serait à l’origine de 60 à 70% des cas. En Belgique, elles étaient 212.000 en 2018, selon les chiffres de la Ligue Alzheimer, dont 65% atteintes d’Alzheimer, soit environ 138.000 personnes. «Ces tests sanguins pour diagnostiquer l’Alzheimer sont en préparation depuis près de dix ans, éclaire le professeur Philippe Amouyel, directeur général de la Fondation Alzheimer. Avec l’amélioration des technologies, il est désormais possible de détecter dans le sang des quantités de protéines qui s’accumulent dans le cerveau des patients atteints de la maladie, en particulier le peptide amyloïde-bêta et la protéine tau, sous différentes formes. Comparé aux autres techniques existant déjà pour établir un diagnostic, le résultat est sensiblement le même.»  

Cette technologie offre plusieurs intérêts, notamment pour le patient. Actuellement, une personne présentant des signes de démence (troubles de la mémoire ou du langage, désorientation…) doit d’abord consulter un médecin généraliste, qui pourra ensuite l’orienter vers un spécialiste ou un centre de la mémoire. Elle effectuera alors divers tests cognitifs ou neurologiques, puis des examens, notamment une IRM pour détecter une éventuelle atrophie cérébrale. Une prise de sang peut être effectuée aussi dans ce processus, mais c’est pour écarter d’autres causes réversibles de troubles cognitifs ou rechercher d’autres pathologies neurologiques ou générales pouvant expliquer les symptômes. 

Un PET scan (un examen d’imagerie médicale permettant de visualiser l’activité du cerveau après injection d’un traceur faiblement radioactif), ou une ponction lombaire (un prélèvement au niveau de la moelle épinière) seront enfin nécessaires pour confirmer le diagnostic de la maladie. Cette dernière étape pourrait à terme être remplacée par un «simple» test sanguin, moins long, moins contraignant et moins traumatisant.

De nombreuses inconnues subsistent

«Ce qui est intéressant, c’est qu’il sera possible d’envisager un traitement pour les personnes diagnostiquées grâce à ce genre de test. Il faudra surtout leur assurer un accompagnement, notamment psychosocial, ainsi qu’à leur famille», souligne Sabine Henry, présidente de la Ligue Alzheimer. Elle estime aussi que ces tests sanguins pourraient à terme permettre des économies pour le système de santé. «Beaucoup de personnes consultent par inquiétude, sans savoir si elles sont atteintes d’Alzheimer, et doivent multiplier les examens: ces tests apporteraient une clarification bienvenue.» 

«Il faut être sûr de leur robustesse et de leur fiabilité.»

Jean-Pierre Brion, professeur de neuropathologie à l’ULB

De nombreuses inconnues entourent toutefois ces tests sanguins, accessibles seulement pour des essais cliniques actuellement, avant leur éventuelle mise à disposition d’un public plus large. «Il faut être sûr de leur robustesse, qu’ils aient été effectués dans diverses conditions “réelles” et pas seulement cliniques, et de leur fiabilité en présence d’autres maladies qui peuvent perturber certains facteurs biologiques au niveau sanguin, comme une maladie rénale», estime le professeur de neuropathologie (ULB) Jean-Pierre Brion, qui précise que des recherches autour de ces tests sanguins ont lieu en Belgique, à l’ULB ou l’UCLouvain notamment. Le coût de ce genre de test n’est pas connu: la BBC évoque un prix de 100 livres (environ 115 euros) pour celui qui va être testé auprès de 1.000 personnes au Royaume-Uni. Aucune date n’a été communiquée concernant une mise à disposition à grande échelle. Dans Het Laatste Nieuws, le PDG de Fujirebio Europe espérait avoir une réponse des instances d’ici l’été 2026 concernant l’acceptation, ou non, du test sanguin Lumipulse par l’Union européenne.

«Il n’existe pas de traitement curatif pour la maladie d’Alzheimer»

«Actuellement, il n’existe pas de traitement curatif pour la maladie d’Alzheimer, rappelle le professeur Philippe Amouyel. C’est une maladie neurodégénérative chronique, dont on ne guérit pas.» Là encore, des progrès ont été réalisés ces dernières années et plusieurs médicaments aident à atténuer les symptômes cognitifs. Pour certains patients qui n’ont pas encore atteint un stade avancé de la maladie, l’Agence européenne des médicaments a récemment approuvé le Lequembi, un traitement coûteux aux effets indésirables lourds permettant de réduire les plaques amyloïdes qui s’accumulent dans le cerveau, causant plusieurs symptômes d’Alzheimer. Si l’Autriche ou l’Allemagne ont imité les Etats-Unis en l’autorisant également, ce n’est pas encore le cas en Belgique ou en France, où la Haute Autorité de la santé vient de recaler ce médicament en raison d’un trop grand nombre d’effets secondaires pour un bénéfice jugé insuffisant. «Les agences de santé débattent largement et regardent le rapport bénéfices/risques, pour savoir ce que cela apporte aux patients et à quel prix», ajoute Philippe Amouyel, précisant que plus d’une centaine de médicaments, permettant d’agir sur d’autres lésions de la maladie, seraient actuellement en test.

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