Caméras train
© Getty

La hausse vertigineuse des caméras dans les transports publics: voici à quoi elles servent vraiment

Laurence Van Ruymbeke
Laurence Van Ruymbeke Journaliste au Vif

Dans les bus, trains, stations de métro, des milliers de caméras observent les faits et gestes des voyageurs. Avec une obsession: garantir la sécurité.

Elles sont omniprésentes sur les réseaux des transports publics: plus de 42.300 caméras sont disposées dans les transports publics (trains, bus, métros, trams) ainsi que dans les gares, arrêts et stations. Impossible d’en apprendre plus sur leur localisation. Ni la STIB, ni les TEC, ni la SNCB n’ont accepté de répondre à cette question. Leurs arguments: «Nous ne communiquons pas publiquement l’emplacement des caméras qui équipent notre réseau afin d’éviter que des parties malveillantes aient accès à des informations qui puissent leur permettre de les neutraliser et de mettre en péril la sécurité publique», indique ainsi Françoise Ledune, porte-parole de la STIB.  Toute caméra doit pourtant être signalée par un pictogramme ad hoc, qui renseigne de facto sur sa présence…

La STIB, 1ère en possession de caméras dans les transports publics

En novembre 2024, la STIB totalisait 18.099 caméras installées dans l’espace public, sur son réseau: 3.976 sont fixées dans des stations de métro et de prémétro tandis que 14.123 autres sont embarquées dans les véhicules, trams, bus et rames de métro. Entre 2015 et 2024, le nombre de caméras en stations a augmenté de 60,4%, passant de 2.478 à 3.976. L’augmentation a été particulièrement importante après les attentats de 2016. Le nombre moyen de caméras par véhicule (environ huit) n’a pas beaucoup évolué. Mais la flotte des véhicules a, elle, gonflé de 48% durant ces neuf ans, passant de 1.169 à 1.725. Comme la loi l’impose, ces caméras et leur localisation sont déclarées auprès du SPF Intérieur et leur présence est signalée aux voyageurs via des pictogrammes. A ce jour, la STIB est, à Bruxelles, la plus importante propriétaire de caméras dans l’espace public.

Les images captées par ces milliers de caméras, conservées 30 jours, sont visionnées en temps réel, 24 heures sur 24, par le personnel des dispatchings opérationnels et de sécurité et par le service central de sécurité (cellule images). «Le but premier des caméras de la STIB n’est pas d’appréhender ou d’identifier des personnes mais de protéger nos usagers, notre personnel ainsi que nos infrastructures, détaille sa porte-parole Françoise Ledune. Elles sont également utilisées quotidiennement dans la gestion des incidents techniques sur le réseau. Elles permettent à nos agents d’intervenir rapidement et de résoudre certains litiges au profit des voyageurs, par exemple en cas de contestation de fraude.» 

Chaque année, la police adresse environ 4.000 requêtes à la STIB pour accéder à ses images. Dans quel but? «Un devoir de confidentialité ne nous permet pas de faire état du contenu des requêtes formulées par les autorités», y répond-on. De plus, les suites données à ces demandes ne lui sont pas systématiquement communiquées. On se souvient toutefois que ce sont les caméras de la STIB qui ont permis d’identifier le meurtrier de Jo Vanholsbeek, ce jeune homme de 17 ans tué à la gare Centrale à Bruxelles, en 2011. Elles ont aussi contribué à l’enquête sur les attentats de Bruxelles.

Ce vaste réseau de vidéosurveillance a un prix: l’achat et l’installation d’une seule caméra de nouvelle génération coûtent environ 5.000 euros, amortis en quinze ans. Ce coût est entièrement à charge de la Région bruxelloise pour les caméras fixes. Les caméras embarquées sont en revanche payées par la STIB dès lors qu’elles sont comptabilisées dans le prix d’achat du véhicule. Quant à l’entretien et la maintenance de ces dispositifs, hors vandalisme, ils pèsent environ 30 euros par an et par caméra.

A terme, le réseau des 4.000 caméras installées dans les stations est appelé à se développer encore: il devrait en compter 7.000 d’ici à 2030 ans, voire davantage. Parallèlement, le nombre de caméras augmentera aussi dans les véhicules de la STIB, en fonction de leur extension.

Aux TEC, il n’est en revanche pas prévu d’étendre davantage le réseau à l’avenir: tous les véhicules sont en effet déjà équipés de caméras aujourd’hui. Au total, le réseau wallon compte environ 9.250 caméras, dont quelque 8.500 embarquées dans des bus, trams ou métros. Les 750 autres sont installées dans des gares de bus ou à certains arrêts. «Les images ainsi captées font l’objet de demandes de la part de la police entre cinq et quinze fois par semaine, précise le porte-parole des TEC. L’emplacement de ces dispositifs reste une donnée sensible: l’entreprise ne souhaite pas préciser la localisation des caméras, arguant que «médiatiser cette information met en danger la sécurité de ces systèmes et donc la sécurité des citoyens, des clients et des collègues. Cela reviendrait aussi,  évidemment, à tendre la perche aux pirates potentiels.»

15.000 caméras à la SNCB

Du côté ferroviaire, quelque 15.000 caméras sont activées: environ 8.000 dans les bâtiments des 555 gares et sur les quais et environ 7.000 dans les trains de la SNCB. Les images ainsi captées, monitorées 24 heures sur 24 et sept jours sur sept par 40 collaborateurs travaillant au SOC (Security Operations Center) de l’entreprise ferroviaire, sont conservées 30 jours, sauf en cas de demande policière. L’an dernier, les différents services de police ont soumis 9.000 demandes à la SNCB pour pouvoir analyser ces images. «Ces caméras, détaille-t-on à la SNCB, servent principalement à prévenir, constater ou déceler les délits contre les personnes ou les biens, les nuisances, ou à maintenir l’ordre public.»

Depuis peu, outre la police fédérale des chemins de fer, les 130 zones de police locales qui comptent au moins une gare sur leur territoire ont également un accès direct aux images des caméras dans leur zone. «La capacité d’action de la police en est renforcée, assure-t-on à la SNCB: les interventions peuvent être dirigées plus rapidement, de manière plus ciblée et plus efficace en collaboration avec le centre des opérations de sécurité de la SNCB.» Pour autant, il n’est pas possible de déterminer dans combien de cas, par an, ces images permettent effectivement de résoudre un problème.

La SNCB assure par ailleurs ne pas être en mesure de se prononcer sur l’extension éventuelle du réseau de vidéosurveillance à l’avenir, tant les facteurs qui pourraient influencer cette décision sont nombreux.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Expertise Partenaire