Gérald Papy

Guerre de Gaza: être du bon côté de l’histoire

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Non, Monsieur Netanyahou, être du bon côté de l’histoire, ce n’est pas affamer la population de Gaza. Etre du bon côté de l’histoire, c’est tout faire pour éviter un génocide.

Réagissant à l’ignoble attentat antisémite perpétré le 21 mai devant le Musée juif de Washington par un Américain propalestinien qui a assassiné deux membres de l’ambassade d’Israël à Washington, Benjamin Netanyahou a implicitement établi un lien avec une prise de position du président français Emmanuel Macron et des Premiers ministres britannique, Keir Starmer, et canadien, Mark Carney. Ils avaient réclamé deux jours plus tôt la fin de l’opération militaire à Gaza, et une augmentation de l’aide humanitaire.

Les accusant d’encourager le Hamas à «continuer à se battre pour toujours», le Premier ministre israélien a tenu à l’égard des trois dirigeants de grandes démocraties des propos insultants: «Lorsque des meurtriers de masse, des violeurs, des tueurs de bébés et des kidnappeurs vous remercient, vous êtes du mauvais côté de la justice, du mauvais côté de l’humanité et du mauvais côté de l’histoire.»

Le sens de la nuance n’habite plus celui qui dirige l’Etat hébreu depuis quinze ans presque sans discontinuer (hors un intermède d’une quinzaine de mois). Appuyer le droit d’Israël à se défendre après le pogrom commis par le Hamas le 7 octobre 2023, combattre l’antisémitisme sur tous les fronts, et, en même temps, dénoncer les actions du gouvernement israélien quand il se rend d’évidence coupable de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, et est sur la voie de perpétrer un génocide, ne serait donc pas possible dans l’esprit du plus expérimenté homme politique israélien contemporain? N’est-ce pas là faire injure à l’intelligence juive?

Israël bloque depuis le 2 mars la fourniture d’aide alimentaire à la population du territoire palestinien dans le cadre de son opération «Les charriots de Gédéon» qui vise la réoccupation par l’armée israélienne de ce bout de terre rendu aux Palestiniens en 2005. Il autorise depuis le 19 mai l’entrée de quelques convois seulement. «Un écran de fumée» devant servir à «éviter l’accusation d’affamer les habitants de Gaza, tout en permettant à peine leur survie», diagnostique l’organisation Médecins sans frontières. A quoi peut servir dans la logique criminelle du gouvernement israélien d’affamer les Gazaouis si cette stratégie ne sert pas ses «intérêts» militaires et antiterroristes? A favoriser leur déportation? A accélérer leur élimination alors que près de 54.000 d’entre eux, dont plus de la moitié de civils, femmes, enfants, personnes âgées, ont déjà été tués en 18 mois de guerre?

Dans ce contexte, les éléments constitutifs d’un génocide sont de plus en plus nombreux pour qualifier la politique du gouvernement Netanyahou à Gaza. En France, des personnalités juives s’élèvent pour dénoncer sa «fuite en avant». «Je me suis tue, mais aujourd’hui, il me semble urgent de reprendre la parole […] par amour d’Israël», clame la rabbin Delphine Horvilleur. En Israël, un «Not in my name» massif ne semble toujours pas possible. Et pourtant…

Non, Monsieur Netanyahou, être du bon côté de l’histoire, ce n’est pas affamer la population de Gaza. Etre du bon côté de l’histoire, 80 ans après la libération des camps d’extermination nazis, c’est tout faire pour éviter un génocide.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire