Deux ans de congés de parentalité
© Getty Images

Deux ans de congés de parentalité à partager: un «bon signal», qui «perpétue toutefois les différences entre femmes et hommes»

Les députées Nahima Lanjri et Nathalie Muylle ont présenté conjointement une proposition de loi pour plus de congés de parentalité, mieux rémunérés et plus flexibles, à utiliser jusqu’à ce que l’enfant ait 18 ans.

Un «sac à dos» de deux ans de congé par enfant, que les parents peuvent également partager avec les grands-parents et des co-parents ou beaux-parents. C’est ainsi que le CD&V souhaite donner forme au crédit familial convenu dans l’accord de gouvernement fédéral et qui regrouperait tous les systèmes de congé dès la naissance, rapportent Het Laatste Nieuws et De Morgen.

Le CD&V souhaite tout d’abord un congé de naissance plus important et de meilleure qualité: 24 semaines ou six mois pour les deux parents ensemble, au lieu de quinze semaines pour la mère et 20 jours pour le père aujourd’hui. Ceux qui se répartissent le congé de manière équilibrée obtiendront six semaines supplémentaires en tant que couple: une «prime de genre». Une partie de ce «crédit de naissance» pourrait en outre être prise de manière flexible jusqu’à ce que l’enfant ait 3 ans.

Dans sa proposition, le CD&V augmente également l’allocation de congé parental et assouplit certaines conditions afin de le rendre plus accessible, même pour les parents moins fortunés et ceux qui ont des contrats temporaires. Les parents qui le souhaitent peuvent également permettre aux grands-parents et aux co-parents ou beaux-parents de prendre une partie du congé, mais l’allocation serait alors moins élevée.

Plus de flexibilité… mais moins de congés

Pour la directrice générale de la Ligue des familles, Madeleine Guyot, le «sac à dos» proposé par les sociaux-démocrates flamands revient un peu en arrière en proposant «nettement moins» de congé au global qu’actuellement. «Si on additionne le congé maternité de quinze semaines, le congé de coparent de 20 jours, le congé parents de quatre mois pris à 100%, ou encore le crédit-temps jusqu’à 51 mois, on est largement au-dessus des 24 mois annoncés par le CD&V, souligne-t-elle. D’autant que ces semaines sont à partager entre les parents et éventuellement avec les coparents, les grands-parents et les beaux-parents. Nous aurions préféré qu’il s’agisse, pour eux, de congés supplémentaires, parce qu’en l’état, cela signifie potentiellement moins de congés pour les parents», poursuit la directrice de la Ligue des familles, qui admet néanmoins que la proposition offrirait plus de flexibilité.

Avec cette proposition, l’obligation pour les mères de prendre leur congé de maternité «serait augmentée d’une semaine pour les salariées et de sept semaines pour les indépendantes». «Ce qui est juste, car on n’est pas plus parent quand on est salarié que lorsque l’on est indépendant, commente Madeleine Guyot. Mais le risque, c’est que les mères prennent moins de jours de repos que les quinze semaines dont elles bénéficient aujourd’hui.»

Les mères, grandes perdantes?

Un point de vue que partage cet économiste de l’ULB (qui ne souhaite pas que son nom soit publié). Pour lui, une telle mesure doit être assortie de conditions, notamment celle de répartir équitablement ces semaines de congé. «Dans les pays où des banques de congé communes sont mises en place, c’est surtout la mère qui en bénéficie, expose-t-il. Cela a des conséquences sur l’attachement des mères au marché du travail, et ça perpétue les différences de carrière entre femmes et hommes

Après l’accouchement, les femmes ayant donné naissance sont plus longtemps écartées du marché du travail que leur compagnon ou leur compagne, indique l’économiste. «C’est du capital humain qui se détériore. De la même manière qu’après un congé pour cause de maladie de longue durée, le retour au travail pour la mère peut être compliqué, estime-t-il. Pendant cette absence, les collègues et le travail ont continué d’évoluer, et cela peut être difficile de rattraper le train en marche quand on a été absent pendant plusieurs mois, voire années.»

Il estime donc nécessaire d’imposer aux pères de prendre une partie de ces congés de parentalité. L’incitant de six semaines supplémentaires en cas de partage équitable entre le père et la mère semble tendre vers cette voie. «C’est un bon signal en termes d’égalité des genres qu’on pourrait envoyer à la société, en actant que les pères doivent effectivement prendre leur charge et leur congé», estime Madeleine Guyot. «Ce n’est pas suffisant, juge toutefois l’économiste. Je suis plutôt favorable à l’imposition d’une durée minimale de congé au père.»

Un budget qui coince

Le CD&V admet que son plan ne sera pas réalisable avant 2030 pour des raisons budgétaires. D’ici là, le CD&V veut que la Belgique devienne «la Scandinavie de l’Europe occidentale en termes de politique familiale». Le parti espère introduire le congé supplémentaire à la naissance et jusqu’à ce que l’enfant ait 3 ans, et ce, dès l’année prochaine. Or, les 25 millions d’euros prévus dans le budget fédéral chaque année ne suffiront pas pour financer cette mesure. «Rien qu’en prenant l’augmentation du congé de maternité obligatoire des travailleuses indépendantes, cela nécessiterait annuellement 22 millions d’euros sur le total de l’enveloppe fédérale prévue», expose la directrice.

Lire plus de:

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire