
Habemus papam: 4 choses à savoir sur Robert Francis Prevost, premier pape américain
Peu après 18h, la cheminée de la chapelle Sixtine a laissé s’échapper une fumée blanche, signe que les 133 cardinaux ont accordé leurs violons et désigné un nouveau pape. Ce souverain pontife, c’est l’Américain Robert Francis Prevost, désormais nommé Léon XIV.
De la fumée blanche s’est échappée, jeudi, à 18h08, de la chapelle Sixtine, annonçant l’élection, par les 133 cardinaux électeurs réunis en conclave, d’un nouveau pape pour succéder à François. Un peu plus d’une heure plus tard, le nom du 267e souverain pontife a été révélé: il s’agit de l’Américain Robert Francis Prevost, 69 ans, qui a choisi le nom de Léon XIV. Il est le premier pape élu originaire des Etats-Unis.
Dans la foulée de l’annonce, Léon XIV s’est adressé aux plus de 1,4 milliard de catholiques: «Que la paix soit avec vous tous!», ont été ses premiers mots, dans un italien teinté d’accent américain. «Merci au pape François», décédé le 21 avril à 88 ans, a-t-il aussi lancé, remerciant ses collègues cardinaux de l’avoir élu. Vêtu d’une mozette rouge et d’une étole, des habits liturgiques que François avait abandonnés, Léon XIV a appelé à «construire des ponts par le dialogue, par la rencontre, nous unissant tous pour être un seul peuple, toujours en paix». «Nous devons chercher ensemble comment être une Eglise missionnaire, une Eglise qui construit des ponts, qui dialogue, toujours ouverte à l’accueil.»
1. Un modéré
Natif de Chicago, il a été ordonné prêtre en 1982, à l’âge de 27 ans. Il a passé une vingtaine d’années en Amérique du Sud, notamment au Pérou, où il a été missionnaire et évêque de Chiclayo, sur la côte nord du pays. Léon XIV est polyglotte, puisqu’il parle non seulement anglais, mais également italien et espagnol. Il est un homme discret et réservé, qui a la réputation au sein de la Curie, le gouvernement du Vatican, d’être un modéré capable de concilier des points de vue divergents.
Les cardinaux ont donc opté pour la continuité, même si cet Américain, créé cardinal en 2023 par François, qui a porté son ascension au Vatican, devrait mettre davantage les formes que son prédécesseur, qui avait bousculé le Saint-Siège avec son exercice du pouvoir personnel, voire cassant, froissant les plumes de la hiérarchie vaticane.
2. Mauvaise gestion des affaires d’abus sexuels
Proche collaborateur de feu le pape François, il partageait sa vocation de soutien aux plus démunis et aux migrants. Un «évêque n’est pas censé être un prince assis dans son royaume, mais il doit plutôt être humble, proche des personnes qu’il sert, mais aussi marcher et souffrir avec eux», avait-il déclaré au média du Vatican, Vatican News, en octobre 2024. En revanche, contrairement à son prédécesseur, il émet quelques réserves sur les questions des droits des personnes LGBTQIA+. En 2012, par exemple, il avait fait référence au «mode de vie homosexuel» comme «des croyances et des pratiques contraires à l’Évangile».
Il est par ailleurs pointé du doigt pour sa mauvaise gestion des affaires d’abus sexuels au sein de l’Eglise péruvienne, relève le New York Times. Il n’aurait pas soutenu les victimes d’abus perpétrés par deux prêtres du diocèse de Chiclayo. Une enquête est en cours.
3. Un risque pour «l’équilibre global»?
Que le nouveau souverain pontife soit originaire des Etats-Unis est plutôt surprenant. Il y a quelques jours, le professeur en droit canon de la KU Leuven, Rik Torfs, expliquait au Vif que les chances que le 267e pape soit Etasunien étaient faibles, arguant que l’Eglise se voulait toujours très indépendante des puissantes nations. «C’est la raison pour laquelle désigner un pape américain a toujours été compromis, du fait que les Etats-Unis demeurent le pays le plus important du monde, explique Par conséquence, élire un pape originaire de ce pays ne serait pas très bon pour l’équilibre global.»
Donald Trump, qui entretenait des relations compliquées avec François, a adressé ses «félicitations» à Léon XIV, dans un message sur son réseau Truth Social. «Quelle excitation et quel grand honneur pour notre pays», a-t-il ajouté, se disant «impatient» de rencontrer le nouveau chef de l’Eglise catholique. «Les Etats-Unis se réjouissent d’approfondir leur relation durable avec le Saint-Siège avec le premier pontife américain», a, de son côté, affirmé le chef de la diplomatie américaine, Marco Rubio, lui-même fervent catholique.
Le prédécesseur de Léon XIV, qui avait reçu Donald Trump au Vatican lors de son premier mandat en 2017 pour une entrevue d’une demi-heure, avait plusieurs fois critiqué le dirigeant américain pour ses positions antimigrants. Après le retour au pouvoir du républicain, le 20 janvier, le jésuite argentin, grand défenseur des exclus, n’avait pas radouci le ton, estimant que les expulsions de migrants «portaient atteinte à la dignité de nombreux hommes et femmes».
4. Un défi de taille attend Léon XIV
Le nouveau pape devra rapidement affronter des défis considérables pour une Eglise en perte de vitesse en Europe: finances, lutte contre la pédocriminalité, baisse des vocations… Mais il devra aussi ressouder les différents courants d’une institution où cohabitent des sensibilités culturelles très diverses, entre une Europe sécularisée et des « périphéries » en croissance. Il lui faudra également apaiser une institution parfois bousculée par un pontificat ponctué de réformes et de prises de paroles tranchées, qui ont fait l’objet de vives critiques internes.
Le conclave, débuté mercredi après-midi, fut court. Le 267e pape a été élu à 89 voix au terme de quatre votes. C’est autant que le cardinal allemand Joseph Aloisius Ratzinger, devenu Benoit XVI en 2005. Et un de moins que pour le pape François (Jorge Mario Bergoglio), en 2013. Le nouveau souverain pontife a été élu à l’issue d’un scrutin qui s’annonçait très ouvert, du fait notamment du nombre record de cardinaux présents.
Léon XIV célèbrera une messe à la chapelle Sixtine, vendredi à 9h (GMT).