Le facesitting (aussi appelé queening dans sa version féministe) est un terme quasi aussi recherché sur les plateformes pornographiques que big boobs. Pourquoi ce fantasme masculin, inspiré du BDSM, est-il si populaire? Et est-ce une bonne nouvelle pour les femmes? Oui et non.
Le décès fut acté quelque part durant les années 1990. Cause de la mort: ringardisation. Mais puisque en matière de mode, le désuet redevient toujours hype, le pin’s fait son grand retour. Et puisque tout ce qui est in finit toujours par se vendre sur un site chinois, celui-ci propose désormais des tonnes de ces badges à des prix risibles. Entre le verre de Spritz et le bocal rempli de chats, une… paire de fesses. En string. Agrémentée de ce slogan: «Sit on his face. If he dies, he dies» (la traduction n’est sans doute pas nécessaire).
Une version masculine, qui donnerait à peu près «Put it into her mouth. If she dies, she dies», passerait sans doute moins crème. Mais bon, les mecs crèvent vachement moins des violences féminines que l’inverse, et sans doute faut-il comprendre cette asymétrie culturelle comme une sorte de revanche ou de renversement des codes habituels de la mâle domination. De la même manière que gribouiller des verges dans l’espace public est devenu vulgaire, alors que dessiner des clitoris sur les murs relève de la revendication.
Mais que ce double standard ne détourne point de la thématique de fond abordée par ce pin’s: le facesitting. Allez, une petite traduction tout de même, pour celles et ceux qui joueraient les innocents: le fait, pour la femme, de s’asseoir sur le visage de son partenaire sexuel.
Une pratique prisée, à en croire le site Pornhub, qui en 2019 lui consacrait (ainsi qu’au deepthroat) une «analyse». Selon les données du site pornographique, ce mot clé a connu une flambée de recherches à cheval entre fin 2013, début 2014, un pic en avril 2016 (pourquoi? comment?) puis une stabilisation pour devenir le 174e terme le plus populaire sur la plateforme. Ca n’a l’air de rien, mais c’était –à l’époque, il n’existe pas de chiffres publics plus récents– à égalité avec «célébrité», et pas très loin derrière «big boobs» et «gloryhole».
Sans doute la sortie de Cinquante nuances de Grey –le livre en 2011, puis le film en 2015; deux navets qui auront toutefois contribué à la popularisation du BDSM– n’y est-elle guère étrangère. Car c’est de là qu’il provient, le facesitting: c’est qu’il est certes question de langue, de vagin, voire d’anus, mais aussi d’asphyxie, hein.
Dans une société où 40% des femmes ne se masturbent quasi jamais, tous les chemins menant au clitoris sont probablement réjouissants.
Depuis ce regain de popularité, la pratique se nomme aussi désormais queening, et celui ou celle qui a inventé cet euphémisme voulait vraisemblablement souligner à quel point tout cela semble renverser les codes de la sexualité hétéronormée, traditionnellement centrée sur la figure féminine passive.
Empouvoirement sexuel? Ou simple caricature de puissance, scénarisée pour le male gaze et d’abord réalisée pour le plaisir masculin? Un peu comme la domina, avec ses talons aiguille, son latex et ses insultes, qui semble bien souvent davantage œuvrer pour satisfaire les fantasmes humiliants de ces messieurs plutôt que par épanouissement personnel.
Mais bon, ça casse un peu l’ambiance, tout ça. Dans une société où 40% des femmes ne se masturbent quasi jamais (comme le révélait une étude sur la sexualité des Belges publiée sur le meilleur site d’information du pays francophone; oui, oui, celui-ci même), tous les chemins menant au clitoris sont probablement réjouissants. D’autant qu’en 2024, toujours selon les datas de Pornhub, l’un des termes connaissant une forte progression fut tradwives. Et celles-là, elles ne s’assoient certainement sur rien d’autre que des chaises.