Sur les finances publiques de la Belgique, Bart De Wever joue à « pile je gagne, face tu perds ». Dans tous les cas, il tire un intérêt politique d’une dégradation budgétaire à laquelle il a largement contribué.
Bart De Wever adore les anglicismes, et il a beaucoup de skills. Mais le latiniste anversois maîtrise peut-être aussi le vieil italien de Machiavel, qui appelait virtù ce que sont les prodigieux skills de ce Florentin de l’Escaut.
Ces skills consistent à laisser pendante une alternative stratégique dont les deux options le servent, et cela depuis bientôt deux décennies.
Car on ne sait toujours pas si Bart De Wever a vraiment un plan pour la Belgique, on ne sait toujours pas tout à fait non plus s’il en a un contre la Belgique, mais comme cela fait 20 ans que ça dure, il y a longtemps déjà que le jeu du «pile je gagne, face tu perds» du Premier ministre est, lui, limpide, réputé même, presque éculé.
Sa martingale fait jouer les autres avec des règles qu’il ne respecte pas. C’est celle du séparatiste qui fait croire qu’il est le seul à pouvoir éviter la séparation. La rentrée politique du Premier s’est encore structurée sur cette fructueuse alternative, quel que soit le résultat d’un conclave budgétaire que, comme absolument tous ses prédécesseurs depuis 30 ans, il compare à l’ascension d’un «col hors catégorie».
Soit le Premier ministre redresse les finances du pays et résorbe les déficits vertigineux creusés, dit‑il, par les autres. Cela voudra dire que le pays mérite de continuer car il est viable financièrement, et Bart De Wever sera le héros des Belges.
Soit le Premier ministre ne redresse pas les finances du pays et creuse les déficits vertigineux creusés, dit‑il, par les autres. Cela signifiera que le pays ne mérite pas de continuer car il n’est pas viable financièrement, et Bart De Wever sera le héros des Flamands.
Dans les deux cas, notre very skilled Premier trouvera un atout dans les finances dégradées du pays.
C’est pourquoi cette dégradation l’intéresse au moins autant que de dénoncer ces vilains autres, vilains Wallons, vilains gauchistes, vilains vivaldistes qui auraient tant creusé les déficits qu’il est obligé d’essayer de les reboucher.
Alors on ne sait peut‑être toujours pas s’il a un plan, ni duquel il s’agit, si c’est un plan pour ou contre la Belgique. Mais lors de la première participation fédérale de son parti séparatiste, sous Charles Michel, il avait appliqué cette habile recette consistant à moins financer des services pour en miner l’efficacité, une stratégie que les néolibéraux friands d’anglicismes résument en starve the beast, affamer la bête. Le tax shift, délibérément non compensé, prive aujourd’hui la sécurité sociale de huit milliards d’euros annuels. La norme de croissance des soins de santé limitée à 1,5% a fait sentir ses fructueux effets pendant la pandémie. Le tout a contribué très lourdement à la dégradation volontaire des finances du pays et de la qualité des services rendus à la population.
Et c’est pourquoi, même si on n’est toujours pas tout à fait certain de savoir quel est son plan, on sait déjà que lors de la seconde participation fédérale de son parti séparatiste, sous le very skilled Bart De Wever, les finances du pays se dégraderont également, et même toujours plus.
Parce que s’il n’a pas de plan, Bart De Wever, il gagne, et s’il en a un, ce sont les autres qui perdent. C’est comme ça quand on est very skilled.
«On ne sait toujours pas si Bart De Wever a un plan pour la Belgique, ni s’il en a un contre.»