Plusieurs études suggèrent d'éviter le terme «végétarien» dans le menu des restaurants.

Pourquoi la Flandre veut faire disparaître les mots «végétarien» et «vegan» des menus des restaurants

Dans une note adressée aux restaurateurs, le ministère flamand de l’Environnement et de l’Agriculture conseille d’éviter de mettre les termes «végétarien» ou «vegan» dans les menus. L’objectif? Moins rebuter le client de manger végétal.

Multiplier les plats végétariens ou vegan… mais sans employer ces mots. C’est l’un des objectifs assumés du cabinet du ministre flamand de l’Environnement et de l’Agriculture Jo Brouns (CD&V), exposés aux restaurateurs en Flandre dans une note révélée ce 18 septembre par Het Nieuwsblad. Choisir un plat peut déjà être un dilemme, mais certains termes jugés “polarisants” ou “moralisateurs” risquent encore de braquer les clients.

«Evitez les termes “végétarien”, “végétalien” ou “vegan”: optez pour des abréviations neutres (v ou ve) ou utilisez des symboles comme une feuille verte», suggère ainsi le ministère, expliquant que ce «choix stratégique en matière de marketing» se base sur des «études scientifiques». Celles-ci «ont montré que le mot “végétal” avait une connotation beaucoup plus positive. Elles montrent que les gens associent le mot “végétarien” à “ennuyeux” ou “pas bon”, tandis que “vegan” évoque chez eux un côté “hippie” et “fade”», ajoute le ministère, qui espère que les Flamands mangeront 60% de repas végétariens d’ici cinq ans.

«Ce n’est pas pour moi»

Ces recommandations ont fortement fait réagir sur les réseaux sociaux du Nieuwsblad. Dans un éditorial, le journal évoque une idée «absurde». «Quiconque n’adhère pas à ces termes en a lui-même peur. Quiconque souhaite encourager les gens à les choisir plus souvent ne devrait pas les induire en erreur en leur cachant la réalité», explique-t-il. Mais dans les faits, ces recommandations du ministère pourraient bien faire la différence aux yeux des consommateurs. «Nous avons le même avis à ce sujet, nous confirme-t-on du côté de la branche belge de ProVeg, la première organisation mondiale spécifiquement dédiée à l’alimentation végétale. La mention “végétarien” sur une carte peut amener certains clients à penser: “Ce n’est pas pour moi, je ne suis pas végétarien.” Pour le côté “vegan”, elles peuvent avoir un sentiment négatif, en pensant que ça ne sera pas bon.»

Selon une étude de l’Association belge de recherche et d’expertise pour les organisations de consommateurs parue en 2023, 11% des Belges se disent végétariens et 23%, quel que soit leur régime alimentaire, veulent augmenter leur consommation de protéines végétales. Près de 28% des Belges interrogés pour une autre étude iVOX de 2022 disent manger végétarien au moins trois jours par semaine. Et au restaurant, ce choix pourrait bien être guidé par l’affichage dans le menu, comme l’explique le ministère flamand de l’Environnement et de l’Agriculture. «En mettant un petit “v” dans le menu à côté des plats végétariens, c’est plus subtil, cet aspect est normalisé. C’est également le cas si le restaurateur ne met pas les options végétariennes ou vegan dans une catégorie à part dans le menu, pour éviter de les exclure ou de les réserver à une seule catégorie de personnes», assure-t-on chez ProVeg. 

La Fédération Horeca Wallonie ne veut rien imposer

En 2022, l’organisation a dévoilé une étude effectuée au Royaume-Uni sur l’impact de l’étiquetage des produits dans les supermarchés. Pour séduire les consommateurs flexitariens (une personne limitant sa consommation de viande ou de poisson), il était conseillé d’«éviter d’utiliser “sans viande”, “vegan” ou “végétarien”, considérés comme restrictifs pour la santé et rebutant la plupart des consommateurs». Une autre étude américaine de 2023 sur «l’impact négatif des étiquettes végétariennes et végétaliennes» conseille de «supprimer ces termes des menus» dans les restaurants afin «d’orienter les consommateurs américains vers une alimentation plus durable», puisqu’ils pourraient être alors plus tentés par ce genre de repas.

Fondateur de l’organisation «We’re smart», qui promeut une alimentation végétale, le chef belge Frank Fol utilise de son côté «pure planted», «qu’on peut traduire par “végétalien”», pour ses plats végétariens, ou «100% pure-planted pour dire “vegan”». «D’autres chefs préfèrent des formules comme “balade dans le jardin” pour désigner un menu végétarien. Il existe de nombreux termes possibles pour évoquer le thème végétal: tout sauf “vegan” ou “végétarien” qui peuvent faire ressentir au client qu’il est mis directement dans une case.»

Reste à voir si les restaurateurs flamands suivront les conseils du ministère. Côté wallon, «aucune information» n’a été communiquée dans ce sens à la Fédération Horeca pour l’instant. «Nous plaidons contre toute forme d’imposition dans le secteur. Il y a quelques années, l’Afsca avait suggéré d’imposer les pictogrammes d’allergènes à côté de chaque plat dans tous les menus des restaurants. Nous avions dit que cela était impossible, pour diverses raisons. Finalement, les restaurateurs doivent désormais pouvoir expliquer oralement les allergènes.» Dans le cas où le conseil serait donné de remplacer les mots «végétarien» ou «vegan» par une lettre ou un symbole à apposer à côté du plat dans le menu, la réponse de la Fédération Horeca Wallonie est déjà trouvée: «Nous conseillerions plutôt de ne pas imposer un pictogramme ou un terme. C’est à chaque restaurateur d’avoir sa vision, son approche marketing. Où est l’identité de chaque établissement, sinon?»

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Expertise Partenaire