Prendre soin de ses dents, le secret d’une vie plus longue et en bonne santé. © Getty Images

Mieux vieillir en prenant soin… de ses dents: «C’est aussi s’occuper de son cœur, de ses poumons, de son cerveau»

A mesure que les années passent, les petites négligences quotidiennes en matière d’hygiène bucco-dentaire se transforment en véritables bombes à retardement pour notre santé. Prendre soin de ses dents, voila l’un de secret pour une vie longue en bonne santé.

Une enquête menée en Belgique par Sciensano (2023-2024) révèle qu’un tiers des Belges de plus de 75 ans juge leur santé buccale médiocre. Au-delà de l’esthétique, cette réalité soulève un enjeu crucial. L’état de notre bouche n’est pas une simple affaire de dents blanches ou de sourire parfait. Au fil des ans, les mauvaises habitudes s’accumulent.  Seuls 57% des Belges se brossent les dents deux fois par jour, et moins de 11% nettoient leurs espaces interdentaires. Pourtant, ces gestes élémentaires protègent bien plus que les dents elles-mêmes. Ils préservent la santé de tout le corps.

En effet, les bactéries présentes dans une bouche mal entretenue peuvent franchir la barrière buccale et s’introduire dans la circulation sanguine, menaçant ainsi plusieurs organes vitaux. Plus on vieillit, plus ce phénomène prend de l’importance, le corps devenant moins résistant aux infections. A terme, une mauvaise hygiène dentaire accélère donc le vieillissement global du corps, favorisant l’apparition de maladies graves.

Le lien entre la bouche et les autres organes est aujourd’hui solidement documenté. Ce qui commence par une gencive qui saigne peut finir en hôpital. La parodontite, inflammation chronique des gencives, représente ainsi une porte ouverte aux infections généralisées. Chez les personnes âgées, ces infections peuvent déclencher ou aggraver des pneumonies, affecter le cœur en provoquant des endocardites bactériennes, voire accélérer le déclin cognitif en permettant à certaines bactéries de migrer vers le cerveau.

Les travaux du radiologue et anatomiste britannique Graham Lloyd Jones sont clairs: «Les bactéries issues d’infections bucco-dentaires peuvent favoriser des troubles graves, comme les maladies cardiovasculaires ou même la maladie d’Alzheimer. Nous retrouvons régulièrement, dans le cerveau de patients atteints de cette affection, des bactéries initialement présentes dans la bouche.»

Cette réalité scientifique souligne un impératif crucial pour la population vieillissante. Maintenir une bonne santé bucco-dentaire ne se limite pas à éviter les caries ou les pertes dentaires, mais constitue un véritable acte de prévention pour la santé générale.

L’édentement, bien plus qu’un problème esthétique

La perte progressive des dents constitue un drame courant chez les personnes âgées. En Belgique, près de 10% des adultes, dont un tiers des personnes âgées de plus de 75 ans, ne possèdent plus aucune dent naturelle. Cet édentement n’est pas seulement une préoccupation esthétique ou sociale. Il a des répercussions directes sur la nutrition et la digestion, conduisant à des carences alimentaires, à des troubles digestifs chroniques et à une accélération de la résorption osseuse au niveau des mâchoires. A long terme, cette perte osseuse peut même induire des douleurs cervicales ou vertébrales sévères.

Le paradoxe est frappant. La plupart des maladies dentaires, ainsi que leurs conséquences, sont évitables par des gestes simples et réguliers. Se brosser les dents deux fois par jour, utiliser du fil dentaire, choisir un dentifrice fluoré et consulter régulièrement son dentiste constituent autant d’habitudes faciles à adopter, mais pourtant insuffisamment ancrées dans la population belge.

Des études récentes montrent que maintenir une dentition saine, idéalement au moins 21 dents naturelles, est directement associé à un vieillissement plus actif et plus autonome. Graham Lloyd Jones le confirme: «Les personnes âgées conservant leurs dents en bonne santé présentent généralement de meilleures fonctions cognitives, sont plus autonomes et souffrent moins de maladies chroniques liées à l’âge.»

Autre lien aujourd’hui largement documenté: celui entre diabète et maladies des gencives. Le diabète fragilise les tissus buccaux là où la parodontite rend plus difficile la régulation du taux de sucre dans le sang. Une étude britannique citée par la BBC montre même qu’un traitement conventionnel des gencives améliore significativement le contrôle glycémique des patients diabétiques pendant plusieurs mois.

Un enjeu de santé publique

La santé bucco-dentaire ne peut plus être traitée comme un domaine à part. Elle est au cœur de notre santé globale. Tous les experts, comme Graham Lloyd Jones, s’accordent: «Les maladies dentaires sont évitables, et dans une large mesure, réversibles à condition d’agir à temps. Cela passe par l’éducation à la santé, l’accès à des soins réguliers, et une meilleure intégration de la dentisterie au sein de la médecine générale.»

Changer de regard sur la bouche, c’est aussi changer notre façon de prévenir la maladie. Comme le souligne le radiologue et anatomiste britannique: «La bouche doit être vue comme un véritable organe immunologique. Elle est le premier rempart contre une multitude d’agents pathogènes. La négliger, c’est laisser une brèche ouverte vers le cœur, les poumons, le cerveau.»

En Belgique, l’augmentation spectaculaire des plaintes bucco-dentaires, passées de 13,7% en 2018 à 32,5% en 2023, témoigne d’une urgence. Retards de soins post-Covid, pression sur les cabinets, inégalités d’accès… Autant de facteurs qui exigent une réponse politique claire. «L’état de notre bouche est un miroir. Il ne reflète pas seulement ce que nous mangeons ou comment nous nous brossons. Il dit aussi ce que notre société accepte, ou non, de prendre en charge», analyse Graham Lloyd Jones.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire